Les maladies cardiovasculaires chez les femmes : les mystères de la dissection spontanée de l’artère coronaire et ses implications en matière de prévention

Les maladies cardiovasculaires chez les femmes : les mystères de la dissection spontanée de l’artère coronaire et ses implications en matière de prévention

On l’oublie souvent: les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de décès chez les femmes. En effet, plus de la moitié des victimes de ce type de maladies sont des femmes. Dans le cas de la dissection spontanée de l’artère coronaire, une forme particulière d’infarctus, ce pourcentage atteint des proportions vertigineuses, puisque 9 malades sur 10 sont des femmes.

Directrice de recherche à l’Inserm, Nabila Bouatia-Naji a coordonné une étude internationale au Paris centre de recherche cardiovasculaire (PARCC), qui a permis d’identifier plusieurs facteurs génétiques associés à un risque plus élevé d’être touchées par la SCAD. Elle nous présente les résultats de ces travaux et leurs implications en termes de prévention.

The Conversation: Tout d’abord, qu’est-ce que la dissection spontanée de l’artère coronaire, ou SCAD?

Nabila Bouatia-Naji: Cette maladie imprévisible touche principalement des patientes jeunes. En effet, dans 90% des cas, la SCAD affecte des femmes. Sans aucun signe précurseur, leurs artères se déchirent soudainement, formant un hématome qui peut entraîner un infarctus dont l’issue peut être fatale.

Ce qui est surprenant, c’est que les patientes ne correspondent pas au tableau clinique classique des infarctus. La SCAD se produit principalement chez des femmes plutôt jeunes. Dans la cohorte française que nous avons étudiée, l’âge moyen des patientes était d’environ 44 ans, mais certaines étaient dans la vingtaine, d’autres dans la trentaine, la cinquantaine, etc.

Un autre élément atypique est que ces femmes ne semblent pas présenter de facteur de risque particulier. Leurs taux de cholestérol sont normaux, elles pensent avoir une bonne hygiène de vie, sont souvent sportives et ont une alimentation équilibrée. Pourtant, elles ont fait un infarctus, un événement cardiaque qui survient généralement après 70 ans.

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TC: La SCAD est-elle fréquente? Est-ce qu’elle survient suite à un événement particulier?

NB-N: Les estimations des cardiologues analysant les infarctus survenus chez les femmes de moins de 60 ans sans facteur de risque suggèrent que 30% des cas pourraient être dus à la SCAD. Globalement, cette pathologie représenterait de 4 à 5% des cas d’infarctus, tous âges confondus, hommes et femmes.

On soupçonne que le stress ou la survenue d’un événement stressant peuvent déclencher la SCAD. Cependant, nous manquons de données épidémiologiques. La maladie est mal connue et sous-diagnostiquée, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, les infarctus féminins sont encore moins bien détectés et pris en charge que ceux des hommes, notamment parce que leurs symptômes peuvent être différents chez les femmes, ce qui peut les confondre avec d’autres problèmes.

Une autre raison de la sous-estimation de la SCAD est que l’infarctus qu’elle provoque est généralement considéré comme un infarctus “normal”. Pour faire la différence, il faut réaliser un examen d’imagerie appelé angiogramme, qui permet de visualiser les veines et les artères.

TC: Que révèle cet examen?

NB-N: Dans le cas d’un infarctus dû à une SCAD, l’artère n’a pas été obstruée par le détachement d’une plaque d’athérome, mais s’est déchirée, provoquant une “dissection”.

La SCAD survient lorsque se forme un hématome dans la paroi de l’artère et qu’il ne se résorbe pas rapidement. Cet hématome peut obstruer la lumière de l’artère et/ou provoquer une déchirure spontanée de la paroi, ce qui entraîne l’infarctus.

TC: Vos dernières recherches ont révélé que le risque de SCAD dépend de variations présentes dans de nombreuses régions du génome. Pouvez-vous nous expliquer vos résultats?

NB-N: Nous avons analysé l’ADN de patientes victimes de SCAD et l’avons comparé à celui de personnes en bonne santé pour détecter d’éventuelles différences.

L’étude internationale que nous avons coordonnée intègre huit études indépendantes. Elle a permis d’analyser l’ADN de près de 1900 patientes et de le comparer à celui d’environ 9300 témoins. Cela nous a permis d’atteindre une puissance analytique inédite dans le cadre de la SCAD.

TC: Cette approche a permis d’identifier plusieurs variants génétiques associés à un risque plus élevé de SCAD.

NB-N: Oui. Nous avons découvert que cette maladie est contrôlée par un très grand nombre de régions du génome. À chacune de ces régions, il existe une variabilité dans la séquence des bases qui constituent l’ADN. Un individu peut avoir une version de cette séquence, tandis qu’un autre aura une version légèrement différente.

Tous les loci que nous avons identifiés comme étant associés à un risque plus élevé de SCAD sont statistiquement plus présents chez les patientes qui ont fait une SCAD. Parmi tous ces loci, nous avons étudié en détail 16 d’entre eux, qui représentent un quart de tous les facteurs génétiques impliqués dans la SCAD.

TC: Ces loci ont-ils déjà été liés à d’autres pathologies?

NB-N: Oui, la plupart d’entre eux ont déjà été impliqués dans d’autres maladies, telles que les maladies cérébrovasculaires et les infarctus du myocarde classiques. La plupart de ces loci sont impliqués dans la production de molécules présentes dans la matrice extracellulaire, qui assure la solidité de l’artère. Cela semble cohérent avec les observations, puisque la
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