La Papouasie-Nouvelle-Guinée, un paradis menacé

2024-08-28 11:15:01

C’est une terre particulièrement chère au PIME et dans le cœur du pape François, attendu en septembre à Port Moresby et à Vanimo. Mais quel pays l’attend ? La nature intacte et les peuples anciens sont aujourd’hui menacés par le changement climatique, l’exploitation et la corruption.

Le monde à ses origines. Une nature imposante et intacte, une extraordinaire variété de peuples et de cultures, plus de 800 langues parlées. La Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG), que le pape François visitera du 6 au 9 septembre – dans le cadre de son voyage apostolique qui le mènera également en Indonésie, au Timor oriental et à Singapour – est, à première vue, une terre d’une beauté primordiale : un paradis comme peint par les quelques affiches destinées aux très rares touristes. Et c’est effectivement le cas. Mais aussi superbe est sa beauté, aussi extrêmes sont ses abîmes. Le sentiment de désorientation est toujours présent.

Cette île de l’autre côté de la planète – ou plutôt cet ensemble d’environ 600 îles disséminées dans le Pacifique à proximité de l’Indonésie et d’un bras de mer de l’Australie, dont elle s’est indépendante en 1975 – est véritablement un autre monde. Un monde dans lequel les dimensions spatio-temporelles bouleversent les catégories de pensée occidentales confortables. Ce trésor d’une biodiversité extraordinaire – c’est la troisième plus grande forêt tropicale du monde – abrite également une étonnante diversité humaine, avec une variété de populations anciennes qui ont conservé, dans l’isolement des îles ou des montagnes, des caractéristiques particulières et uniques, non seulement linguistique. Des contextes très lointains et pourtant si proches d’autres réalités, comme ceux des villes du littoral et notamment de la capitale Port Moresby qui est à toutes fins pratiques une ville moderne, connectée, ouverte sur le reste du monde. monde. Contrastes et contradictions s’imposent comme une évidence.

« Racontez-nous de belles choses sur la Papouasie-Nouvelle-Guinée ! », nous invitent d’un bout à l’autre du pays à le faire, en réservant à l’invité un accueil extraordinaire, souvent avec des vêtements traditionnels, des chants et des danses, des visages peints et des lances déployées pour symboliser. la tradition guerrière. Après tout, l’invité est sacré, même quand on n’a rien. Et beaucoup n’ont vraiment rien. Plus de 80 % de la population vit dans des zones rurales reculées et s’appuie sur une économie de subsistance pour survivre en symbiose avec la nature, qui est mère mais aussi belle-mère. Le manque de routes et de moyens de communication rend tout commerce impossible ou extrêmement difficile. Nous vivons au jour le jour, souvent instantanément : rythmes ancestraux, troc, sorcellerie, sentiment d’appartenance au clan, au chef, à la terre. Ce qui est souvent aussi source de conflits.

La Papouasie-Nouvelle-Guinée est un pays à la fois très riche et très pauvre. Extrêmement riche en matières premières – bois, or, argent, cuivre, gaz, minéraux précieux… –, mais aussi la plus pauvre d’Océanie. “Les entreprises étrangères font ce qu’elles veulent”, dénonce Mavis Tito, directeur de la Caritas nationale, observatoire privilégié sur de nombreuses situations difficiles du pays, mais aussi acteur important de l’aide aux urgences et au développement. Exploitation, déforestation, pollution des terres et des rivières, accaparement des terresplantations interminables et intensives de palmiers à huile : les entreprises étrangères nombreuses et très puissantes opèrent en PNG, notamment malaisiennes, canadiennes, australiennes, chinoises… « Elles sont insouciantes de l’environnement et des populations qui y vivent et qui sont souvent non pas qu’ils n’en tirent aucun avantage, mais qu’ils se retrouvent plutôt avec leur territoire dégradé – confirme le cardinal John Ribat, archevêque de Port Moresby, très sensible aux questions de Loué oui -. Il y a quelques années, la tentative d’une entreprise canadienne de démarrer un projet a été contrecarrée exploitation minière des fonds marinsune mine située à 1 600 mètres de profondeur dans les fonds marins, mais il semble que d’autres négociations soient en cours pour mettre en œuvre un projet pilote dont personne n’est en mesure d’évaluer avec certitude les conséquences.”

Après tout, la Papouasie-Nouvelle-Guinée est un pays très fragile : « Le changement climatique a un impact dévastateur, aggravé par une exploitation aveugle – continue le directeur de Caritas -. De nombreuses îles coralliennes risquent de disparaître. Certaines populations ont déjà été contraintes de quitter leurs villages, mais il n’est pas facile de les relocaliser ailleurs en raison de la gestion traditionnelle des terres, qui appartiennent habituellement à une famille ou à un clan. Le long des côtes, il n’est pas rare de constater l’effet de l’érosion provoquée par la mer, et dans tout le pays, des phénomènes climatiques extrêmes se produisent de plus en plus fréquemment, comme des typhons, des inondations, des sécheresses ou encore des gelées sur les montagnes, qui quelques mois il y a quelques mois, les quelques récoltes ont été détruites. Même plusieurs missions surplombant l’océan, dans des endroits apparemment paradisiaques, tentent de se mettre à l’abri en construisant des barrières qui semblent inexorablement temporaires.

Mais les mesures prises par le gouvernement pour faire face aux nombreux défis historiques auxquels le pays est confronté semblent tout aussi inefficaces. «Il y a trop de corruption – les évêques du pays l’ont stigmatisé à plusieurs reprises – : une corruption systématique et systémique». Sans parler des fonds qui sont alloués dans le budget de l’État, mais qui n’arrivent jamais à destination. L’Église catholique, qui représente environ 26 % de la population, sait bien de quoi il s’agit : des fonds d’éducation et de santé qui n’existent que sur papier, des médicaments qui ne sont pas livrés depuis des mois, des salaires non payés régulièrement, des structures non entretenues. Aujourd’hui encore, environ 25 % des écoles et centres de santé, surtout dans les zones les plus reculées, sont gérés par l’Église, avec de grandes difficultés, peu d’enseignants, des infirmières courageuses et aucun médecin. «Il faut davantage de formation à tous les niveaux – souligne le cardinal Ribat – en particulier pour les jeunes, pour leur garantir un avenir. Et pour le garantir à notre pays.”

La Papouasie-Nouvelle-Guinée est en effet un pays extrêmement jeune : 40 % de la population a moins de 15 ans. Mais cela aussi est une richesse trahie. Le taux de chômage est très élevé. Même ceux qui parviennent à atteindre un bon niveau d’éducation – une très petite minorité en raison d’un système scolaire très sélectif – ne peuvent pas facilement trouver du travail sauf dans le secteur informel. Beaucoup affluent vers les villes, et en particulier vers la capitale, à la recherche d’opportunités qu’ils ne trouvent pas. Ils vivent souvent de manière totalement précaire dans ce qu’on appelle règlementdes colonies illégales, toujours menacées d’expulsion. Ces dernières années, les tensions sociales et la criminalité se sont également accrues, entraînant le 10 janvier dernier des manifestations violentes, des pillages et des destructions jamais vues auparavant à Port Moresby, actuellement considérée comme l’une des villes les plus dangereuses au monde.

Même dans la paroisse PIME du district de Tokarara, les traces des coups de hache portés à côté de la porte par les criminels qui sont entrés par effraction et ont dévalisé la maison du curé sont encore bien visibles. Le phénomène de enfants des rues – les enfants et les jeunes des rues – les enfants de familles brisées ou en difficulté, qui souvent ne vont pas à l’école et errent dans les rues. Le Pape rencontrera un groupe d’entre eux qui sont suivis dans deux centres d’accueil de l’archidiocèse de Port Moresby.

Nous sommes un pays jeune et une Église jeune, même dans sa fondation – souligne l’archevêque de Rabaul, Rocus Tatamai – : une Église vivante qui s’appuie fortement sur les laïcs et qui développe des vocations locales. Mais elle a encore un grand besoin de formation, à tous les niveaux, même dans la foi, pour l’approfondir. Nous sommes l’une des dernières frontières, mais nous faisons aussi partie de l’Église universelle, et la visite du pape François nous le confirme. Nous nous efforçons de mettre la miséricorde et le souci de la dignité humaine au centre de notre vie de foi. Avec un fort sentiment de communauté. »

LE VOYAGE DU PAPE

«Il y a une grande attente, mais aussi beaucoup de travail de préparation, avant tout dans la prière, pour la visite du Pape, qui montre une fois de plus l’attention et le souci de notre pays», déclare Mgr Rozario Menezes, évêque de Lae et coordonnateur de la comité organisateur du voyage en PNG du 6 au 9 septembre. Les jours précédents, du 3 au 6, le Pontife fera escale à Jakarta en Indonésie. Le voyage se poursuivra à Dili (Timor oriental) du 9 au 11, et à Singapour du 11 au 13.



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