L’actualité de Verdi selon Chailly

L’actualité de Verdi selon Chailly

2023-09-14 16:34:33

Dernière étape de la longue tournée européenne de La Scala, à Paris, accompagnée de la présentation, à l’ambassade, de la nouvelle saison au public français. Puis le soir, sur les Champs-Elysées, voici Riccardo Chailly, Chœur et Orchestre dans un tout-Verdi, symphonies, chœurs et chants dansants, avec tous les tubes pop nationaux les plus attendus, de « Va’ pensiero » à l’ouverture des Innominables, et même quelques chansons plus insolites, du moins en concert. A première vue, on aurait dit qu’il s’agissait d’un programme “phare” inspiré de l’actuel mouvement national-souverain italien, comme si le général Vannacci l’avait choisi : la véritable italianité, le patriotisme, la rhétorique de notre père Verdi qui pleurait et aimait pour tout le monde. Et au contraire, la façon dont il a été conçu et exécuté révèle exactement le contraire : Verdi, bien sûr, est l’Italien par excellence, mais parfaitement inséré dans l’Europe de son temps, et avec son regard toujours tourné vers l’avenir, jamais vers le passé. Cet homme était tout le contraire du conservateur borné ; l’artiste, encore plus.

Bien sûr, il faut les faire ainsi, ces pages usées par les usages et abus de publicité ou encore d’identité. Et ils ont immédiatement l’air neufs. À commencer par des effets surprenants : le diminuendo sur « An serment ! qui introduit « Si Riseste il Leon di Castiglia », le chœur des Troubadours qui s’efface lentement comme s’il se dissolvait dans l’air, l’attaque de « Jérusalem ! par les Lombardi, un piano si doux qu’au début j’ai cru qu’une partie du chœur chantait hors scène, l’élégance un peu frivole et très française des chants de danse de “Don Carlos” (et quel cliché de violons hypnotisés). Et surtout, l’idée de Chailly selon laquelle « le mot scénique », comme l’appelait Verdi, s’applique aussi au chœur : et ici « Patria oppressa » est paradigmatique, pour moi le plus beau chœur de Verdi, où le peuple devient véritablement un personnage. Orchestre en pleine forme, le Chœur d’Alberto Malazzi tout simplement paradigmatique, d’une homogénéité, d’une puissance et d’une dynamique fabuleuses.

Il y aurait ici la question de l’authenticité, difficile à expliquer bien que très facile à comprendre. La raison pour laquelle les « bonnes » formulations et couleurs pour Verdi sont telles reste un mystère : mais elles le sont sans aucun doute. A la fin du Triomphe d’Aida, un autre s’est déchaîné dans la salle, avec des ovations debout, des applaudissements rythmés, voire quelques “Viva Verdi!”. Encore avec la chorale acclamant Simone dès son élection doge : comme pour rappeler que Verdi aimait passionnément l’Italie, mais qu’il ne respectait pas trop les Italiens. À part Vannacci.



#Lactualité #Verdi #selon #Chailly
1694714784

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.