L’affaire Khelif, quotidien Junge Welt, 7 août 2024

2024-08-07 01:00:00

Mark Edward Harris/ZUMA Press Wire/imago

Imane Khelif (à g.) en quarts de finale de la compétition féminine poids welters au tournoi olympique de boxe

Le combat entre Raphael Walton et Aurèle Couture à Lewiston en 1946 est considéré comme le match de boxe le plus court au monde. À la fin, il restait 10,5 secondes au compteur et sur la page de notation. boxrec.com enregistre également des combats plus courts – mais ces 10,5 secondes incluent déjà le temps dont l’arbitre avait besoin pour décompter. Walton est tombé après seulement 1,5 seconde.

Mike Tyson a une fois envoyé son adversaire Lou Savarese sur la bande après 38 secondes, Vitali Klitschko a mis Mike Acklie par KO après 32 secondes. Les seuls qui ont été gênés par les combats courts étaient les spectateurs pour qui la soirée s’est terminée plus vite que prévu.

Comme on le sait, la situation fait suite à la victoire de l’Algérienne Imane Khelif face à l’Italienne Angela Carini en huitièmes de finale du tournoi olympique de boxe. Carini, vaincue, s’était à peine plainte de la force du coup qui lui avait été porté que l’on a affirmé que Khelif était une femme trans ou un homme cis. Cela a été soutenu par leur exclusion de la Coupe du monde 2023 en Inde, annoncée par l’Association internationale de boxe (IBA).

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Deux choses posent problème à ce sujet : l’IBA a été suspendue par le Comité international olympique (CIO) en 2019, entre autres en raison de soupçons de décisions arbitrales manipulées et de flux de trésorerie flous ainsi que de sa dépendance financière à l’égard du groupe russe Gazprom. Le Tribunal Arbitral du Sport de Lausanne a confirmé l’exclusion en 2023. En outre, les déclarations de l’IBA sur les raisons pour lesquelles Khelif a été exclu sont contradictoires.

D’une part, on dit que Khelif et l’olympien Lin Yu Ting (Taiwan), également suspendu par l’association mondiale, n’ont pas réussi le test de genre et qu’ils possédaient à la fois un chromosome X et un chromosome Y. Là encore, on parle d’une augmentation des niveaux de testostérone. L’IBA ne peut pas révéler exactement quels tests ont été effectués. Rien de tout cela ne semble donner l’impression que l’intention est de fournir les faits qui rendraient possible un débat de fond.

Le CIO a cependant souligné une nouvelle fois vendredi par l’intermédiaire de son porte-parole qu’il s’agissait simplement d’une fausse affirmation selon laquelle Khelif était trans. L’athlète elle-même est devenue publique pour la première fois et a accordé une interview télévisée à la chaîne. SNTV a demandé de mettre fin à la chasse. Ses parents l’avaient déjà publiquement soutenue.

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Il est peu probable que cela calme le débat houleux. Mais il est déjà clair que ce serait une grave erreur de réduire le débat au fait que traiter avec Khelif n’est problématique que parce qu’elle n’est pas trans. Rien ne justifie la campagne de ces derniers jours et la manière dont le boxeur est attaqué n’a rien à voir avec l’équité ou l’esprit olympique, même si la foule (numérique) en colère aime à l’invoquer.

C’est une théorie bien connue selon laquelle la binaire des genres est une construction sociale, mais surtout dans le sport, de nombreuses personnes ont du mal à rompre avec ce qu’elles connaissent. Il n’est même pas nécessaire de se demander si d’autres catégories seraient mieux adaptées aux compétitions sportives que le sexe. L’irritation provoquée par une personne dont l’apparence brise les stéréotypes de genre suffit.

La haine qui en résulte est toujours essentiellement transphobe, que la personne concernée soit ou non réellement trans. Les raisons du mépris et de la malveillance ainsi que du rabaissement des personnes concernées résident dans cette rupture avec les attentes. Parce que cela n’est pas particulièrement accordé aux femmes, la haine est non seulement transphobe, mais aussi misogyne. La dévaluation ainsi que la suspicion sous-jacente touchent également beaucoup plus souvent les non-blancs que les blancs, et ont donc aussi des connotations racistes.

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Le cas Khelif ne concerne donc avant tout que la boxeuse et son sexe. Au contraire, dans ce conflit, qui s’intéresse peu aux faits et au contexte, on discute de choses qui vont bien au-delà du sport.

En fin de compte, il s’agit toujours de préserver le patriarcat. C’est particulièrement ridicule lorsque l’on parle de « sauver le sport féminin ». Car que se cache-t-il derrière l’attaque contre les femmes, à qui le regard patriarcal et brisé attribue des attributs non féminins ? C’est justement que celles qui sont particulièrement fortes, grandes ou rapides se voient sommairement refuser le droit d’être des femmes par la société. Être une femme est défini et limité de l’extérieur. Un événement extrêmement violent, mais pas nouveau.



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