2024-08-05 15:26:12
Depuis sa naissance, le sport olympique a été le théâtre de nombreuses contradictions quant aux valeurs qui l’inspirent. D’une part, c’est le symbole de l’inclusion et du multinationalisme (les cinq cercles croisés), exprimant la représentation plastique de la rencontre entre différentes cultures et de la valorisation des différences, thèmes fondamentaux dans un monde de plus en plus globalisé.
Symbole d’inclusion
En ce sens, les Jeux olympiques sont un levier de développement culturel et social, une opportunité pour la rencontre de différents peuples, religions, cultures, générations, genres et capacités. Favorisent-ils la convivialité ? entre individus d’origines et de milieux ethniques, culturels et sociaux différents, favorisant une meilleure connaissance mutuelle dans un contexte profondément ancré dans la vie quotidienne et devrait donc fonctionner comme un antidote puissant aux risques de phénomènes d’exclusion ou de discrimination.
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Cela peut stimuler le nationalisme
D’autre part, le sport, également à travers ses représentations symboliques et les récits médiatiques dont il fait l’objet, est susceptible de développer des liens identitaires et émotionnels très forts entre les membres d’un même groupe associés à une distance par rapport à ceux de groupes différents. Ces processus peuvent constituer une caisse de résonance pour des manifestations et des sentiments paroissiaux, nationalistes, parfois même sexistes, racistes et xénophobes.
Le fair-play
Si l’on y réfléchit bien, l’antinomie entre processus d’inclusion et d’exclusion imprègne l’idée même du sport moderne depuis sa naissance, que l’on peut situer au sein des écoles publiques anglaises, au début du XIXe siècle. idée d’égalité et de dépassement de ses limites, qui s’est transformée en volonté de codifier méthodiquement les règles du jeu, pour permettre aux joueurs de s’affronter sur un pied d’égalité dans un esprit de fair-play.
Ce n’est que plus tard que ces principes trouvèrent une articulation complète dans les théories pédagogiques de Pierre de Coubertin. L’histoire qui relie cela au concept des Jeux olympiques est presque un prétexte. Entre 1875 et 1881, l’archéologue allemand Curtius avait en effet mis au jour les ruines de l’ancienne Olympie où, tous les quatre ans, de 776 avant JC à 393 après J.-C., se déroulaient les Jeux Olympiques grecs antiques. Il ne s’agissait certainement pas d’un exemple d’inclusion (réservé uniquement à des athlètes grecs très sélectionnés) ou de pacifisme (il suffit de penser à la pratique du Pancrazio, une forme de combat proche d’une version plus violente des arts martiaux mixtes actuels).
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de Céleste Ottaviani
Les ruines d’Olympie et de Coubertin
Cependant, la découverte des ruines d’Olympie incite de Coubertin à organiser une grande compétition sportive internationale entre athlètes amateurs masculins, qui aurait considéré les disciplines les plus importantes de l’époque.
L’esprit olympique de Coubertin était donc déjà marqué par quelques antinomies : la coexistence entre athlètes de nations différentes vs. la dureté de la confrontation nationaliste ; la centralité de la valeur de l’effort et le snobisme aristocratique de l’amateurisme ; le potentiel du corps humain et le sexisme. Sur ce dernier aspect, il convient de rappeler que, même si dans les premières pages du Livre blanc sur le sport de la Commission européenne figure une phrase éclairée de Pierre de Coubertin “Le sport fait partie du patrimoine de chaque homme et de chaque femme et son absence peut ne jamais être indemnisé», le baron s’est d’ailleurs ouvertement opposé à la participation des femmes aux Jeux Olympiques.
La participation des femmes
En fait, lors des premiers Jeux olympiques modernes d’Athènes en 1896, les femmes n’étaient pas autorisées à participer. En signe de protestation, une Grecque – Stamata Revithi – a couru le marathon le lendemain de la course officielle car le règlement ne lui permettait pas de s’inscrire.
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Les femmes au marathon seulement en 1984
Pour voir une femme participer officiellement au marathon, il a fallu attendre les Jeux olympiques de Los Angeles en 1984, environ quatre-vingt-dix ans plus tard. Après un long voyage, des décisions historiques ont été prises à Paris 2024 en matière d’égalité des sexes : la participation des athlètes masculins et féminins est en effet parfaitement égale et donc exactement la moitié des 10 500 participants sont des hommes, le l’autre moitié du genre féminin. L’idée que cela mettrait fin au débat sur les questions de sport et de genre a été soulevée de manière sensationnelle quelques jours seulement avant le début des jeux.
Imane Khelif et Angela Carini
Quand, jeudi 1er août, Imane Khelif et Angela Carini sont entrés sur le ring pour participer à un match de boxe dans la catégorie des poids welters, beaucoup ont réalisé que, même dans le sport, les « questions de genre » ne sont pas simplement binaires. Comme cela arrive souvent, les questions complexes, lorsqu’elles deviennent des sujets de discussion collective, risquent d’être simplistes à l’excès. Ainsi le boxeur algérien a été décrit alternativement comme homme, femme, travesti, transsexuel, intersexuel, par ceux qui ont ressenti, à l’instar de l’écrivain, le besoin d’exprimer leur opinion.
Deux genres
Étant donné que chacun a droit à sa propre opinion, certains éléments semblent clairs et non discutables. En Algérie, comme en Italie, la loi prévoit l’existence de deux genres, dont l’un est attribué à la naissance sur la base des organes génitaux externes. Khelif a toujours été une personne féminine et aurait été considérée comme telle en Italie également.
Son précédent parcours d’athlète est très bon, mais pas forcément meilleur que celui de notre Carini, avec un taux de réussite d’environ 80% de combats pour les deux athlètes. L’élément qui a déclenché la polémique était le suivant : l’Association Internationale de Boxe avait auparavant exclu Khelif pour avoir détecté la présence de chromosomes XY dans son ADN.
Intersexualité
Ainsi, selon ce qui a été communiqué par l’IBA, Imane Khelif serait une personne intersexuelle, c’est-à-dire possédant à la fois des caractéristiques féminines et masculines. Etant donné que l’IBA, après quelques scandales impliquant sa direction russe, n’est plus reconnue par le Comité International Olympique, le critère invoqué n’est pas celui retenu pour inclure ou exclure les athlètes des compétitions.
Une question complexe
La question est vraiment compliquée, le CIO ne s’en occupe que depuis le début des années 2000 : en 2003, sa commission médicale avait élaboré des lignes directrices qui, en 2015, ont été modifiées en introduisant une ligne directrice basée sur un taux de testostérone inférieur à 5 nanomoles par litre. dans les douze mois précédant le concours. En 2022, le CIO a de nouveau mis à jour son règlement, reportant de fait les décisions précises aux disciplines sportives individuelles, tout en rappelant qu’à la base de chaque décision il doit y avoir « des principes de protection, de non-discrimination, d’équité, de non-présomption d’avantage, une approche basée sur faits.”
La complexité de la biologie humaine
L’actualité nous montre que c’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire. Ce qui apparaît évident, c’est la complexité de la biologie humaine et, avec elle, le risque de deux décisions injustes opposées. La première serait d’organiser des compétitions manifestement inégales, un thème aux conséquences très importantes dans certains sports, comme les sports de combat. La seconde serait d’exclure des concours ceux qui auraient tous les droits pour y participer. Le domaine sportif est souvent considéré comme un exemple d’environnement post-préjugés, purement basé sur le mérite, où le succès est déterminé par une combinaison de talent naturel, de travail acharné et de courage. La présence de catégories basées sur le sexe, le poids, l’âge, etc. garantit la possibilité de mettre tout le monde sur un pied d’égalité.
La difficulté de classer la biologie
Le cas de Khelif nous ramène au fait que la biologie, comme presque tout ce qui existe dans la nature, peut difficilement être classée en catégories claires, sauf sur une base purement conventionnelle. Les commentateurs qui ont surfé sur la vague de polémique sur cette affaire ont tenté de simplifier en se divisant en factions, qui n’étaient pas binaires par hasard (êtes-vous pour Khelif ou pour Carini ?).
J’aimerais pouvoir avoir leurs certitudes. De mon point de vue, l’espoir est qu’une fois de plus le sport, en mettant en lumière les contradictions et les apories inévitables dans une société complexe comme celle que nous avons la chance de vivre, permettra à chacun de participer au moins à un débat capable d’aller au-delà de toutes les idées reçues.
Fabio Lucidi est professeur de psychologie de la santé et vice-recteur de l’Université Sapienza de Rome. Il est président de la Fondation de l’Hôpital Universitaire Sant’Andrea
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