Jonathan Glazer, le Britannique, a réalisé de nombreux clips vidéo, plusieurs publicités et quelques longs métrages qui ne sont pas forcément inoubliables. Cependant, il a changé de niveau en réalisant “La Zone d’intérêt” (2023), un film percutant qui a remporté l’Oscar du meilleur film étranger. Le film nous plonge dans la vie de la famille de Rudolf Höss, le commandant du camp d’extermination d’Auschwitz, vivant dans une maison avec vue sur le mur symbolisant l’horreur. Le film ne montre pas ce qui se passe derrière les barbelés, mais met en avant une épouse et des enfants qui préfèrent ne pas voir.
Lorsqu’il a reçu son prix le 10 mars, Jonathan Glazer a fait un parallèle avec la situation à Gaza. “Nous sommes ici en tant que personnes qui refusent que leur judaïté et l’Holocauste soient utilisés par une occupation qui a entraîné un conflit pour tant de personnes innocentes, que ce soit les victimes du 7 octobre en Israël ou l’attaque en cours sur Gaza”, a-t-il courageusement déclaré. Les réactions ont été rapides, d’abord en raison de malentendus – certains ont interprété, ou voulu interpréter, que Glazer reniait sa propre judéité. Ensuite, parce que le réalisateur parle d ‘«occupation» et qu’il établirait une «équivalence morale entre un régime nazi qui a cherché à exterminer une race de personnes et une nation israélienne qui cherche à éviter son propre anéantissement», selon une lettre ouverte signée par plus de 450 professionnels juifs d’Hollywood. En écho aux applaudissements enthousiastes entendus au Dolby Theatre, d’autres voix ont salué les paroles de Glazer, comme les militants inlassables de la voix juive pour la paix et IfNotNow aux États-Unis; ou Piotr Cywiński, directeur du Mémorial d’Auschwitz, qui parle sur la plateforme X d’un «avertissement moral universel contre la déshumanisation».
Dans une tribune de soutien publiée dans le Gardien, l’écrivaine canadienne Naomi Klein, figure de l’altermondialisme et de la justice climatique, rappelle que chaque génocide est différent et que Gaza n’est évidemment pas Auschwitz, ni dans sa logique mortelle, ni dans le nombre de victimes. «Mais si l’édifice du droit international humanitaire d’après-guerre a été mis en place, souligne-t-elle, c’est pour nous fournir les outils nécessaires pour identifier les schémas collectifs avant que l’histoire ne se répète à grande échelle. Et certains de ces schémas – le mur, le ghetto, les massacres, l’intention d’élimination affirmée à maintes reprises, la famine de masse, le pillage, la déshumanisation joyeuse et l’humiliation délibérée – se répètent.»
Il reste à accepter de le voir. À Berne également, alors que la Suisse hésite à exiger un cessez-le-feu inconditionnel à Gaza, comme l’a souligné samedi lors de la manifestation nationale pour la Palestine à Lausanne.
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