2024-03-04 22:45:33
Plus de 4 000 prisonniers ont été « libérés » par des gangs qui veulent renverser le Premier ministre Ariel. Témoignages : « Des écoles fermées, des vols annulés, des gens meurent dans la rue à cause de balles perdues »
Haïti est tombé dans un trou noir d’anarchie et de violence. Les fusillades se poursuivent dans les rues entre gangs, qui contrôlent désormais une grande partie de la capitale. Des milliers de prisonniers se sont évadés des deux principaux pénitenciers du pays, celui de la capitale Port-au-Prince et celui de la Croix des Bouquets. “Libéré” des bandes armées qui ont attaqué les pénitenciers et les casernes de police, également avec l’aide de drones. Le nombre de décès est inconnu mais la situation, comme l’a confirmé l’Italienne Flavia Maurello, représentante du Fondation AVSI en Haïti, “C’est terrifiant.” Les commerces, les écoles, les banques sont fermés. «Les habitants sont en fait prisonniers des gangs des bidonvilles ou sont contraints de fuir leurs maisons, déplacés sur leurs propres terres», fait écho Maria Vittoria Rava de l’association Fondation Francesca Rava. L’état d’urgence a été décrété pour trois jours, avec un couvre-feu de 18h à 5h du matin. Toutes les compagnies aériennes ont suspendu leurs vols à destination et en provenance d’Haïti. Et le Premier ministre par intérim Ariel Henry, qui est au Kenya pour signer un accord prévoyant l’envoi de 1 000 soldats d’une force de sécurité sous l’égide de l’ONU, risque de ne jamais pouvoir rentrer chez lui.
L’un des dirigeants, Jimmy surnommé “le barbecue”
C’est probablement l’un des objectifs des groupes armés qui contrôlent désormais toute la partie basse de Port-au-Prince. L’un de leurs dirigeants, Jimmy Cherizier, surnommé le “Barbecue”, avait annoncé une offensive pour destituer Henry, qui devait quitter ses fonctions début février, et avait convoqué des élections uniquement pour 2025. Le Premier ministre par intérim est considéré par un une partie de la population haïtienne, et une élite puissante, comme « usurpateur » après l’assassinat en 2021 du président Jovenel Moise. Les présumés tueurs colombiens de cet assassinat ainsi que l’ancien président de la Chambre des députés, considéré comme l’instigateur avec la veuve de Moise, ont refusé de se joindre à l’évasion et ont été transférés dans une autre prison, rapporte la police.
«Les prisons ont été littéralement évacuées par des bandes armées, plus de 4000 prisonniers se sont évadés. Celui de Port-au-Prince est presque vide, moins de 10% des prisonniers sont restés derrière les barreaux, ceux qui n’avaient nulle part où aller”, rapporte Maurello. «Il s’agissait sans aucun doute d’une attaque planifiée et financée. Il est difficile de dire par qui, mais il est clair que ces attaques ont des racines politiques qui renforcent le pouvoir et l’instabilité des gangs. La plupart des commissariats ont été détruits dans la capitale et la police s’est repliée dans les académies en attendant de nouvelles attaques. »
Depuis le tremblement de terre dévastateur de 2010 en Haïti, aucun recensement n’a été réalisé, mais on estime que la grande majorité de la population vit dans la capitale, soit environ 10 millions de personnes. Ils sont tous barricadés chez eux, à l’exception des membres du gang qui érigent des barricades en pneus. AVSI a dû cesser ses activités dans les bidonvilles de la capitale. «Depuis 2004, nous offrons des services de base dans les quatre principaux bidonvilles, où l’État n’existe pas, dans des centres multifonctionnels destinés aux femmes, aux enfants et aux jeunes, mais pour le moment, ce n’est pas possible», conclut Maurello. “Même au Cap-Haïtien, au nord, il y a beaucoup de violence en ce moment.”
Les efforts de la Fondation Rava
Les deux hôpitaux de la Fondation Rava continuent de fonctionner, malgré mille difficultés. « La situation ici est très grave, une escalade de la violence, mais nous ne pouvons pas perdre force et espoir et nous continuons à apporter une aide médicale aux bidonvilles, à Cité Soleil, Carrefour Marrin et Carrefour Fourgy, et de l’eau et de la nourriture aux familles de réfugiés forcées. par les gangs à quitter leur domicile”, explique le père Rick Fréchette, directeur des projets de la Fondation en Haïti. La Fondation Rava lance un appel urgent pour l’achat de berceaux et de lits pour l’hôpital pédiatrique de Saint-Damien, qui soigne 80 000 enfants chaque année. “Nos médecins sont un exemple de courage, ils continuent à travailler, ils dorment ici pour ne pas affronter les tirs dans le noir”, déclare le Dr Pascale Gassanti, directrice de l’hôpital. “Nous sommes ici depuis 1987 et nous ne nous arrêterons pas si nous pouvons continuer à sauver quelques petites vies, même si les difficultés sont immenses.”
“Ils s’entretuent entre frères, Haïti est désormais un pays fantôme, où il est difficile de voir les gens marcher normalement dans les rues”, raconte Maria Vittoria Rava, qui revient tout juste d’une visite dans la capitale. «Depuis 25 ans, j’ai Haïti dans mon cœur, j’y ai passé de nombreux Noëls avec ma famille mais aujourd’hui je n’y emmènerais personne. Trop dangereux. Il est très facile de devenir la cible d’une balle volante. Le seul rempart, c’est de savoir que nous avons deux hôpitaux. Que nous devons pouvoir garder ouvert. »
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4 mars 2024 (modifié le 4 mars 2024 | 20h45)
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