2024-08-28 08:49:09
MEXICO –
Le président mexicain a déclaré mardi aux journalistes qu’il avait mis ses relations avec les ambassades des États-Unis et du Canada « en pause » après que les deux pays ont exprimé leurs inquiétudes concernant un projet controversé de réforme judiciaire.
Le président Andrés Manuel López Obrador n’a pas précisé ce que signifierait une pause. Ce terme n’est pas utilisé dans les codes diplomatiques officiels et le ministère mexicain des Affaires étrangères n’a pas répondu à une demande de commentaires de l’Associated Press sur ce que cela impliquerait.
Le projet de réforme judiciaire, suggéré par le président mexicain au cours de ses dernières semaines au pouvoir, a suscité d’importantes manifestations et grèves ainsi que de nombreuses critiques de la part des investisseurs et des institutions financières.
La semaine dernière, l’ambassadeur américain Ken Salazar a qualifié cette proposition de « risque » pour la démocratie, qui mettrait en péril les relations commerciales du Mexique avec les États-Unis. López Obrador a fustigé l’ambassadeur, affirmant qu’il violait la souveraineté mexicaine. Depuis, Salazar a changé de ton, écrivant sur X qu’il était ouvert au dialogue.
López Obrador a déclaré lors de sa conférence de presse matinale mardi qu’il pensait que les commentaires virulents ne provenaient pas de Salazar, mais plutôt du département d’État américain.
« Nous n’allons pas lui dire (à Salazar) de quitter le pays », a-t-il dit. « J’espère qu’ils promettront de respecter l’indépendance du Mexique, la souveraineté de notre pays. Mais tant que cela n’arrivera pas et qu’ils ne poursuivront pas cette politique, tout sera en pause. »
Il a ajouté avec effronterie : « Nous allons prendre notre temps », suscitant les rires de certains journalistes.
López Obrador a également accusé le Canada d’interférer dans une affaire interne en exprimant ses appréhensions face à la proposition. Les trois pays entretiennent une relation commerciale cruciale qui a atteint un montant estimé à 1,8 billion de dollars américains en 2022. Jusqu’à présent, les tensions ne montrent aucun signe clair de la manière dont elles peuvent affecter les relations économiques et diplomatiques de longue date entre eux.
Depuis, Salazar a changé de ton, écrivant sur X qu’il était ouvert au dialogue et qu’il respectait la souveraineté mexicaine. Mais, au moment où il le faisait, les membres de la commission bipartite des relations étrangères du Sénat, dont le sénateur républicain Marco Rubio et le sénateur démocrate Tim Kaine, ont publié une déclaration commune disant qu’ils étaient « profondément préoccupés » par la refonte judiciaire et d’autres propositions de réforme de la Constitution, qui, selon eux, pourraient « contredire les engagements » pris dans leur accord commercial.
Ces commentaires ne risquent que d’irriter davantage López Obrador.
Ce n’est pas la première fois que le chef de l’État mexicain utilise cette expression. En 2022, il avait annoncé une pause diplomatique avec l’Espagne en raison d’un différend avec des entreprises énergétiques. À l’époque, López Obrador avait déclaré que cette pause « n’est pas une rupture des relations » avec l’Espagne, mais « rien de plus qu’une protestation respectueuse et fraternelle contre les abus et les griefs commis contre le peuple du Mexique et de notre pays ».
Les derniers commentaires adressés à l’ambassadeur américain interviennent cependant dans un contexte de tensions accrues entre les deux gouvernements ces derniers mois, après que les Etats-Unis ont arrêté le baron de la drogue mexicain “El Mayo” Zambada dans une étrange série d’événements. A mesure que de plus amples informations ont été révélées sur cette affaire, López Obrador a adopté un ton de plus en plus belliqueux, a déclaré Carlos Pérez Ricart, analyste politique au Centre de recherche et d’enseignement économiques du Mexique.
« Dans d’autres circonstances, dans un autre contexte, il aurait pu se contenter d’écouter, sans aggraver le conflit », a déclaré Pérez Ricart. « Ces derniers mois, nous avons vu des déclarations beaucoup plus radicales envers les États-Unis. »
López Obrador devrait passer le relais à son alliée politique et présidente élue Claudia Sheinbaum, qui prendra ses fonctions le 1er octobre. Pérez Ricart a déclaré que si les récentes tensions peuvent peser sur la première femme présidente du Mexique, elles peuvent également l’aider à se démarquer comme une cheffe d’État plus modérée.
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