C’est également le mois de l’idéal maghrébin. En effet, en août 1953, la résistance armée en Algérie et au Maroc a harcelé la présence française dans les deux pays en lançant une série d’attaques simultanées à partir de la campagne, au cours de la même semaine. Cette offensive coordonnée entre les mouvements de résistance algérien et marocain n’a pas été le fruit du hasard, mais une action concertée. En outre, août est également synonyme de réunification puisque le 14 août 1979, le Maroc a repris le contrôle de la province de Oued Ed-Dahab et l’a réintégrée à la patrie. Le 20 août est également une date qui rappelle un passé de résistance loyale et libératrice.
Aujourd’hui, avec le recul de 67 ans depuis l’indépendance politique, la date du 20 août 1953 apparaît comme le début de la fin de la colonisation française au Maroc. En effet, lorsque le général Guillaume, ayant reçu les pleins pouvoirs de Paris, a destitué le Sultan Mohammed V, les membres du gouvernement français ne semblaient pas comprendre la gravité de cette action et de la situation causée par les services de la résistance avec la complicité des adversaires locaux du Sultan. Les signes de cet acte étaient déjà perceptibles dès le 15 août 1953 à Marrakech, lorsque les pachas et les caïds de la région ont prêté allégeance à Ben Arafa, qui devait ensuite prendre la place du Sultan Mohammed V. Les autorités françaises auraient dû comprendre à ce moment-là que le peuple marocain ne tolérerait pas qu’on porte atteinte à son Roi. En effet, au moment même de la cérémonie d’allégeance, la population de Marrakech s’est révoltée, entraînant la mort de deux Français poignardés et de plusieurs mokhaznis marocains.
Les jours qui ont suivi ont été un véritable cauchemar pour l’occupation française, le général Guillaume, alors résident général et disciple du maréchal Juin, a même cru opportun de destituer le Sultan du Maroc pour remédier à la situation. La tentation du résident général était d’autant plus grande que Ben Arafa, le faux Sultan, était un traître bon marché. Ainsi, d’un côté, le général Guillaume, protégé de Juin, et de l’autre, la marionnette d’un pacha de Marrakech dont les intérêts coïncidaient avec ceux de la colonisation, El Glaoui, ont orchestré une supercherie brillante de la colonisation française et ont forcé la mise en exil obligatoire de la famille royale.
Malgré le fait que les dirigeants nationalistes aient été assignés à résidence sans possibilité de contact avec l’extérieur, les événements se sont enflammés. Tout le Maroc était en état de siège, Fès était encerclée par l’armée française et Casablanca était en proie à une fièvre explosive. Dès l’annonce de la destitution du Sultan Mohammed V, le président du Parti de l’Istiqlal déclarait que “le destin inexorable vient de s’accomplir. Aveuglés par leur arrogance, les Français ont chassé notre Roi légitime (…). La France a ainsi détruit tous les principes de droit et de justice, violé pactes et alliances, bouleversé la conscience et attaqué la souveraineté du Maroc”. Pour le mouvement national marocain et sa résistance armée, l’heure de la “coexistence pacifique” avec le régime larvé du protectorat était désormais révolue.
Ainsi, le 20 août 1953 marque le début de la fin de la colonisation française au Maroc. Pendant les trois années qui ont suivi la destitution du Sultan jusqu’à la signature des accords d’Aix-Les-Bains et le retour de Mohammed V sur son trône, la résistance armée a redoublé d’intensité et d’ingéniosité. En effet, le 20 août 1955, pendant que la résidence générale à Rabat surveillait attentivement Casablanca dans l’attente d’une révolte ou d’une manifestation citadine, c’est à Khénifra et dans les régions environnantes que la révolte a éclaté, obligeant les occupants français à battre en retraite.
À partir de cette date, le compte à rebours de la fin de la colonisation française était enclenché.
