« Il est crucial de faire respecter les arrêts de la CEDH », quotidien Junge Welt, 3 mai 2024.

En avril, vous avez organisé à Bruxelles, avec des associations d’avocats européennes, une conférence sur la situation des prisonniers politiques en Europe. Dans la déclaration finale, vous dites que la torture et les mauvais traitements deviennent de plus en plus évidents. Pouvez-vous préciser cela ?

La détérioration des conditions de détention des prisonniers politiques en Europe est un phénomène extrêmement préoccupant. Malgré les arrêts répétés de la Cour européenne des droits de l’homme, CEDH, sur le respect des normes fondamentales en matière de droits de l’homme, nous sommes confrontés à des cas de plus en plus alarmants de torture et de mauvais traitements.

Selon vous, quels sont les pays particulièrement négatifs ?

Un exemple particulièrement frappant est l’isolement cellulaire actuel du prisonnier politique Abdullah Öcalan. Le CPT (Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, jW) précise lui-même que la durée maximale de l’isolement cellulaire ne doit pas dépasser 14 jours. Cependant, il est isolé du monde extérieur depuis plus de 1 100 jours. Au cours des trois dernières années en particulier, ses contacts avec le monde extérieur ont été totalement coupés, ce qui a entraîné un manque flagrant de transparence sur son état et son bien-être.

Et au-delà de cette affaire ?

En outre, des pays comme l’Italie, l’Espagne et la Hongrie sont de plus en plus connus pour la détérioration des conditions carcérales.

La conférence a décidé qu’une lutte juridique et politique efficace et collective devait être menée contre l’isolement et la torture dans les prisons. À votre avis, à quoi cela devrait-il ressembler ?

La lutte contre l’isolement et la torture dans les prisons nécessite une stratégie globale à différents niveaux. Tout d’abord, la participation de la société civile est cruciale. Des organisations telles qu’Amnesty International et Human Rights Watch jouent un rôle important en abordant cette question et en la rendant publique. L’action collective peut contribuer à générer une pression politique et à faire prendre conscience des griefs.

Qu’est-ce qui est important d’autre dans la pratique ?

L’application des arrêts de la CEDH est cruciale. En outre, des institutions telles que le CPT jouent un rôle clé dans la prévention des traitements violant les droits de l’homme. Cependant, la situation autour d’Öcalan n’a pas été reconnue d’une seule syllabe dans son récent rapport annuel. Pour agir efficacement, le CPT doit envoyer régulièrement des délégations pour examiner les conditions de détention et garantir le respect des normes fondamentales en matière de droits de l’homme, tout en préservant son indépendance.

Enfin, l’UE et ses institutions, y compris le Conseil de l’Europe, sont déterminées à protéger les droits de l’homme, mais trop souvent, elles manquent d’action pour remédier aux abus existants. La pression politique sur les États membres est cruciale pour garantir l’État de droit. Il est essentiel de leur envoyer des signaux clairs pour garantir le respect des droits de l’homme.

Quelles sont les conséquences pour vous de la conférence ?

Il a offert aux participants une plateforme pour partager leurs expériences personnelles et les rapports de leurs clients sur la torture et les mauvais traitements. La confrontation directe a créé une atmosphère de détermination et d’action collective contre ces événements odieux. Nous prévoyons de créer un réseau européen d’avocats présents à la conférence. Ce réseau permettra de mettre en commun des ressources, d’échanger des informations et de développer des stratégies communes pour lutter contre les violations des droits de l’homme dans les prisons. Notre objectif sera d’agir par diverses mesures à différents niveaux et avec différents acteurs pour lutter contre l’emprisonnement politique et la torture en Europe et pour protéger les droits des prisonniers politiques.