«Jamais vu un avenir aussi incertain»- Corriere.it

«Jamais vu un avenir aussi incertain»- Corriere.it

2023-10-16 08:02:18

De Francesco Battistini

En ligne pour l’évacuation totale de la ville dans le désert : d’ici l’armée partira pour les grandes manœuvres sur Gaza

DE NOTRE CORRESPONDANT
SDÉROT— Il est assis sur la chaise d’un épicier, à côté d’un distributeur automatique de billets. Les mains jointes dans un spasme. Regardez les voitures garées. La jambe tremble. Je souffre du SSPT…, dit : Syndrome de stress post-traumatique. Cela m’est venu il y a vingt-cinq ans, pendant la guerre au Liban. Avec les médicaments, je me sentais mieux. Maintenant, ils ne suffisent plus, je suis à nouveau malade.

Le 7 octobre, Dan Harari a vu et revécu : l’ennemi derrière les portes, les voisins massacrés, les taxis transpercés par les kalachnikovs, les corps d’ouvriers népalais renversés sur des pick-up. Et tous ceux qui tiraient se sont enfuis, se sont cachés. À 58 ans, Dan n’avait pas prévu que la vie reprendrait le cauchemar et le lui cracherait au visage : Je suis paralysé, je ne pars pas…. le jour de l’évacuation totale de Sdérot, la ville qui autrefois faisait fleurir le désert et maintenant seules les larmes coulent : le haut-parleur sonne, les minibus se remplissent, sept mille familles partent dans les hôtels d’Eilat, Jérusalem, Tel Aviv. Sur la place Moshe Dayan, seul Dan pleure de stress. Immobile. Incapable : Je ne peux m’empêcher de penser aux enfants – un sanglot -, ils avaient trois ans – un sanglot encore plus fort -, ils auraient pu être mes enfants….

Même les corbeaux s’en vont. Et les errants. Leur peur, ce ne sont pas les sirènes : le vide. Le silence du jardin desséché. Il n’y a pas de benne à ordures dans laquelle fouiller, ni d’étranger contre qui aboyer. Les feux tricolores ne clignotent pour rien. Il ne reste que les deux lions, sur le panneau publicitaire d’une agence immobilière : Nous apprivoisons tous les dangers !, promet le slogan. Mais ce n’est pas vrai, car l’agence est fermée et les dompteurs se sont enfuis, comme tout le monde.

Il est l’heure de partir. Ils ont fait les valises tôt ce matin. L’école, où se rassembler, était ouverte alors qu’il faisait encore nuit. Nous nous sommes alignés et avons regardé le ciel, règle fixe à Sderot : une ville où les arrêts de bus sont des boucliers en béton, l’hôpital garde les machines les plus chères au sous-sol, les terrains de jeux ont des cloches d’urgence. Et si vous conduisez, mieux vaut garder votre ceinture de sécurité débouclée, l’interrupteur de sécurité éteint et surtout la radio éteinte : sinon vous risquez de ne pas entendre les sirènes. Seize ans à vivre et à mourir ainsi.

A dix heures, le réveil sonne. Tzeva adom !, code rouge. Une fusée atterrit sur une maison déjà abandonnée. La fumée jaune et noire. L’odeur des existences s’estompe, le feu monte et les pompiers épuisés abandonnent. Brucie, Sdérot, brucie. Ce n’est pas le moment de rester, estime le maire Alon Davidi. Pas le moment de partir : je ne voulais pas partir, raconte Sharon Levy, 22 ans, tenant à la main la carte postale des réservistes rappelés, les roquettes sont là depuis que je suis à l’école et je n’ai jamais ressenti de véritable désespoir. Cette chose différente. Jamais vu. Le triangle de la peur, Ashkelon-Sderot-Netivot, désormais une expression géométrique : 80% des Israéliens ont accepté l’invitation à aller ailleurs — pas un ordre ! — et laisser une marge de manœuvre à l’armée de la Grande Vengeance, déployée dans les champs de blé, sous les viaducs, dans la brousse qui entoure la bande.

Al caff Gi, l’autogrill dei camionisti che fino a qualche giorno fa sfioravano imperturbati l’Hamasland, pochi chilometri prima del valico distrutto di Eretz, David il proprietario ha sbarrato e non sa se torner mai: Non ho mai avuto tutta questa incertezza del futur. Un député du Likoud arrive pour saluer l’exode, mais on lui conseille de partir : l’école est cadenassée à midi, tout le monde part. Dans la rue Herzl, un bulldozer enlève les décombres du commissariat et le grutier, un Ethiopien, dit qu’il est pressé d’en finir et qu’il a peu de temps pour parler. Dieu me protège, je reste, fier Amir Buchbut, 51 ans, le seul à garder l’épicerie ouverte : des soldats, des ivrognes, des édentés arrivent, je leur donne tout gratuitement, ils doivent s’entraider…. Sur le trottoir, seule, une petite femme appelée Elna Rocky : Je vis ici depuis 77 ans, je n’ai personne. Mon frigo plein. Il dit que Sderot est quand même un bel endroit, vide. Il nous chante une vieille chanson, en italien : Partir, la nave partir…. On ne sait pas où il arrivera.

16 octobre 2023 (modifié le 16 octobre 2023 | 07:02)



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