L’idylle d’une maison unifamiliale s’est envolée, le travailleur québécois moyen est aujourd’hui contraint de rester locataire. On est loin de penser à s’acheter une “p’tite maison pas chère” quand on arrive à peine à payer le loyer.
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Un couple qui gagne 90 000 $ par année — revenu médian des familles au Québec après impôt — ne devrait pas payer plus que 2245 $ par mois pour sa maison. Ce critère d’abordabilité de 30 % est utilisé depuis 1986 par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).
C’est à peu près ce que coûte par mois une maison achetée 400 000 $ et financée sur 25 ans à 5,19 % d’intérêt. Pour ça, il faut avoir mis 20 % de mise de fonds, soit 80 000 $.
Les plus chanceux vont utiliser le régime d’accession à la propriété (RAP). Chaque membre du couple retire alors jusqu’à 35 000 $ de ses REER pour le “cash down”.
Il reste 10 000 $ à trouver, en plus de payer le notaire, le déménagement et la taxe de bienvenue. Et si le 2245 $ par mois inclut les taxes foncières et scolaires, il faut ajouter le prix des assurances, et, parfois, les frais de condo.
La maison pas chère est morte
C’est la moitié du Québec qui habite dans la grande région de Montréal, où les maisons à 400 000 $ n’existent plus.
“Sur la Rive-Nord, l’entrée de gamme est passée de 450 000 $ à 550 000 $”, indique la directrice de l’agence RE/MAX D’ICI, Mélissa Lampron, dont la majorité des 3500 transactions par année ont lieu dans le 450 au nord de l’île de Montréal.
Une maison vendue 449 000 $ le mois dernier dans ce coin-là a fait l’objet de 21 promesses d’achat, raconte la courtière devenue patronne. Les acheteurs doivent redoubler d’ingéniosité s’ils veulent mettre la main sur la perle rare.
“L’acheteur de demain va devoir s’éduquer à trouver des solutions et à être créatif dans son mode d’acquisition”, avertit Mélissa Lampron.
Capitaux avancés par les parents de leur vivant, maison intergénérationnelle, trois individus au capital : il faut se mettre en mode solution, dit-elle.
Prêt à reculer?
Il faut aussi se mettre en mode éloignement. Car plus les prix montent, plus les maisons abordables sont loin.
Des 2358 maisons unifamiliales affichées sur Centris sur l’île de Montréal actuellement, 60 sont à 400 000 $ et moins, soit 3%.
C’est 70 % au Saguenay-Lac-St-Jean, 67 % en Abitibi-Témiscamingue, 51 % dans le Centre-du-Québec, 24 % dans Lanaudière, 16 % dans les Laurentides, 12 % en Montérégie et 9 % sur la Rive-Nord de Montréal.
L’endroit infernal
Toutes les familles qui font partie des 20 offres sur 21 refusées par le client de l’agence de Mélissa Lampron doivent se résoudre à rester locataires.
Mais même là, le loyer augmente. Ceux qui restent locataires créent une pression sur le marché, on trouve moins d’appartements à louer.
“On voit des loyers qui passent de 1400 $ à 1800 $ par mois sans que personne ne s’y oppose”, disait une personnalité du milieu, en mai 2023. Maria Vasquez, la directrice générale du Comité logement Saint-Laurent, à Montréal, traite des cas comme ça tous les jours.
Les gens ne connaissent pas leurs droits, mais certains préfèrent encaisser la hausse plutôt que de se risquer à trouver un nouveau loyer.
Elle est bien placée pour constater que la location n’est plus un état transitoire vers le haut de la pyramide, mais un réel mode de vie.
Avec toute l’insécurité liée au risque d’éviction qu’implique cette réalité.
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