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Le climatologue Pascal Mormal livre ses prévisions pour les futurs hivers en Europe

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Le climatologue Pascal Mormal livre ses prévisions pour les futurs hivers en Europe

Il est plébiscité pour son analyse pertinente de la situation, sans se laisser emporter par des discours alarmistes. Toutefois, il ne cache pas son inquiétude face à la situation actuelle et à la fréquence croissante de phénomènes climatiques de plus en plus extrêmes. Pascal Mormal est l’invité du samedi de LaLibre.be.

En Belgique, en quelques jours, nous sommes passés de la neige à des températures bien au-dessus des normales de saison. Est-ce inquiétant ?

Ce changement brusque de températures est dû à un changement de masses d’air. Malgré une température moyenne de 3,7 degrés en janvier, correspondant à la normale pour ce mois, nous avons connu des écarts avec des journées très douces, suivies d’une période froide du 7 au 20, avant de retrouver de la douceur.

À quoi peut-on s’attendre dans les prochaines semaines ?

Plusieurs modèles météorologiques indiquent la possibilité d’une seconde quinzaine de février plus fraîche. Cependant, ces prévisions demandent à être confirmées. Pour l’instant, les températures atteindront 10 à 12 degrés dans le centre du pays jusqu’à la fin de la semaine prochaine. Aucun signe ne prévoit un gros coup de froid dans les 10 à 15 prochains jours, peut-être juste un rafraîchissement et éventuellement un peu de neige en Ardenne…

Est-il inquiétant de constater des températures avoisinant les 30 degrés en Espagne en plein hiver ?

Nous sommes actuellement dans une masse d’air d’origine subtropicale, avec des températures exceptionnelles dans certaines parties de l’Europe occidentale. La péninsule ibérique est particulièrement touchée par un anticyclone qui entraîne des conditions très chaudes et sèches. En France, dans les Pyrénées orientales, on observe également des températures exceptionnellement élevées, associées à une sécheresse extrême, posant des problèmes d’approvisionnement en eau et, dans une moindre mesure, pour l’enneigement des pistes de ski.

Gérone dans le Nord de l’Espagne ©AFP or licensors

Y aura-t-il des zones en Europe qui deviendront inhabitables dans quelques années ?

C’est une préoccupation sérieuse et les études à ce sujet sont assez pessimistes pour les pays du bassin méditerranéen, où les températures pourraient rester plusieurs jours au-dessus de 40-45 degrés. Le climat du sud de l’Espagne pourrait progressivement devenir semi-aride, voire semi-désertique, ce qui pose problème pour une agriculture intensive qui requiert d’importantes ressources en eau. Ces régions seront confrontées à des problèmes majeurs d’eau potable et de feux de forêt. Nous pourrions même envisager de tels incendies dans un futur assez proche en Belgique.

Pourrions-nous également connaître des températures très élevées en hiver en Belgique ?

Oui, le réchauffement climatique va entraîner une augmentation des températures. En février 2019, nous avons dépassé pour la première fois les 20 degrés à Uccle durant l’hiver météorologique, indiquant des températures plus élevées qu’il y a 20 ou 30 ans à la même période. Les extrêmes à la hausse sont plus marqués, tandis que les extrêmes à la baisse sont moins importants. Les épisodes de froid seront également moins fréquents en Belgique. Ce que nous avons connu en janvier n’était pas une vague de froid : nous avons juste eu 4 jours où la température est restée en dessous de zéro degré, avec une température minimale enregistrée à Uccle de -6,8 degrés. Même dans une configuration polaire, nous ne parvenons pas à avoir des températures excessivement froides…

Allons-nous vers des hivers sans neige ?

C’est une question délicate. Les épisodes de froid et de neige auront tendance à diminuer, et lorsqu’ils se produiront, ils seront moins durables. À Uccle, nous n’avions pas connu autant de neige depuis le 12 mars 2013, mais dans les années 1960-1980, nous avions en moyenne un hiver avec au moins 10 centimètres de neige une fois sur deux.

La Tempête d’Ingunn a balayé le nord de l’Europe cette semaine. Est-il surprenant que la Belgique ait été épargnée ?

Heureusement, la tempête s’est déplacée vers le nord de l’Atlantique, touchant fortement les Îles Féroé avec des rafales à 249 km/h. Si une telle tempête avait touché le Benelux, elle aurait causé des dégâts comparables à ceux de décembre 1999 ou de l’ouragan qui avait frappé la Bretagne et les îles britanniques en octobre 1987.

Avec le réchauffement climatique, doit-on s’attendre à davantage de tempêtes ?

Pas nécessairement, car le nombre de tempêtes dans nos régions ne semble pas augmenter en raison du réchauffement climatique. La tempête d’Ingunn a été favorisée par un contraste important entre une configuration anticyclonique étendue des Açores à la mer Noire avec des températures plus élevées et de l’air très froid dans le nord, dynamisant le courant-jet. Cependant, le courant-jet pourrait ne plus être aussi dynamique dans les années à venir.

Peut-on affirmer que les phénomènes climatiques extrêmes se multiplient ?

Oui, ces phénomènes sont liés au réchauffement climatique et seront de plus en plus visibles. En Belgique, des anticyclones figeront le temps pendant plusieurs semaines, entraînant des températures élevées et une sécheresse prolongée. Nous serons donc plus souvent confrontés à de telles configurations, ainsi qu’à des épisodes de pluies intenses brefs suivis de longues périodes de sécheresse.

En tant que météorologue, êtes-vous préoccupé par le futur qui nous attend ?

Évidemment, c’est un sujet de préoccupation. L’évolution des vagues de chaleur depuis les années 1980 est inquiétante, aggravée depuis 2015, avec les trois années les plus chaudes mesurées à Uccle depuis 1833 étant 2022, 2020 et 2023. Le top 10 des années les plus chaudes ne comprennent que des années postérieures à 2005. Ce n’est ni accidentel ni lié à la variabilité du climat.

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