Le jeûne intermittent : une stratégie alimentaire secrète et délicate

Le jeûne intermittent : une stratégie alimentaire secrète et délicate

Le jeûne intermittent, une stratégie séduisante… mais compliquée à mettre en place

Anouk Charlot, Université de Strasbourg, et Douanes Joffrey, Université de Strasbourg

La santé et les bonnes habitudes alimentaires sont au cœur des problématiques modernes. En effet, face à l’augmentation de la prévalence des maladies métaboliques comme le surpoids et l’obésité (13 % des adultes en obésité, 39 % en surpoids d’après l’OMS), l’importance d’avoir une alimentation équilibrée et adaptée pour limiter ces risques est de plus en plus présente dans l’esprit collectif.

Politiques de santé publique, recommandations scientifiques et des organismes de santé tentent de lutter contre ce fléau avec des approches préventives. Par exemple, l’étiquetage nutritionnel sur les emballages alimentaires fournit aux consommateurs des informations simplifiées sur les nutriments essentiels contenus. Il aide ainsi à identifier et à promouvoir une meilleure alimentation en choisissant des aliments plus sains.

La promotion de slogans tels que « cinq fruits et légumes par jour », le programme national de nutrition santé « Manger Bouger » ou encore des campagnes de prévention sont aussi utilisées pour mettre en garde et promouvoir des comportements alimentaires sains.

Cependant, « ce que nous mangeons » n’est pas suffisant… Il faut avoir à l’esprit que « le moment et la fréquence à laquelle nous mangeons » joue également un rôle important. C’est ainsi qu’est né le concept de « jeûne intermittent », qui a démontré ces dernières années des effets bénéfiques intéressants pour notre santé, à condition cependant de respecter plusieurs principes pour ne pas faire n’importe quoi.

Le jeûne, une longue histoire…

Ce jeûne dit intermittent fait référence au fait d’alterner des phases où l’on ne mange pas (plus ou moins longues) et des périodes de prise alimentaire.

De façon physiologique, le jeûne est un comportement qui n’a rien d’exceptionnel. Il est même fréquent chez les animaux qui sont obligés de s’adapter à leurs contraintes écologiques et physiologiques. Par exemple, lors des périodes d’hibernation, de reproduction, pendant la mue, ou encore en cas de maladie, certains n’ont pas d’autres choix que de jeûner.

Chez l’humain, ce comportement a également pu être adopté – volontairement ou non. Si l’on fait un retour en arrière de 30 000 ans ou plus, nous pouvons constater que certains de nos ancêtres Un homme sage ont été confrontés à des périodes de jeûne.

En tant que chasseur-cueilleur très actif, sa survie dépendait d’une prise alimentaire suffisante. Or son style de vie, associé des variations saisonnières, des conditions climatiques changeantes et un succès imprévisible lors de sa recherche de nourriture pouvaient entraîner des périodes de jeûne. C’est d’ailleurs pour cela que notre grande capacité à stocker de l’énergie sous forme de tissu adipeux a longtemps été un avantage sélectif pour traverser les périodes de manque de nourriture !

L’abstinence alimentaire volontaire est aussi largement présente au long de l’histoire humaine. En contexte religieux, le jeûne est présent dans le christianisme (carême), la religion islamique (ramadan), mais également le judaïsme, l’hindouisme ou encore le bouddhisme.

En médecine, il est pratiqué depuis l’Antiquité puisqu’Hippocrate et Galien déjà le prescrivent aux malades. Il est aussi retrouvé au Moyen Âge dans les écrits du médecin perse Avicenne ou du Suisse Paracelse, pour améliorer la santé.

Plus récemment, c’est au XIXe siècle que cette pratique redevient populaire aux États-Unis, plus particulièrement grâce au Dr Edward Hooker Dewey qui propose de manger moins en sautant le petit-déjeuner. Avec son ouvrage « No-Breakfast Plan and the Fasting-cure » (« Le plan Sans petit-déjeuner et la cure par le jeûne »), il est l’un des inventeurs du jeûne intermittent.

Et qu’en dit la science ?

Les résultats varient en fonction de la stratégie adoptée.

Pour les approches « eat-stop-eat » et 5:2, assez peu d’études scientifiques ont été menées. Les rares données disponibles ont montré qu’elles pouvaient être efficaces pour perdre du poids et améliorer certains paramètres métaboliques comme la glycémie à jeun. Par exemple, Surabhi Bhutani (université de l’Illinois) a montré que l’utilisation de la méthode 5:2 pendant trois mois avait permis une perte de poids de 3 à 6 kg chez les participants.

Cependant, ces deux méthodes étant très restrictives, elles peuvent entraîner des effets secondaires lors des jours de jeûne total ou de forte restriction calorique – faim, effets négatifs sur l’humeur, risque d’hypoglycémie, etc.

Sur un plus long terme, la restriction augmente également le risque de développer ou d’aggraver des troubles du comportement alimentaire, et favorise le risque d’adopter des comportements de “type yo-yo”. Ce phénomène est fréquent lorsque l’on essaye de perdre du poids en se restreignant : au départ, il y a bien perte de poids, mais les restrictions peuvent générer des frustrations… qui risquent de favoriser le retour des anciennes habitudes alimentaires, elles-mêmes associées à la reprise de poids.

La méthode la plus étudiée est celle avec une prise alimentaire chaque jour mais limitée dans le temps. Deux « créneaux horaires » sont souvent observés :

– Lorsque la prise alimentaire commence avec le petit-déjeuner et se finit en fin d’après-midi. On parle en anglais de « early time-restricted feeding », ou « alimentation limitée dans le temps à partir du matin » ;

– Lorsque la prise de repas commence par le déjeuner de midi. On parle cette fois de « late time-restricted feeding », ou « alimentation limitée dans le temps à partir de midi ».
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2023-12-29 00:44:51

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