Julien Lacroix a parcouru un long chemin. Il y a quatre ans, il est devenu un paria après avoir été au centre d’allégations d’inconduites sexuelles dénoncées par plusieurs femmes. Puis, l’humoriste a donné Le temps au temps comme l’indique le titre de son deuxième One man show. S’il rappelle souvent avoir travaillé sur lui-même, il ne manque pas non plus de se poser en victime de la “cancel culture”. Une prémisse qui n’est pas très rigolote, mais Julien Lacroix réussit malgré tout à faire rire.
“Cancelled”, Julien Lacroix l’est toujours. Pas comme il y a quatre ans, lorsqu’il n’osait même plus sortir pour faire ses courses. Mais il l’est encore suffisamment pour ne pas être “invité à jouer au Tricheur avec Guy Jodoin”, lance-t-il en plaisantant au début du spectacle.
Le ton est donné. Julien Lacroix n’évite pas le sujet tabou. Bien au contraire, sa “cancellation” est le fil conducteur de ce nouveau spectacle, dont la première médiatique a eu lieu jeudi soir à l’Espace Saint-Denis.
Le public, son public du moins, était présent. Chaque fois qu’il lançait une pique aux médias, regrettait que l’on puisse juger un homme sans procès, se désolait de l’analyse de comportements d’une autre époque avec notre regard actuel, Julien Lacroix était chaudement applaudi.
Dans l’assistance, composée autant d’hommes que de femmes, on pouvait sentir une certaine révolte envers le mouvement #MeToo. Une chose est sûre, tous ceux qui sont venus l’encourager, dont plusieurs étaient émus aux larmes à la fin du spectacle, pensent que l’humoriste ne méritait pas une telle descente aux enfers.
Il y a quatre ans, à la même période, Julien Lacroix, 27 ans, était une véritable étoile montante dans le monde de l’humour. Puis, tout s’est effondré en juillet 2020 lorsque neuf femmes l’ont accusé d’inconduites sexuelles dans un article publié dans Le Devoir, “un journal étudiant qui va bientôt faire faillite”, selon Julien Lacroix visiblement amer.
Après la controverse, Julien Lacroix a été abandonné par presque tout le milieu du show-business officiellement du moins. Il est resté très discret, reprenant il y a environ un an la scène dans de petites salles, principalement en région.
En dehors des projecteurs, il raconte s’être reconstruit. Il a suivi une thérapie à la Maison Jean-Lapointe. Aujourd’hui sobre, le trentenaire est maintenant père de deux jeunes enfants et dit être pleinement heureux avec sa compagne, à qui il rend un hommage chaleureux. Il a tenté de travailler sur lui-même, mais un retour sur scène était “une question de survie”, confie-t-il dans un des moments émouvants qui ponctuent ce spectacle.
Pour autant, ne croyez pas que Le temps au temps se limite à un “ted talk” larmoyant sur les mérites de l’abstinence. Il s’agit bel et bien d’un One man show très bien orchestré dont il est question ici. Un tour de force, car Julien Lacroix n’a pas eu la chance de roder son nouveau spectacle comme d’autres humoristes, de nombreuses salles à travers le Québec refusant encore de le programmer. “Ce n’est pas toutes les salles qui veulent de moi. Quand je veux voir où je peux jouer, je regarde où Éric Lapointe est allé”, plaisante-t-il.
L’humour de Julien Lacroix est cinglant, parfois carrément salace. Il jure beaucoup. Ses blagues tournent souvent autour de la sexualité. Comme dans son premier spectacle au titre prophétique, Jusqu’ici tout va bien, Julien Lacroix incarne sur scène un personnage d’adolescent insolent et attardé, qui semble avoir été influencé par la pornographie et American Pie. Selon certains articles, il ne serait pas si éloigné de son alter ego scénique, mais l’intéressé se défend d’être un “pervers narcissique”. “Un gars devient un ‘pervers narcissique’ dès qu’une fille se fait larguer”, se moque-t-il avec un sarcasme bien présent.
Ses détracteurs lui reprocheront une certaine facilité. Peut-être. Mais en l’espèce, cela s’avère efficace. Il faut dire que l’humoriste possède un talent inné pour la scène. En témoignent les nombreux moments d’improvisation, où il interagit avec le public. Dommage que l’on n’ait pas pu saisir toutes les blagues. Nerveux, Julien Lacroix tenait mal son micro et bougeait parfois dans tous les sens.
Pendant les remerciements, il a craqué, admettant avoir été submergé par le stress avant cette première médiatique. En larmes, il a remercié ses proches et le public de l’avoir soutenu. Le spectacle doit continuer de Queen a clôturé le spectacle. On ne pouvait pas choisir une meilleure chanson dans ce contexte.
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