NANCY, 22 février 2024 (APMnews) – Le dispositif d’accompagnement pour les utilisateurs multiples des urgences (Daum), lancé en novembre 2022, a permis d’identifier plus de 500 usagers trop réguliers du service d’urgence du CHU de Nancy pour leur proposer des parcours de soins plus adaptés à leurs besoins, a-t-on appris mardi lors d’échanges avec le chef du service d’urgence et du Samu du CHU de Nancy, le Pr Tahar Chouihed, et la présidente du dispositif d’appui à la coordination de Meurthe-et-Moselle (DAC 54), le Dr Eliane Abraham.
Sous l’égide de l’agence régionale de santé (ARS) Grand Est, le “Daum” a été lancé en novembre 2022 par le CHU, le DAC et la plateforme territoriale d’appui (PTA) nancéenne, le réseau Gérard-Cuny, pour diminuer le recours aux urgences hospitalières des 10% d’usagers les plus réguliers (cf. dépêche du 22/11/2022 à 17:33).
“C’est un travail qui s’inspire de celui sur les ‘utilisateurs fréquents [usagers fréquents]’ initié par l’ARS Ile-de-France où était le Dr Romain Hellmann [conseiller médical de la direction de l’ARS Grand Est depuis novembre 2021]” (cf. dépêche du 29/10/2021 à 14:56), a recontextualisé le Pr Tahar Chouihed, joint mardi par APMnews.
“On a mis un an et demi pour monter un protocole scientifique et en parallèle, on a développé la filière de soins des usagers multiples au sein du CHU”, a poursuivi le chef de service des urgences du CHU de Nancy.
Le dispositif Daum s’active au quatrième passage d’un patient aux urgences du CHU au cours des 12 derniers mois, soit un seuil deux fois supérieur au seuil normal d’un à deux passages par an aux urgences hospitalières, a expliqué le Pr Chouihed.
Après une première évaluation du patient par les assistantes sociales du CHU, son dossier est transmis au DAC 54, comme l’a indiqué sa présidente, Eliane Abraham, contactée mardi par APMnews: “Après une analyse du dossier, on prend contact avec le patient et son équipe de soins, quand elle est connue, et on essaye de comprendre ce qui fait que la personne va aux urgences”.
Ces échanges permettent d’établir un projet personnalisé de coordination en santé (PPCS) avec les différents acteurs, en ville comme l’hôpital, déjà connus du patient ou non, pour trouver une solution individualisée.
Quatre “profils dominants” se dégagent parmi les plus de 500 patients pris en charge dans le cadre du Daum, a synthétisé le Dr Abraham: “les consommateurs divers” (alcool, drogues…), des problématiques de “santé mentale au sens large”, des “personnes en précarité dans l’accès aux soins” et d’autres relevant du “maintien à domicile, de la personne âgée au malade chronique en passant par le handicap ou l’instauration de traitements lourds”.
Le Pr Chouihed a mis en exergue la capacité du DAC à fournir une réponse sensiblement plus adaptée à ces patients grâce à son équipe multidisciplinaire allant du généraliste au sociologue, en passant par un psychiatre, un gériatre, un addictologue, des infirmières libérales ou un kinésithérapeute.
“On a du temps, on va dans leur écosystème, on côtoie leur équipe de soins, la famille, les personnes elles-mêmes, on peut redéfinir un projet soins”, a fait valoir Eliane Abraham.
“Ce sont des personnes qui passent tellement aux urgences qu’elles ne sont plus examinées à chaque fois, elles deviennent invisibles et nous, on aide à leur redonner de la visibilité”, a-t-elle complété.
La présidente du DAC a reconnu que le dispositif avait cependant plus de mal à mettre en place une réponse efficace concernant les usagers “qui sont géographiquement mobiles”, en expliquant qu’il s’agissait “souvent de patients jeunes et sans emploi”.
Sur le principe d’une “étude avant/après” sur les 500 premiers patients pris en charge, le projet Daum fera l’objet d’une évaluation jusqu’en novembre 2024, conformément au projet validé par le comité scientifique de la direction de la recherche du CHU et le comité d’éthique, a rapporté le chef des urgences du CHU: “On espère une baisse de 20% de leurs passages aux urgences.”
Le fonctionnement de Daum pourrait se fluidifier d’ici là avec une automatisation du signalement des passages des usagers fréquents des urgences en cours de développement avec le groupement régional d’appui au développement de la e-santé (Grades) du Grand Est, Pulsy.
Pour Tahar Chouihed, la réussite du projet repose à la fois sur “un écosystème des urgences ouvert à l’accès aux soins et qui accepte de ne pas filtrer les entrées des urgences”, ainsi que sur un niveau de ressources humaines assez important sur le DAC “pour pouvoir assurer ce suivi parce que c’est quelque chose qui va s’inscrire dans la durée”.
Cette nouvelle expérimentation s’inscrit dans le sillage de plusieurs innovations organisationnelles structurantes développées par le CHU pour fluidifier ses flux patients et faire face à un volume croissant d’activité non programmée dans un contexte de pénurie de lits et de personnels.
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2024-02-23 03:05:13