Le Credit Suisse efface 16 milliards d’obligations des épargnants (mais protège les actionnaires saoudiens et qataris) – Corriere.it

Le Credit Suisse efface 16 milliards d’obligations des épargnants (mais protège les actionnaires saoudiens et qataris) – Corriere.it

L’image qui reste de la faillite de Lehman Brothers, ce sont ces banquiers déjà à la rue, avec leurs caricatures à la main. L’image qui restera de cette crise est peut-être celle d’un seul banquier : Greg Becker, aujourd’hui ancien PDG de la Silicon Valley Bank, photographié en short, T-shirt et tongs à Hawaï quelques jours seulement après la faillite de la banque qu’il devait diriger. Le scoop du Daily Mail, immédiatement repris par le New York Post. Bien sûr, il n’y a rien d’illégitime si Becker, aujourd’hui au chômage et propriétaire d’un manoir de 3,1 millions de dollars à Hawaï, décide de s’y réfugier quelques jours après le pire drame de sa vie professionnelle. Au contraire, il est plus discutable qu’il ait lui-même vendu des actions de sa banque pour 3,5 millions de dollars quelques jours avant l’annonce de l’augmentation de capital, pour couvrir les pertes qui auraient déclenché le krach.

Mais le symbole derrière l’image renvoie, une fois de plus, à une crise bancaire à deux vitesses. Il y a ceux qui en sont largement responsables, pourtant ils semblent toujours en sortir riches et bien protégés (même si une enquête du ministère américain de la Justice se profile dans l’affaire Becker). Et puis il y a les autres, ceux qui sont exposés aux conséquences et destinés à payer le prix d’erreurs qui ne sont pas les leurs. un mélange politiquement explosif : en Amérique, la vague de populisme qui aurait amené Donald Trump à la Maison Blanche démarre aussi avec le Tea Party, issu de la crise bancaire de 2008. Une fois de plus, la crise bancaire se transforme déjà en un phénomène à double vitesse tant en Suisse, avec la vente du Credit Suisse à UBS, qu’aux Etats-Unis. Le court-circuit en Amérique que les épargnants voient ces jours-ci: si une banque comme la Svb fait faillite, des titans milliardaires du capital-risque comme Marc Andreessen ou Peter Thiel voient leurs dépôts de plusieurs millions garantis avec de l’argent public jusqu’au dernier centime ; mais si une course frappe une petite banque rurale du Midwest, un agriculteur local risque de voir tous ses dépôts et ceux de son entreprise supérieurs à 250 000 $ anéantis.

Bien sûr, il y a une explication logique à cela différence de traitement et, ces derniers jours, la secrétaire au Trésor Janet Yellen l’a proposé au Congrès. Dans le cas de Svb une décision des autorités de Washington a déterminé que tous les déposants devaient être protégés, même les milliardaires, au nom d’une exception systémique : ne pas le faire à Silicon Valley Bank aurait eu des conséquences systémiques. D’autre part, des milliers de petites banques, qui desservent des clients plus petits, ne sont pas systémiques et ne sont pas l’exception pour elles. Trump n’aurait pas pu rêver d’une arme plus tranchante pour sa rhétorique anti-contentieux. Le Trésor, la Réserve fédérale et les grandes banques américaines ont travaillé tout le week-end pour trouver une solution à la prochaine banque défaillante, la Première République. Mais le problème est déjà ailleurs. L’association des banques de taille moyenne a écrit aux régulateurs pour demander que leurs dépôts soient également intégralement garantis par de l’argent public. Il assurerait effectivement l’épargne liquide de tous les Américains, pour 19 000 milliards de dollars. Aujourd’hui, cela semble impossible, alors la demande tombera dans l’oreille d’un sourd. Mais puisqu’il est maintenant public, on ne peut que se demander comment des dizaines de milliers de déposants dans les petites banques réagiront à partir de demain: ils voudront apporter leur argent aux banques systémiques, déclenchant de nouvelles paniques bancaires et autres perturbations.

Le renflouement du Credit Suisse aura aussi des répercussions. L’opération fait disparaître la valeur des obligations subordonnées (A1) pour 16 milliards d’euros, avant même d’anéantir tout le capital des actionnaires comme cela aurait été normal. Difficile de dissiper l’idée que pour des raisons géopolitiques délicates, ils ont voulu préserver, au moins en partie, les deux premiers actionnaires de la banque : la Banque nationale saoudienne et le fonds souverain qatari. Ainsi, le précédent a été créé selon lequel les détenteurs d’obligations subordonnées pourraient être moins protégés que les actionnaires. Dès ce matin, les obligations de nombreuses banques européennes vont se retrouver en pleine mer. Mais pas calme.

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