Le révolutionnaire du football suisse est décédé à l’âge de 101 ans

Le révolutionnaire du football suisse est décédé à l’âge de 101 ans

2024-01-24 13:47:49

Guhl a fondé à Sion le premier centre de football pour jeunes de Suisse. Et j’ai écrit des essais et des poèmes presque jusqu’à la fin. Il reste néanmoins inconnu de beaucoup.

Jacques Guhl en 1959 à l’endroit où il se trouvait presque toujours : sur l’Ancien Tribune, le terrain de football du centre de Sion, où s’entraînent encore aujourd’hui les juniors.

Philippe Schmid / Valais – Médiathèque de Martigny

Dans les années 1980 et 1990, le canton périphérique du Valais assurait la moitié de l’équipe nationale de football. Fernand Luisier, Dominique Cina, Jean-Paul Brigger, Charly In-Albon, Georges Bregy, Alain Geiger, Marco Pascolo, Ivan Quentin, Alexandre Rey, Christophe Bonvin, Blaise Piffaretti, Sébastien Fournier, Raphael Wicky : c’étaient des joueurs avec du charisme et un prononcé rage de vaincre, cette volonté absolue de gagner. Surtout, ces joueurs étaient très bien entraînés techniquement et tactiquement.

Les bases de la carrière de ces joueurs, d’une concentration de footballeurs valaisans de haut niveau qui n’a plus jamais été atteinte, ont été posées par un homme décrit par les plus hauts responsables politiques du pays comme le “penseur du football suisse”: Jacques Guhl, entraîneur , acteur, penseur, poète . Et Monsieur.

En 1957, le FC Sion est promu en Ligue nationale B avec le joueur-entraîneur Guhl. Il a mis l’accent sur l’inconnu : jeux de passes courtes et entraînements orientés jeu, répartition des espaces, pressing, changements de position constants. Durant ces années, Guhl fonde l’entreprise à Sion centre de formation, le premier centre de football pour jeunes en Suisse. Il a élevé le football valaisan à un nouveau statut : celui de leçon de vie pour les jeunes, de valeur ajoutée pour la société. Si le FC Sion deviendra plus tard une identité pour le canton bilingue, c’est avant tout grâce à Jacques Guhl.

Son modèle a été copié dans tout le pays et même en France

La nouvelle des succès de Guhl s’est répandue. En 1964, il est nommé entraîneur de l’équipe nationale qualifiée pour la Coupe du monde 1966 en Angleterre. Guhl voulait repenser le football suisse et le système associatif et ouvrir la voie à l’avenir; il envisageait déjà la Coupe du monde 1970 au Mexique. Mais le puissant fonctionnaire Ernst Thommen souhaitait un succès à court terme. Guhl revient en Valais, il est amer, mais n’a qu’un objectif : promouvoir les jeunes talents valaisans.

Pendant des années, les jeunes équipes du FC Sion étaient censées être les meilleures de Suisse. Le modèle du centre de formation de Guhl a été copié dans tout le pays et même en France. Bientôt, le FC Sion remporta une finale de coupe après l’autre.

Le célèbre officiel du football Hansruedi Hasler a déclaré un jour que le succès des footballeurs suisses au cours des vingt dernières années, avec d’innombrables participations aux Coupes du monde et aux Championnats d’Europe, était dû au travail de Guhl. « À l’époque, il pensait à des choses dont les autres ignoraient l’existence. »

Guhl, Hasler et l’intellectuel et entraîneur du football Daniel Jeandupeux s’asseyaient parfois à Macolin avec un verre de vin rouge et réfléchissaient au football, à son développement et à ses implications sociales. Guhl aimait beaucoup ces rencontres.

Il a appris très tôt à s’affirmer – et a consacré son temps libre à Max Frisch.

Jacques Guhl a grandi en Algérie ; son père dirigeait la construction d’usines de bière et sa mère jouait au théâtre. Lorsqu’il a sept ans, la famille revient à Vaud. Peu de temps après, son père est victime d’un accident vasculaire cérébral et reste handicapé. Jacques Guhl apprend très tôt à s’affirmer. À l’âge de dix ans, il s’entraîne pour la première fois au FC Lausanne-Sports. Après avoir terminé ses études, il fait un apprentissage de dessinateur. À l’âge de 20 ans, il joue dans l’équipe première de Lausanne.

Guhl était un meneur de jeu doté de solides compétences en finition, mais un peu lent. En 1939, il dut s’installer dans le cadre de la mobilisation ; le jeu fut interrompu à cause de la guerre. Guhl occupait son temps libre en lisant, de préférence Max Frisch, mais aussi Camus, Neruda, Heidegger, Sartre. Puis il a commencé à écrire lui-même.

Après la guerre, Guhl publie ses premiers livres et volumes de poésie et rejoint le FC Malley. A Lausanne, il dirige l’association littéraire Société de Belles-Lettres et fonde le Théâtre de Faux-Nez. Le jour, il jouait au football, le soir, il jouait au théâtre ou faisait de la comédie. “Une dualité des plus belles choses”, a déclaré Guhl, qui a toujours été décrié comme étant de gauche mais qui n’a jamais fait de politique. Qui voulait juste être un révolutionnaire du football. Et était.

À l’âge de 35 ans, Guhl a reçu des offres pour travailler comme joueur-entraîneur. Il est allé au FC Sion en Valais car les Valaisiens étaient les plus proches de lui militairement. «Les Genevois discutaient, les Vaudois chantaient, les Jura dormaient», dit Guhl, «mais les Valaisans avaient du cœur et des mains. C’étaient des ouvriers. »

Comme l’antithèse du FC Sion moderne et du président Christian Constantin

Rétrospectivement, Guhl apparaît comme l’antithèse du FC Sion moderne, du président Christian Constantin et de sa politique de gaspillage et d’humiliation du capital humain. Guhl a toujours pensé que deux ou trois joueurs extérieurs pouvaient s’en charger. Mais avant tout, une équipe doit incarner les particularités de son territoire pour se créer une identité et en tirer sa force. Et pour lier le public à vous.

Guhl est resté pendant de nombreuses années entraîneur des jeunes à Sion et a jeté un regard critique sur la formation des garçons. C’était trop strict, trop schématique pour lui. Il a déclaré : « Dire à un enfant de cinq ans où courir ou couvrir un adversaire, c’est comme dire aux nuages ​​où se déplacer. »

Il épousa plus tard Marie Bonvin, la fille du grand négociant valaisan Charles Bonvin. Ils vivaient dans un bel appartement ancien à Sion vieille ville. Ils habitaient au dernier étage, à 70 marches de la rue. Même dans sa vieillesse, Guhl les gérait deux fois par jour. Ce n’est que plus tard qu’il a emménagé dans une maison de retraite.

Presque jusqu’à la fin, Guhl écrivit des essais et des poèmes, prit des notes et lisa le journal. Il aimait les promenades et quel que soit l’itinéraire qu’il empruntait, il le conduisait généralement à l’Ancien Stand, le terrain de football du centre de Sion, où s’entraînent encore aujourd’hui les juniors. Et là où tout a commencé.

Jacques Guhl est décédé samedi dernier à l’âge de 101 ans. Il laisse derrière lui sa fille Agnès, artiste. Et un morceau de l’histoire du football suisse.




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