La santé sexuelle : des tabous à briser

« Tout ce qui concerne la santé sexuelle est encore parsemé de tabous et de non-dits », lance Raphaëlle Dubois responsable du pôle prévention de l’ONM, l’Œuvre normande des mères, qui gère notamment l’antenne rouennaise du Cegid, le centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic basé au quartier du Pollet, à Dieppe (Seine-Maritime). « On sait que les MST, les maladies sexuellement transmissibles sont encore considérées comme honteuses », complète Jean-Marc Kerleau médecin au Cegid.

« Le risque zéro n’existe pas »

Mardi 12 décembre, Santé publique France indiquait dans un rapport que plusieurs maladies sexuellement transmissibles – les chlamydioses, les gonococcies et la syphilis – ont connu une hausse entre 2020 et 2022. Une hausse qui peut s’expliquer par une prise de conscience de la population de venir consulter dès lors qu’un risque a été pris lors d’un rapport sexuel.

Au 10, avenue du Général-Leclerc à Dieppe, voilà bientôt quatre ans que le Cegid, composé d’une équipe de cinq professionnels, vous accompagne autour des maladies sexuelles.

La structure est ouverte chaque jeudi, de 9 h 30 à 12 h 30. Et généralement, toutes les plages horaires sont pleines. Toute personne peut venir gratuitement « s’informer, être conseillée ou obtenir un traitement », poursuit la responsable. Quand on entend dépistage, cela comprend « toutes les MST, par voie sanguine ou prélèvements locaux », précise Jean-Marc Kerleau.

Le professionnel estime que cette hausse des MST peut s’expliquer par « le comportement sexuel des adultes, ce qui fait que les maladies augmentent. On voit la banalisation du risque VIH. » Certaines d’entre elles sont d’ailleurs plus présentes que d’autres sur le territoire dieppois.

Les professionnels de l’équipe ont tenu à rappeler que « le risque zéro n’existe pas », et que généralement, « lorsque l’on prend rendez-vous, c’est qu’il y a une raison ». Et en cas de problème, « on a l’expertise du CHU de Rouen. Au vu de notre disponibilité limitée, on ne souhaite pas suivre les gens, mais on peut les orienter vers un infectiologue par exemple », poursuit le médecin.

Les professionnels espèrent néanmoins gagner en visibilité et promouvoir le dépistage car de nombreuses annulations de rendez-vous sont observées. Pourtant, « le dépistage doit être quelque chose de récurrent », stipule Jean-Marc Kerleau. Dès lors qu’il n’y a pas de préservatif, il faut faire attention, sachant « qu’environ 95 % des MST sont asymptomatiques », relève le médecin.

S’ouvrir à la population

Il a rappelé qu’un dépistage est conseillé six semaines après un risque et non pas le lendemain du risque, s’il n’y a pas de symptômes. « La seule exception est le VIH où là, on oriente la personne vers les urgences, complète le médecin. Et s’il y a un symptôme, il faut nous appeler. »

Toujours dans le but d’apporter son expertise, Didier Bimont directeur du territoire de l’ONM, aimerait que le Cegid soit ouvert plus longtemps face à une demande croissante. « Nous voulons également développer hors les murs », confie-t-il.

Pour ce faire, l’Agence régionale de santé a financé l’achat d’un camion qui va permettre de réaliser des entretiens sociaux et médicaux dès 2024. « Un outil pour aller au plus près de la population, ce qui est bien pour notre territoire de démocratie sanitaire, qui va de la région dieppoise à Tôtes, Blangy-sur-Bresle et aux portes de la Somme », poursuit-il. Cela va dans la volonté de dédramatiser autour des MST qui, comme le conclut Raphaëlle Dubois, « peuvent être soignées facilement. Ce n’est pas compliqué, pas cher, il suffit de venir ».

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