La situation sécuritaire critique en Haïti ne doit pas éclipser les besoins humanitaires de la population

2023-08-22 16:30:00

Cet article a été initialement publié sur le Héraut de Miami.

Juillet marque le deuxième anniversaire de l’assassinat à son domicile du président haïtien de l’époque, Jovenel Moïse. Le pays étant embourbé dans la crise, il est pratiquement impossible d’obtenir régulièrement de l’eau ou du carburant, ou d’accéder aux services de santé en raison de la violence.

L’équipe du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) travaillant à Port-au-Prince a constaté une augmentation substantielle de la présence et de la portée des groupes armés en Haïti : il existe déjà jusqu’à 300 gangs dans et autour de la capitale survivante, en grande partie sous votre contrôle. Il n’est donc pas surprenant que le discours dominant sur la situation dans le pays se concentre sur la sécurité et sur l’opportunité et la manière de répondre aux demandes de déploiement de forces internationales pour intervenir et rétablir l’ordre.

Mais en se concentrant autant sur la sécurité, on a laissé de côté un débat tout aussi important : comment réaliser des progrès tangibles dans la réponse aux besoins fondamentaux de la population, qui subit les effets de la recrudescence de la violence. Plusieurs organisations haïtiennes et internationales travaillent dur pour alléger ces souffrances, mais elles ont besoin de davantage de financement et de ressources.

En tant que directeur régional du CICR pour les Amériques, je crains que parler uniquement de sécurité lorsqu’il s’agit d’Haïti détourne le soutien et l’attention de l’aide humanitaire vitale et, à terme, réduise notre capacité et celle des autres acteurs à continuer de fournir de l’aide. Nous avons besoin d’une approche combinée qui tienne compte de la population et inclut l’action humanitaire essentielle parallèlement à la sécurité, notamment pour renforcer la confiance politique tant au niveau national qu’à l’étranger.

La moitié des Haïtiens souffrent de la faim et rares sont ceux qui ont accès à l’eau potable. Les écoles et les établissements médicaux sont fermés. Et ce ne sont là que les conséquences visibles ; les invisibles ne sont pas moins sérieux. De nombreuses personnes sont touchées au quotidien par la peur d’être kidnappées ou de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.

Les besoins humanitaires de la population sont profonds et alarmants, et sont de la même ampleur que ceux que mon organisation rencontre dans des contextes de conflits armés dans toutes les régions du monde et qui sont constamment rapportés par les médias. Cependant, en dehors d’Haïti, le discours circule selon lequel la gravité de la situation est telle qu’il est impossible d’obtenir des résultats, ce qui engendre désespoir et fatigue.

Il y a quelques mois, j’ai visité le pays pour observer nos activités opérationnelles par lesquelles, souvent en collaboration avec la Croix-Rouge haïtienne, nous fournissons des ressources médicales d’urgence aux cliniques et hôpitaux locaux qui soignent les personnes touchées par des niveaux élevés de violence. Le CICR préserve leur accès grâce à son attitude neutre, au dialogue qu’il entretient avec les communautés sur leurs besoins urgents et à ses initiatives visant à renforcer la capacité des villageois à apporter la première réponse.

Voilà donc le message : il n’est pas impossible de progresser. Même si de nombreuses communautés de Port-au-Prince sont extrêmement difficiles d’accès en raison de l’insécurité généralisée, l’accès humanitaire est toujours possible, et nous devons tous faire davantage pour répondre aux besoins d’urgence actuels et de développement à long terme. Nous pouvons sauver des vies si nous nous concentrons sur les problèmes de communauté et d’accès, et si la population d’Haïti est au centre de la conversation.

C’est pourquoi, en tant que communauté internationale, nous ne devons pas abandonner le pays, mais le soutenir dans la recherche d’une solution politique viable et redoubler les efforts des acteurs humanitaires et de développement, tant nationaux qu’internationaux, qui tentent aujourd’hui de répondre à cette situation. aux besoins des plus vulnérables.

Nous devons également entamer une nouvelle conversation qui va au-delà du discours sur la sécurité avec une approche compatissante, inclusive et tournée vers l’avenir d’Haïti. Les appels au soutien et à la solidarité doivent être accompagnés d’actions tant qu’il existe une marge d’action.

* Sophie Orr est directrice régionale du Comité international de la Croix-Rouge pour les Amériques



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