Krishs Kairis : Merci d’avoir trouvé du temps pour l’interview. Quelle est l’opinion générale du public finlandais sur la sécurité en ce moment ? Comment cela a-t-il changé au cours de l’année écoulée et avec les efforts de la Finlande pour rejoindre l’OTAN ?
Mikaël Vigel : Il y a un an, cela a changé radicalement, complètement, presque du jour au lendemain. Je pense que la société finlandaise a changé d’avis sur l’adhésion à l’OTAN. La Finlande a été militairement neutre, mais cela a beaucoup changé lorsque la Russie a commencé son agression en Ukraine. La majorité de la société très vite – encore plus vite que les dirigeants politiques finlandais – est venue à l’opinion que la Finlande devrait rejoindre l’OTAN.
Le soutien pour cela est extrêmement élevé – environ 75 à 80 %. Il existe un très large consensus sur la politique de sécurité en Finlande. S’il y a un an, il y avait de grandes inquiétudes concernant la situation générale en matière de sécurité, y compris à propos de la Finlande elle-même, alors elles ne sont plus si grandes. Nous constatons que la Russie est fortement impliquée dans la guerre en Ukraine et qu’il ne reste plus beaucoup de forces russes derrière nos frontières dans le nord. Nous ne sommes donc pas actuellement préoccupés par une menace militaire contre la Finlande.
Conscients de cela, nous nous inquiétons naturellement davantage des menaces hybrides – cyberattaques, opérations de désinformation, sabotage, etc. Mais je pense que la Finlande est très bien préparée à ce genre de menace. Nous avons maintenu un très haut niveau de préparation ici pendant des années, depuis la guerre froide.
La Finlande a toujours maintenu un très haut niveau de préparation militaire et civile.
La Finlande pourrait-elle rejoindre l’OTAN dès cet été lors du sommet de l’OTAN à Vilnius et le faire sans son partenaire suédois ?
Je pense que la première option absolue est que la Finlande et la Suède fassent front commun. Et je pense que nos dirigeants politiques en Finlande ont été catégoriques sur le fait qu’ils veulent adhérer en même temps que la Suède.
Il est stratégiquement logique pour la Finlande et la Suède de s’unir. Je pense que c’est aussi l’espoir de l’organisation de l’OTAN que la Finlande et la Suède se rejoignent. Cela aiderait dans la planification militaire, de défense et autres.
Mais bien sûr, si la Turquie bloque complètement l’adhésion de la Suède, la Finlande devra peut-être repenser la situation. Pensez au moins combien de temps la Finlande attendra la Suède.
Mais ce n’est pas une option qui est sérieusement envisagée en ce moment. L’idée est maintenant que la Finlande et la Suède doivent aller de l’avant, et peut-être qu’après les élections en Turquie, il deviendra un peu plus facile d’avancer.
L’opinion changeante de la Turquie – peut-être laisser la Finlande rejoindre l’OTAN maintenant, mais pas la Suède, – c’est comme un jeu ?
Il me semble qu’il est possible que la Turquie veuille “enfoncer un coin” entre la Finlande et la Suède. Certaines réclamations y ressemblent. Mais nous ne savons pas tout à fait s’il s’agit d’une tactique turque ou non. Dur à dire. Quoi qu’il en soit, d’un point de vue suédois et finlandais, je pense qu’il est important de se serrer les coudes. Et s’il y a de telles intentions de creuser un fossé entre nous, nous ne devrions pas laisser cela se produire.
En tant qu’analyste, vous pouvez peut-être commenter – comment la Russie considère-t-elle ce processus ?
Du point de vue de la Russie, l’écart entre la Finlande et la Suède est bien sûr une sorte de cadeau d’anniversaire ou quelque chose du genre. La Russie aimerait qu’un tel “coin stratégique soit enfoncé en Europe et dans le Nord”.
Bien sûr, du point de vue de l’armée russe, il ne serait pas bon que la Finlande et la Suède rejoignent l’OTAN. De leur point de vue, ce serait beaucoup plus agréable si l’un des pays ne pouvait pas adhérer, et cela encouragerait probablement beaucoup plus de pression.
Si la Suède n’adhérait pas, cela mettrait probablement plus de pression sur la Suède et compliquerait la planification de l’OTAN dans la région.
L’adhésion de la Suède et de la Finlande contribue à une grande partie de la planification de la défense et des exercices de défense ainsi qu’au partage d’informations dans l’espace nordique. Et cela, bien sûr, est quelque chose que la Russie aimerait éviter.
Donc, dans ce sens, la Turquie joue beaucoup dessus, ou peut-être joue-t-elle dans les intérêts de la Russie, que ce soit consciemment ou inconsciemment. C’est difficile à dire.
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