La situation humanitaire critique au Soudan: combats, déplacés et besoins humanitaires

Les affrontements ont pris de l’ampleur vendredi au Soudan, où les humanitaires exhortent les parties belligérantes à laisser passer les convois humanitaires afin d’aider les millions de civils pris pour cible.

Après dix semaines de guerre entre l’armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdand Daglo, le bilan s’élève déjà à plus de 2 000 morts et plus de 2,5 millions de déplacés et de réfugiés.

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Vendredi, des habitants de Khartoum ont signalé de nouveaux “bombardements de l’artillerie” dans différents quartiers de la capitale, où des millions de civils survivent à la chaleur écrasante sans électricité et souvent sans eau. Depuis mercredi, des affrontements armés ont également lieu entre militaires et paramilitaires dans la région du Kordofan, à la frontière du Darfour, selon des témoins.

Officiellement, une énième trêve a pris fin mercredi matin. Bien que les combats aient diminué pendant trois jours, les habitants ont signalé des mouvements de troupes laissant présager une escalade. Face à cette situation, les médiateurs américains et saoudiens ont abandonné les négociations.

“Paperasserie bureaucratique”

Molly Phee, secrétaire d’État adjointe aux affaires africaines, a expliqué : “Nous avons suspendu les négociations mercredi car elles ne progressent pas comme nous le souhaitons. (…) Bien que ces cessez-le-feu aient permis le transfert d’une aide humanitaire vitale, ils n’ont pas été suffisamment respectés.” Elle s’est exprimée devant des parlementaires.

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Cependant, les ONG attendent toujours de pouvoir entreprendre leurs actions humanitaires. “Des millions de personnes ne peuvent pas être aidées en raison de restrictions flagrantes à l’entrée des humanitaires et de l’aide”, dénonce William Carter du Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) au Soudan, dénonçant une “paperasserie bureaucratique”.

Médecins sans frontières (MSF) déplore que les demandes adressées aux autorités soient “retardées, refusées, annulées ou non respectées”. L’ONG ajoute que des humanitaires ont été victimes de violences et de menaces, tandis que des cargaisons ont été saisies.

Lors d’une conférence à Genève lundi, la communauté internationale a promis 1,5 milliard de dollars d’aide au Soudan, soit moins de la moitié des besoins estimés. Dans l’un des pays les plus pauvres du monde, 25 millions de personnes ont besoin de cette aide pour survivre. Deux tiers des hôpitaux ne sont plus opérationnels et les autres sont sur le point de fermer faute de réserves.

Femmes violées, maisons volées

Les habitants dénoncent régulièrement l’installation des paramilitaires dans des maisons. Vendredi, des dizaines de manifestants se sont rassemblés à Khartoum et à Kosti, dans le sud du pays, avec pour slogan “un peuple, une armée”.

Le service gouvernemental de lutte contre les violences faites aux femmes a signalé au moins 36 agressions sexuelles dans la capitale, les victimes accusant majoritairement les FSR. Il précise toutefois que les chiffres enregistrés ne représentent pas plus de 2% du total réel. Au Darfour, la situation empire chaque jour, mais aucun chiffre n’est disponible en raison de l’absence de communication avec le reste du pays.

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Rien que dans la ville d’El-Geneina, capitale du Darfour-Ouest, l’ONU a enregistré la mort de 1 100 personnes. Des maisons ont été incendiées et des cadavres jonchent les rues bordées de magasins aux rideaux déchirés par les pillards. Plus de 170 000 personnes ont fui vers le Tchad et la Centrafrique.

Le chercheur Alex de Waal affirme que “le Soudan est en train de mourir”. Selon lui, tant que les médiateurs n’auront pas de stratégie claire, les sanctions américaines visant les entreprises de l’armée et des FSR seront inefficaces. Il compare Jeddah, ville d’Arabie saoudite où se tiennent les négociations sous l’égide des États-Unis et de l’Arabie saoudite, à une salle d’examen avant une opération chirurgicale, affirmant que les médecins ne peuvent pas poser de diagnostic sans avoir une stratégie claire.

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