Le cyclisme va-t-il trop loin?
Paris-Nice cette semaine, puis Milan-San Remo, les classiques flandriennes, Paris-Roubaix, le Tour de Romandie, le Giro, le Tour de France… Le calendrier est immuable et pourtant peu de sports ont autant changé que le cyclisme, secoué depuis quelques années par des violentes mutations. L’argent coule à flot mais le malaise s’étend, les écarts augmentent, le contrôle des coureurs s’intensifient, la pratique devient hors de prix. Alors, le vélo va-t-il trop loin? Toute la semaine, Pierre Carrey fait le tour de la question pour Le Temps.
Épisode 1: Le peloton tétanisé face au «dopage financier»
L’histoire n’a jamais été racontée. Connue d’une microscopique poignée d’initiés, ensevelie sous le secret des affaires. L’opération remonte à 2013, lorsque le Britannique Brian Cookson prend le contrôle de l’Union cycliste internationale (UCI). Cette année-là, d’anciens représentants de la banque Rothschild, qui l’ont aidé pendant sa campagne, obtiennent des postes au siège de la fédération, implantée à Aigle (Vaud). Tel Justin Abbott, qui prospecte au nom de l’UCI «pour aider le cyclisme à créer plus de richesses». Pendant quatre ans, le «conseiller spécial du président» voyage, parlemente, va jusqu’à suggérer (en vain) un raccourcissement des grandes épreuves «pour améliorer le spectacle». Mais pour qui travaille-t-il?
Les rendez-vous se multiplient entre cet émissaire et Amaury Sport Organisation (ASO), propriétaire du Tour de France. Dans le cyclisme, le principal événement au calendrier – tant le Tour masculin, créé en 1903, que le Tour féminin, relancé en 2022 – appartient non pas à la fédération internationale, mais à une entreprise privée. A cette époque, donc, plusieurs barons du vélo racontent avoir croisé des personnes liées à Rothschild. Pour eux, cet intérêt soudain souffre peu de doutes: la banque a cherché à racheter le Tour de France, pour son propre compte ou celui d’un client.
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