Se rendre à l’école, jouer dans la cour de récréation, croiser ses camarades dans les couloirs… Tous ces petits moments du quotidien sont devenus sources d’angoisses pour Marlène et Garance. Ces deux sœurs, inscrites en CM 2 à l’école élémentaire Thiers au Raincy (Seine-Saint-Denis), disent être victimes de harcèlement scolaire de la part d’un petit garçon scolarisé dans la même classe que Marlène. Des certificats médicaux attestent d’ailleurs des « troubles » ou des « conséquences psychologiques » qu’elles présentent à cause des brimades qu’elles subissent depuis septembre dernier dans cet établissement où elles sont pourtant écolières depuis le CP.
« Tout se passait bien dans cette école jusqu’à l’arrivée d’un nouvel élève à la rentrée, rapporte Yann, leur papa. Il y a eu quelques coups, mais surtout beaucoup d’insultes et d’humiliations. » « Une fois, il m’a mis un coup de pied à la gorge alors qu’on était à la piscine », décrit Marlène. « Il m’a traitée de vermine, m’a donné un gros coup de tête dans le ventre, a plusieurs fois essayé de me faire tomber, rapporte Garance. Tout ça me stresse beaucoup. » Les angoisses de la fillette sont en train de tourner à la phobie scolaire. Elle rate régulièrement la classe, n’ayant plus la force d’affronter le garçon qui lui cause tant de tourments.
Déclenchement du protocole harcèlement
« Il m’a traité de grosse », relate également Marlène qui s’est depuis mise à parler de régime à ses parents. « Quand on les récupère de l’école, elles sont parfois en pleurs. Elles ne veulent plus y aller, ça peut se terminer en crise. Marlène a fait une poussée d’eczéma », relate leur papa. Dès le mois de septembre, la famille a pris contact avec la maîtresse pour discuter de la situation. Plusieurs réunions ont eu lieu avec l’équipe éducative sans qu’elles réussissent à apaiser le climat scolaire de ces jumelles.
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Les parents ont notamment assisté à une réunion d’équipe éducative (REE) avec la maîtresse, une médiatrice spécialisée dans le harcèlement scolaire, la directrice et une psychologique dans le but de « régler la situation d’intimidation », comme le précise la note de synthèse de la réunion qui indique le « déclenchement du protocole harcèlement ». « On se donne jusqu’aux vacances pour voir si le climat s’apaise et si un changement est visible. Les parents demandent un acte fort symbolique pour leurs enfants et les autres élèves. Les informations sont transmises à l’inspecteur de l’Éducation nationale qui suit la situation de près », affirme le compte rendu. Mais d’après la famille, les problèmes ont perduré.
Un élève sur dix concerné
Début février, elle a donc décidé de déposer une main courante pour « harcèlement en milieu scolaire ». Une deuxième REE a été organisée quelques jours plus tard. « L’inspecteur de circonscription était présent, rapporte Yann. Le discours a alors changé. Ils nous ont dit qu’ils avaient mis des choses en place, mais n’ont pas voulu nous préciser quoi exactement. Tout ce qui a été proposé, c’est que Garance n’aille plus en récréation ou que les filles arrivent à l’école en horaires décalés pour ne plus avoir à le croiser avant la classe. On a bien sûr refusé, cela les aurait stigmatisées… Ils ont même osé placer leur harceleur en victime. »
« La situation fait l’objet d’un suivi attentif depuis plusieurs semaines de la part de l’équipe pédagogique, de la médiatrice scolaire et de l’inspecteur de l’Éducation nationale », assure de son côté la Direction des services départementaux de l’Éducation nationale, qui précise que le « protocole national de prévention du harcèlement » a été mis en œuvre. « Plusieurs réunions d’équipe éducative ont été organisées sollicitant notamment la psychologue de l’Éducation nationale », ajoute-t-elle. La dernière s’étant tenue vendredi 17 mars.
« On ne peut pas dire à un enfant d’arriver plus tard en classe ou d’éviter la cantine »
« Ce genre d’histoire, c’est un peu notre quotidien, il y a plein d’enfants qui sont harcelés dès le primaire. Cela concerne environ un élève sur 10 », rappelle Nora Tirane Fraisse, fondatrice de l’association Marion, La Main tendue, spécialisée dans la lutte contre le harcèlement scolaire. « Il y a des protocoles à suivre dans ce cas : contacter l’enseignant responsable, qui doit recevoir la famille. Ça remonte ensuite au directeur, puis au responsable de la circonscription. On peut appeler le 3020 (numéro gratuit qui permet de signaler une situation de harcèlement)qui va contacter les référents harcèlement locaux pour qu’ils prennent attache avec la famille ».
Nora Tirane Fraisse se dit « étonnée » des propositions rapportées par les parents des deux fillettes. « On ne peut pas dire à un enfant d’arriver plus tard en classe ou d’éviter la cantine. Dans le harcèlement, il y a six lieux à risque : la cour, la classe, le chemin de l’école, etc. Si je confine une enfant dans une salle de classe, quid des toilettes, des couloirs ? Ce n’est pas la solution, insiste-t-elle. Il faut développer des interactions positives, voir s’il y a eu une prise de contact avec l’équipe Ressource harcèlement rattachée à l’établissement, s’il y a des élèves ambassadeurs pour accompagner les enfants en souffrance, si l’élève accusé de harcèlement a été pris en charge pour qu’il cesse ses comportements, etc. »
Vendredi 24 mars, Garance et Marlène ont finalement appris que l’élève allait changer d’école, sans savoir pour quelle raison.
2023-03-27 10:00:00
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