Le neurochirurgien qui opère les patients éveillés pour maintenir leur essence

2024-10-08 05:26:28

Jésus Martin-Fernandez Il est devenu une figure de proue dans son domaine en pratiquant des opérations chirurgicales au cerveau sur des patients éveillés. Une expérience personnelle l’a amené à concentrer son activité clinique et de recherche sur la chirurgie éveillée des tumeurs cérébrales, étant l’un des moteurs mondiaux d’un changement de paradigme avec son mentor, le prestigieux neurochirurgien Hugues Duffau, leader mondial dans ce domaine, avec qui travaille et recherches à Montpellier.

En 2022, Martín-Fernández a développé un test pionnier basé sur l’intelligence artificielle, capable d’identifier, lors d’une intervention chirurgicale, les zones du cerveau impliquées dans le traitement émotionnel, lui permettant d’ajuster son travail de manière précise et personnalisée.

-Est-ce vrai que le cerveau ne fait pas mal ?

-Le cerveau lui-même ne possède pas de récepteurs de douleur. Vous pouvez toucher, stimuler ou même opérer à l’intérieur du cerveau et le patient ne le ressentira pas. Cela nous permet d’effectuer des chirurgies cérébrales avec des patients éveillés ; De cette façon, nous pouvons surveiller ses fonctions en temps réel. C’est comme si vous pénétriez dans une pièce sombre et trébuchiez sur tout ou, au contraire, allumiez la lumière et vous déplaciez sans provoquer de désastre. Nous opérons avec le patient éveillé pour allumer cette « lumière » et garantir que nous n’endommageons pas les fonctions critiques. Pendant l’opération, nous parlons au patient, lui posons des questions ou lui demandons d’effectuer certaines tâches pour nous assurer que nous n’affectons pas des domaines essentiels. Nous disposons d’une sorte de « baguette magique », un stimulateur basse fréquence que nous utilisons pendant l’opération. Nous appliquons un petit choc à différents points du cerveau et si le patient échoue dans une tâche, nous savons que nous avons touché une zone critique. Nous l’étiquetons et le respectons pendant l’opération. Chaque patient perçoit les émotions différemment. Nous adaptons le test à chaque personne la veille de l’intervention chirurgicale. Lorsque nous appliquons un stimulus électrique à une partie du cerveau, nous inhibons temporairement sa fonction. Si la zone est essentielle à ce que fait le patient, celui-ci ne sera pas en mesure d’accomplir la tâche. De cette façon, nous savons quels domaines nous devons éviter et sur lesquels nous pouvons intervenir.

-La chirurgie éveillée en neurochirurgie existait déjà, quelles nouveautés votre technique intègre-t-elle ?

-La chirurgie du patient éveillé trouve ses origines dans la troisième ou quatrième décennie du siècle dernier, notamment pour traiter le langage et la parole. Ce qui a changé, c’est que depuis le début des années 2000, nous avons commencé à appliquer cette technique à des fonctions cognitives plus complexes telles que l’attention, la personnalité, le comportement et les émotions. Avec mon mentor, le professeur Hugues Duffaunous avons développé un test en phase de validation qui nous aide à identifier les points critiques du cerveau pour reconnaître les émotions. Nous utilisons l’apprentissage automatique pour créer un avatar qui présente des émotions tout en stimulant le cerveau. Si le patient ne peut pas reconnaître l’émotion dans une zone spécifique, nous savons que cette zone est critique.

-Quel type de tâches demandez-vous aux patients d’effectuer lors de ces chirurgies ?

-Cela dépend de la fonction que l’on veut conserver. Dans certaines interventions chirurgicales, nous leur demandons de parler, de répéter des mots ou même de reconnaître des émotions. Nous validons actuellement un test d’émotion, dans lequel nous montrons des avatars qui représentent différentes émotions, comme la mélancolie ou la joie. Si nous stimulons une zone du cerveau responsable de la reconnaissance des émotions et que le patient ne parvient pas à l’identifier dans l’avatar, nous savons que nous avons trouvé une partie cruciale de ce réseau neuronal. C’est fascinant car ce n’est pas que l’émotion vit à ce point, mais ce point fait partie du circuit qui gère l’empathie et la perception émotionnelle.

-Dans votre livre « Dis-moi ce que tu ressens » tu mentionnes que certains patients sont repartis avec des séquelles émotionnelles. Pourraient-ils être évités maintenant ?

-La situation ne peut être inversée une fois que la personnalité a été affectée, mais elle peut être évitée. Nous avons maintenant publié un article contenant des recommandations sur les phases chirurgicales essentielles pour préserver la connectivité cérébrale liée à la personnalité, aux émotions, au comportement et à la planification. Nous essayons d’opérer avec la « lumière allumée », c’est-à-dire avec le patient éveillé, pour voir quelles zones nous devons éviter d’affecter.

-Pendant l’intervention chirurgicale, les émotions du patient peuvent-elles changer et se localiser dans d’autres zones du cerveau ?

-La neuroplasticité, ou la capacité du cerveau à se réorganiser, met du temps à se manifester. Nous ne constatons pas ce changement immédiat lors de l’intervention chirurgicale, bien qu’il soit possible lors d’opérations répétées, lorsque la tumeur repousse après quelques années.

-Donc, chaque patient a une « carte cérébrale » différente ?

-Exactement. Le cerveau est comme un réseau électrique qui se reconfigure constamment. Ce n’est pas statique ; Cela change avec le temps et les expériences. Ce qui chez un patient peut se trouver dans une zone, chez un autre peut se trouver dans une autre. Même chez une même personne, au fil des années, ces réseaux peuvent se réorganiser.

-Ils vous appellent de divers hôpitaux pour collaborer à des chirurgies complexes.

-Oui, je suis souvent contacté par des collègues de différentes parties du monde lorsqu’ils ont des cas complexes. C’est un grand privilège de pouvoir aider dans ces cas-là. Nous avons opéré dans plus de douze pays, mais pour valider la technique en tant que telle, nous avons besoin de plus de cas.

-Yolanda a été la première personne à opérer avec cette méthode, comment l’a-t-elle vécue ?

-C’était un mélange d’émotions. J’étais face à un cas complexe et à une personne qui souhaitait conserver son essence, ses émotions et prendre soin de sa famille. La responsabilité était énorme, mais tout s’est bien passé.

-Pourriez-vous dire que votre technique est la neurochirurgie du 21ème siècle ?

-Je ne sais pas si nous sommes au 21ème siècle, mais je sais que c’est mon projet de vie et nous aidons beaucoup de personnes.



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