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Les Mots du Q : La révolution sexuelle des années 2020 selon Camille Aumont Carnel

Les Mots du Q : La révolution sexuelle des années 2020 selon Camille Aumont Carnel

L’influenceuse féministe révolutionne la langue pour la révolution sexuelle des années 2020.

« Et si on réinventait la langue pour faire bouger les sexualités ? » C’est avec cette interrogation qu’est présenté les Mots du Q, le dernier ouvrage aussi ludique que pédagogique de Camille Aumont Carnel, édité par le Robert (qui lance ainsi sa collection « Dire, c’est agir »). Posée ainsi, l’entreprise ne semble pas bien compliquée à l’ère où les réseaux sociaux se sont emparés de la question des sexualités et, mieux encore, du plaisir féminin. Or, avec son lexique, Camille Aumont Carnel, 26 ans, va bien au-delà du langage existant : elle agrémente son propos de variations linguistiques en confrontant le français à l’anglais ou l’espagnol – elle a grandi dans plusieurs pays comme le Niger, Madagascar ou l’Espagne –, de thèmes sociétaux tels que le patriarcat, le féminisme intersectionnel ou l’écriture inclusive.

« Mettre des mots sur des réalités »

« J’ai un rapport à la langue très particulier », explique-t-elle à Libération. « J’ai grandi avec la langue espagnole où le vulgaire, le juron, a été pensé pour être tant masculin que féminin, ce qui n’est pas le cas en français. » Aussi, en plus de décortiquer et jouer avec les idiomes, elle liste des expressions vieillottes ou usitées (« avoir la trique » ou « avoir la chatte en feu ») ou intègre des mots-valises inventés, traduit des phénomènes à sa façon (« la marche des jambes tremblotantes » après l’orgasme, « faire une Pollock » soit éclabousser les murs en enlevant son tampon brusquement, « mouiller de la bite », le « post orgasm glow », « se faire limer ou poncer le clito », etc.). Les mots qui manquent sont, d’ailleurs, les plus enthousiasmants. On y retrouve des termes tels qu’ « orgasmer », « en avoir rien à mouiller » ou « télémasturber » pour désigner la masturbation en pleine journée de télétravail. « Je m’autorise à mettre des mots sur des réalités qu’il faut absolument rendre visibles linguistiquement parlant » indique Camille Aumont Carnel. Et avec ça, la pop culture n’est pas en reste (on pense d’emblée au phénomène qu’est la chanteuse Aya Nakamura dont l’autrice reprend le fameux « en catchana » qui signifie en levrette).

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Celle qui est ambassadrice de l’appli de rencontres amoureuses Bumble ou a collaboré avec Etam pour leur ligne de culottes menstruelles, fait partie de ces personnes qui, sur les réseaux sociaux, ont ouvert le champ à une nouvelle forme de liberté de parole sur la sexualité. En 2018, elle crée son compte Instagram, @jemenbatsleclito, suivi aujourd’hui par 686 000 personnes. « J’appartiens à cette vague féministe caractérisée par l’usage des réseaux sociaux comme outils d’organisation et de communication. Tout y tient du rapport à la langue, du jeu de mots. Je pense à des collectifs et comptes comme Gang du Clito, Clit Revolution, Merci Beaucul, Lecul Nu, etc. Je m’inscris absolument, en France, dans cette révolution sexuelle post-#MeToo à coups de hashtags. » Et puis, est venu le temps de s’affranchir un brin de la sphère virtuelle – où sévit la censure (shadow ban) quand il s’agit de contenus dédiés au sexe – pour se tourner vers d’autres médiums : livres, podcasts, interventions télé…

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« Provoquer la prochaine révolution sexuelle »

On note ainsi son passage dans les programmes le Magazine de la santé sur France 5 – de septembre à juin 2022 – et Quelle Epoque ! sur France 2 avec la chronique « Sex Club ». « La télévision est, pour moi, un moyen de pouvoir m’adresser aux plus de 40 ans, moins présents sur Instagram » précise la jeune femme. On ajoute une apparition sur la scène du théâtre L’Européen, à Paris, en octobre 2021, où elle a échangé avec le public sur les grandes questions du sexe. Et après deux premiers ouvrages (Je m’en bas le clito en 2019 chez Kiwi puis #AdoSexo en 2022 chez Albin Michel), elle en remet donc une couche avec ce dictionnaire où son propre vécu (« la sex life de Camille ») se mêle aux analyses de la sociolinguiste Noémie Marignier (« le point de vue de Noémie »).

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« Les Mots du Q me permettent d’institutionnaliser la façon dont toute une génération parle de sexualité » explique encore Camille Aumont Carnel. Et d’ajouter (voire de clamer) : « Avec cet ouvrage, je cherche aussi à provoquer la prochaine révolution sexuelle, plutôt que d’être dans l’attente de son arrivée. » Elle y évoque aussi astrologie et mythologies, cite Gloria Steinem ou Bell Hooks, et se penche un brin sur l’amour. « Tomber amoureuse » ? Sur cette entrée qu’il lui a été difficile de rédiger, elle glisse : « Je préfère qu’on retienne la façon dont on le dit en espagnol, amoureux, parce que l’amour ne devrait pas nous faire tomber ; ne devrait pas être, d’emblée, quelque chose de douloureux. »

Camille Aumont Carnel, les Mots du Q, Manifeste joyeux des sexualités Le Robert, 400 pp., 19,90 €.
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