L’écart de croissance entre les États-Unis et l’Europe : Une analyse approfondie

L’écart de croissance entre les États-Unis et l’Europe : Une analyse approfondie

La croissance insolente et étonnante des États-Unis au troisième trimestre nous le rappelle. Entre l’Europe et les États-Unis, c’est une histoire de décrochage qui n’en finit pas depuis le milieu des années 90. Un dernier point ne fait pas une tendance, on le sait. Mais si l’on prend du recul, pour remonter juste avant la crise sanitaire, la croissance américaine atteint maintenant un rythme annuel de 1,9 %, tandis que celle de la zone euro demeure inférieure à 1 %. Ce point d’écart persiste depuis le milieu des années 90. Résultat, le poids économique de la zone euro ne cesse de diminuer.

L’impact décisif de la démographie

La démographie joue, en première analyse, un rôle décisif dans ce décrochage. Plus de la moitié de l’écart de croissance est imputable, a priori, à cet élément, qui agit positivement à la fois sur l’offre de main-d’œuvre et sur le dynamisme des débouchés domestiques. Mais son impact est bien plus profond. Le fossé démographique est en effet encore plus large lorsque l’on resserre l’analyse sur la population en âge de travailler. Le réservoir de main-d’œuvre croît de 0,8 % par an Outre-Atlantique, tandis qu’il stagne presque en Europe. Facteur de freinage supplémentaire donc, aggravé par le vieillissement plus avancé de la population active de ce côté-ci de l’Atlantique. En résumé, vu sous cet angle, le handicap démographique européen expliquerait trois quarts du problème.

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Les multiples avantages de l’économie américaine
Outre la démographie, l’économie américaine dispose d’une multitude d’avantages bien identifiés, justifiant son ascendant en termes de croissance sur la vieille Europe :
• la force du dollar, qui lui permet de mener des politiques de soutien budgétaire bien plus amples pour amortir les crises ;
• un degré plus élevé d’unification de son marché domestique, à l’origine d’effets d’échelle supérieurs à ceux de l’Europe ;
• un leadership technologique, à la source d’une rente informationnelle et financière ;
• la profondeur et la liquidité de ses marchés d’actifs ;
• et son accès à des énergies moins coûteuses…

La démographie ne participe certes plus avec la même intensité à l’écart aujourd’hui. En revanche, la guerre a accru l’avantage énergétique relatif des États-Unis, alors que la locomotive industrielle allemande a vu, au contraire, voler en éclats l’avantage qu’elle s’était bâtie patiemment. L’impulsion budgétaire américaine, de par son ampleur exceptionnelle et son étirement dans le temps, participe aussi très largement au creusement de l’écart au cours de ces deux dernières années. À cela, s’ajoutent les comportements de désépargne des ménages américains qui renforcent le moteur de la consommation à court terme.

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Générer d’importants gains de productivité dans les services : la vraie force des USA
On peut s’étonner que ces divers éléments ne jouent finalement que marginalement. En vérité, le focus sur la démographie tend à minorer l’avantage structurel américain. Car la démographie déclinante européenne n’a pas eu la portée contraignante que l’on pourrait suspecter. La mobilisation de la population en âge de travailler s’est en effet considérablement accrue depuis les années 2000 en zone euro, comme en témoigne la hausse des taux d’activité et d’emploi, dans le sillage des réformes de libéralisation et de baisse de coût du travail peu qualifié. L’Europe a donc compensé son inertie démographique par un mouvement de rattrapage des États-Unis en matière d’activation de sa population en âge de travailler. Résultat, depuis 1995, l’emploi s’est accru au même rythme de part et d’autre de l’Atlantique. Et depuis 2019, la croissance de l’emploi de la zone euro est même supérieure à celle des États-Unis.

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Si l’on se concentre sur cette décomposition de la croissance, c’est la productivité par actif occupé qui expliquerait intégralement le différentiel de croissance entre les deux espaces économiques. Plus précisément, ce qui singularise les États-Unis, c’est leur capacité à générer des gains de productivité dans les services. Que suggère ce constat ? Que l’Europe est encore dans une vieille logique de déversement de ses emplois industriels sur petits jobs de services dégradés à faible valeur ajoutée. Tandis que les États-Unis, autrefois temple de ces emplois, sont maintenant entrés dans une phase d’automatisation / optimisation de ces services. Ils ne sont pas seulement producteurs mais aussi meilleurs utilisateurs des technologies numériques.

Un écart de productivité qui va de pair avec une appréciation du dollar de plus de 35 % depuis 2008. Le décrochage en volume se double d’un décrochage en valeur, amplifié par le change. Cela s’appelle un appauvrissement… Les touristes américains en Europe, au pouvoir d’achat dopé, le savent bien, et il est considérable depuis 2008.
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