2025-01-18 20:08:00
Qu’il obligera les troupes israéliennes à quitter le sud et à lutter contre les mafias, qu’il combattra la corruption et favorisera le développement, et qu’en bref, il s’efforcera de réformer un système sectaire qui sclérose la politique locale. Joseph Khalil Aoun a réalisé de nombreuses … et des promesses ambitieuses dans le discours avec lequel il a accédé à la présidence du Liban. Ce militaire de carrière prend la direction de l’exécutif après deux ans de vacance, preuve de la paralysie dont souffre la vie publique dans le pays arabe. De grands espoirs sont placés en lui. Il faut désormais que ses vœux, comme ceux de la majorité des citoyens du petit Etat, ne soient pas emportés par le vent de la Corniche, le front de mer de Beyrouth.
Le défi est immense. Prendre les rênes de cette république tourmentée, c’est naviguer sur un champ de mines. Peut-être que son expérience de la guerre lui permettra de réussir une tâche d’une telle ampleur. Le nouveau leader est né il y a 61 ans dans une famille de confession catholique maronite et ce n’est pas un fait mineur. Le credo religieux conditionne la trajectoire des Libanais, qui n’ont pas, par exemple, la possibilité de célébrer un mariage civil. La politique est également conditionnée par la foi. La présidence de l’État est réservée aux chrétiens, tandis que le Premier ministre doit être un musulman sunnite et que le président du Parlement doit être issu de la communauté chiite.
Le jeune Aoun s’est enrôlé dans l’armée après avoir obtenu un diplôme en sciences politiques et affaires internationales à l’université américaine. Le baptême du feu a eu lieu dans l’épilogue de la guerre civile qui a dévasté son pays entre 1975 et 1990. Il a ensuite effectué des formations militaires et antiterroristes en Syrie et aux États-Unis. Son élection au poste de commandant de la neuvième brigade d’infanterie en 2015 a marqué une étape importante dans sa carrière et dans l’histoire récente du pays. Ce corps, déployé à la frontière, devait repousser les tentatives d’expansion de l’État islamique et du Front Al Nosra au Liban. L’opération “Jroud Dawn”, dirigée par l’officier, a empêché l’invasion avec le soutien du Hezbollah et des troupes syriennes régulières. Par la suite, il a été nommé commandant en chef des Forces armées, l’un des groupes les plus crédités de l’administration nationale.
Le désastre a accompagné l’histoire récente du Liban, avec un scénario très polarisé. En 2005, l’assassinat du Premier ministre Rafic Hariri a démontré l’existence de deux factions divisées par leur attachement ou leur rejet de la Syrie, voisin toujours intrusif. Curieusement, tous deux sont constitués de partis idéologiques très divers, mais unis dans cet amour ou cette haine envers le régime d’Assad.
Cet assassinat est le premier d’une série d’événements graves. La crise économique, qui s’est aggravée au cours de la deuxième décennie, ou encore l’explosion du port de Beyrouth en 2022, ont provoqué d’intenses protestations citoyennes. La projection d’Aoun au-delà des casernes s’est produite alors, lorsqu’il a crié à la stagnation et à l’absence de réponses à la récession, même si elle s’est limitée au domaine militaire. Ces manifestations se sont répandues sur les réseaux sociaux et lui ont valu une notoriété au sein de la société civile. En 2023, son mandat a été prolongé, une circonstance qui s’est répétée un an plus tard. Aoun dirigeait l’armée lors de la dernière invasion israélienne.
Un choix complexe
Le soutien reçu n’a cependant pas débouché sur une simple élection. Certains secteurs se sont opposés à la nomination d’un officier de l’armée à la présidence, mais, en fin de compte, le vote majoritaire a été obtenu, peut-être influencé par la pression de l’Arabie Saoudite et des États-Unis, ses plus grands partisans. La position du chef de l’État n’est pas simplement protocolaire. Sa capacité à choisir l’orientation de l’exécutif lui confère un grand pouvoir pour déterminer l’orientation politique. Après l’acceptation, la nomination du Premier ministre était sa première décision pertinente. L’élu est Nawaf Salam, président de la Cour internationale de Justice et personnage apparemment indifférent aux conditions internes, qui a déjà exigé un programme de reconstruction des zones touchées par les bombardements israéliens.
Son élection intervient après deux ans de vide au sein de l’Exécutif et une douzaine de tentatives infructueuses.
L’avenir du nouvel exécutif dépend de sa capacité à respecter les accords avec le gouvernement juif, à parvenir au retrait du sud et aux investissements étrangers pour stimuler la croissance. A son actif, la faiblesse du Hezbollah, qui conditionnait jusqu’ici le cours du pays, et les changements produits en Syrie, qui n’est plus l’allié fidèle des milices chiites.
Le nouveau président partage un nom de famille avec son prédécesseur, Michel Aoun, avec lequel il n’a aucun lien de parenté. Peut-être que son succès résidera dans sa capacité à garder ses distances avec ce vieil homme d’État, le prototype du politicien caméléon, habile à utiliser la paix et la guerre en fonction de ses propres intérêts, qui caractérise la scène locale. Aujourd’hui, le Liban exige du changement, de la modernisation, de la sécularisation et de la liberté. C’est au tour de nouveaux dirigeants aux enjeux importants.
#Joseph #Aoun #nouvel #espoir #libanais
1737226230