Hiroshima mon amour: Entre amour et destruction nucléaire

Hiroshima mon amour: Entre amour et destruction nucléaire

« Tu n’as rien vu à Hiroshima », dit Eiji Okada à Emmanuelle Riva, qui joue son amante dans Hiroshima mon amour. Elle lui répond qu’elle a vu des corps calcinés à l’hôpital, des images terribles de désolation au musée. « La température du soleil sur la place de la Paix. Comment l’ignorer ? », lui demande-t-elle d’une voix douce. Il lui répète alors : « Tu n’as rien vu à Hiroshima. Rien ».

Le chef-d’œuvre d’Alain Resnais a été sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes en 1959, en dépit des réserves du gouvernement français qui craignait de froisser les sensibilités américaines avec ce plaidoyer pour la paix. Les Français avaient raison. Les Américains ont obtenu que cette magnifique histoire d’amour sur fond d’angoisse nucléaire, écrite par Marguerite Duras, soit présentée hors compétition.

Je me suis souvenu de cette anecdote après avoir vu Oppenheimer de Christopher Nolan, sorti vendredi dernier. Le réalisateur de Inception et Dunkerque a fait le choix de ne pas montrer ni reconstituer les images des ravages de la bombe atomique à Nagasaki et Hiroshima. Aucune trace des charniers japonais ou des villes réduites en poussière. Je ne sais pas si c’est par pudeur ou par respect pour les Japonais que Christopher Nolan a pris cette décision. Il a expliqué qu’il voulait se concentrer sur le regard de Julius Robert Oppenheimer, le “père de la bombe atomique” et sujet de son film, sur les événements.

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Je me demande ce que les Japonais penseront de ce film qui nous rappelle que les Américains sont jusqu’à ce jour le seul peuple à avoir utilisé une arme nucléaire contre une population civile. Les deux bombes ont fait environ 200 000 morts. Au moment où Hiroshima mon amour est sorti aux États-Unis, un comité sénatorial examinait le parcours de J. Robert Oppenheimer, héros de la Seconde Guerre mondiale déchu en raison de ses sympathies présumées pour des intellectuels de gauche et des sympathisants communistes.

Christopher Nolan, qui s’est inspiré de la biographie American Prometheus de Kai Bird et Martin J. Sherwin, lauréats d’un prix Pulitzer, présente Oppenheimer à la fois comme un génie tourmenté et un martyr du maccarthysme, un surdoué ambitieux et arrogant, un séducteur compulsif et un homme hanté par les véritables victimes de ses théories de la physique quantique. Il était à la fois Prométhée et Pandore. Celui qui a volé le feu à Zeus et celle que Zeus a créée pour se venger.

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Oppenheimer, fils d’immigrants juifs allemands aux États-Unis qui possédaient des œuvres de Picasso, Renoir et Van Gogh, n’a pas eu besoin d’être convaincu de rejoindre l’effort de guerre. Il espère que la puissance inédite de l’arme conçue par son équipe dissuadera à jamais les hommes de l’utiliser. Il va regretter sa naïveté. Pour le meilleur et surtout le pire, il introduit le monde dans l’ère nucléaire.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors que son visage est en couverture du magazine Time, Oppenheimer avoue à Harry Truman, qui le reçoit à la Maison-Blanche, qu’il a l’impression d’avoir du sang sur les mains. Le président américain, exaspéré, aurait déclaré à un collaborateur qu’il ne voulait plus jamais revoir “ce fils de chienne” dans son bureau. “Pensais-tu qu’en les laissant te salir et te plumer ils te pardonneraient ?”, demande sa femme à Oppenheimer, au moment où le gouvernement américain le tourne le dos.

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Malgré toute la profondeur du jeu de Cillian Murphy, excellent, et malgré les intrigues politico-militaires entourant le personnage de Lewis Strauss superbement interprété par Robert Downey Jr, Oppenheimer reste un film biographique conventionnel… pour un film de Christopher Nolan. Il y a beaucoup de scènes de commissions d’enquête, de scientifiques qui gribouillent des formules mathématiques au tableau noir. J’ai parfois eu l’impression de regarder un “film oscarisé” à la Un homme d’exception de Ron Howard, plutôt qu’une des superproductions complexes et brillamment déconstruites auxquelles Christopher Nolan nous a habitués. C’est une chose de s’effacer humblement devant son sujet, mais c’en est une autre d’oublier ce qui fait la singularité de sa signature. J’ai vu Oppenheimer. Je n’ai rien vu d’Hiroshima. J’espérais en voir plus de Nolan.
#rien #voir #dHiroshima #Presse
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