2024-07-03 14:55:44
Au sein de l’univers, le singularités de l’espace-temps apparaissent comme des anomalies cosmiques. Citons par exemple les trous noirs ou le Big Bang, points où les modèles physiques actuels s’effondrent et où la réalité devient un puzzle énigmatique. Son existence est attendue, selon les prédictions mathématiques des théorèmes énoncés par Roger Penrose dans les années 1960 et récompensés par le prix Nobel en 2020. Cependant, on sait peu de choses sur sa dynamique, c’est-à-dire sur la manière dont l’espace- le temps se comporte à proximité des singularités.
La cosmologie moderne considère qu’une bonne approximation de l’univers actuel, à grande échelle, est donnée par la solution trouvée par Alexander Friedmann en 1922 aux équations de la théorie de la relativité d’Albert Einstein. Selon la solution de Friedmann, l’espace n’est pas immobile, mais s’étend au fil du temps – ce qui a été confirmé expérimentalement par Edwin Hubble en 1929. De l’expansion de l’univers se déduit l’existence d’une singularité : si l’on remonte le temps et voyage dans le passé, l’espace se contractera jusqu’à un point (le Big Bang).
Dans sa résolution, Friedman suppose que l’espace est homogène – c’est-à-dire qu’il a le même comportement en tous points – et isotrope – c’est-à-dire qu’il a le même comportement dans toutes les directions. Cependant, lors du Big Bang, cela pourrait ne pas être vrai et, par conséquent, les solutions de Friedmann ne serviraient pas à expliquer ce qui se passe à proximité de cette singularité.
Les mesures du rayonnement de fond cosmique indiquent que peu de temps après le Big Bang, l’univers s’est étendu de manière presque égale dans toutes les directions spatiales. Mais une petite asymétrie en isotropie pourrait générer un comportement différent proche de la singularité de celle marquée par les solutions de Friedmann. Plus précisément, contrairement à ce qui se passe dans ces derniers, les dimensions spatiales pourraient avoir des rôles différenciés dans la configuration de notre destin.
Pour répondre à ces questions, dans les années 1970, Vladimir Belinski, Isaak Khalatnikov et Evgeny Lifshitz ont émis l’hypothèse que, peu après la naissance explosive de l’univers, celui-ci avait traversé une phase de développement chaotique. Le chaos, dans ce contexte cosmique, fait référence à une complexité fascinante plutôt qu’au désordre. Selon cette hypothèse – appelée BKL–, les fluctuations chaotiques offrent des modèles déroutants et des structures mathématiques complexes qui ont finalement façonné notre cosmos actuel. Plus de 50 ans plus tard, cette question mathématique est encore loin d’avoir trouvé une réponse.
La conjecture BKL suggère que, pour la plupart, les singularités ont trois caractéristiques. Tout d’abord, elles sont locales, c’est-à-dire que les particules sont découpler les uns des autres et chacun évolue indépendamment vers la singularité. Les équations d’Einstein deviennent donc équations différentielles ordinaires.
Deuxièmement, les singularités sont dominées par le vide, ce qui signifie que pour la plupart des types de matière, leur effet sur la dynamique de la géométrie espace-temps est négligeable à proximité de la singularité. Selon les mots de John Wheeler, « la matière n’a pas d’importance » à proximité d’une singularité.
Enfin, les singularités sont oscillatoires et chaotiques. Parallèlement, Charles Misner propose un modèle pour analyser ces oscillations chaotiques, baptisé le terme maître mixeur –en référence à un batteur électrique de cuisine pour faire de la pâte–. Ce modèle décrit un danse cosmologique, dans lequel chaque direction spatiale devient expansion et contraction, de la même manière que l’on fabrique la pâte à pizza : la pâte est pétrie, étirée et pliée de manière itérative, changeant un peu de direction à chaque fois que cette procédure est répétée. Tant en cosmologie que dans la fabrication de pizzas, une petite modification des conditions initiales peut conduire à des résultats très complexes et complexes.
Il y a encore beaucoup de questions sans réponse dans ce récit cosmique sur la naissance de l’univers. Il reste très difficile d’acquérir des données expérimentales et de valider les théories de la gravité, notamment dans le domaine des champs gravitationnels extrêmes. Ainsi, en l’absence d’observations directes, des cadres mathématiques solides deviennent des guides cruciaux vers des théories plausibles et significatives. Les théorèmes de singularité de Penrose et la conjecture de BKL révèlent un riche panorama de l’évolution cosmique qui continue de susciter l’étonnement et la curiosité scientifique, offrant une vision différente de la dynamique complexe du passé, du présent et du futur de l’univers.
Philippe Lappicy Il est chercheur Marie Curie Fellow (Una4Career) au Université Complutense de Madrid
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