La dernière fois qu’on a vu Ninho, c’était l’été dernier à Paléo. Sous sa capuche blanche, il livrait un spectacle assez peu inspiré mais peu importe: dans la poussière, la foule – avec une moyenne d’âge de 20 ans – reprenait Chef avec ferveur.
Ninho est incontestablement un chef car il domine le jeu. Avec son flow mélancolique, ses productions mélodiques et ses freestyles évoquant la difficulté des quartiers, l’artiste originaire de l’Essonne s’est imposé, en trois albums et des milliards de streams, comme l’une des étoiles filantes du rap francophone – le premier artiste français à avoir dépassé les 200 singles certifiés. “Même pas besoin de me présenter / Tu veux m’enlever mais je suis ancré”, résume-t-il dans Tu te connais, l’un des seize titres de son nouvel album, DANS (nom de Nest).
Si le single 25g présageait un ton sombre et sobre, le rappeur garde la recette qui l’a propulsé au sommet: alterner les gros kicks et le piano triste, la rue et l’introspection (“Ils disent que j’ai changé, non / J’ai juste quelques priorités”, glisse-t-il dans le déjà classique Grands Ensembles). On remarque également l’incursion de rythmes africains et de jolis featurings internationaux – Central Cee (qui lui répond sur le très efficace Eurostar) ou la chanteuse nigériane Ayra Starr. Une tracklist solide, où la mélancolie reste reine, dévoilée jeudi soir lors d’un show privé où les VIP étaient munis de sweat-shirts… connectés. On est un “jefe” ou on ne l’est pas. V. N.
Ninho, “NI” (JEFE Production)
Milky Chance, bat flegmatiques
Lorsque l’on énumère les groupes allemands qui ont explosé à grande échelle, on pense volontiers à Rammstein, Kraftwerk, Scorpions ou (soupir) Tokio Hotel. On oublie souvent l’une des révélations de ces dernières années: Milky Chance. Souvenez-vous de Stolen Dance, ce morceau mêlant des beats légers, des cordes ondulantes et un refrain légèrement éraillé qui a envahi les ondes en 2013. Derrière ce tube électro-pop à la fois calculé et enivrant, Philipp Dausch et Clemens Rehbein, deux amis originaires de Kassel – qui ont commencé à jouer ensemble dans la maison du premier lorsqu’ils étaient adolescents. Cette mélancolie entraînante, aux inspirations house et reggae, a fait mouche et les a propulsés sur les plus grandes scènes et dans toutes les playlists d’apéro.
Pas un feu de paille: alors qu’ils fêtent leurs 10 ans, Milky Chance continue d’entretenir la flamme en dévoilant leur quatrième album, Vivre dans une brume. Le single du même nom ne s’est pas perdu, fort de sa recette irrésistible que l’on pourrait appeler “clubbing flegmatique”. Le reste de l’album oscille également habilement entre danse et nonchalance, avec en prime quelques invitées (dont l’excellente Québécoise Charlotte Cardin) et aucune détour – ne manquez pas le groove bondissant de Comme un clown. V. N.
Milky Chance, “Vivre dans une brume” (Muggelig Records)
FlexFab & Ziller Bas, unis pour le meilleur
Mêmes vibrations hypnotiques, même énergie métissée: un an après Dans le cou!, voici déjà Dans le cou! 2. Depuis leur rencontre il y a quatre ans à Kilifi, FlexFab et Ziller Bas ne se quittent plus, et on ne s’en plaint pas. Dans ce nouvel album explosif, le producteur neuchâtelois et le rappeur kényan proposent 11 titres qui, en une trentaine de minutes, explorent une musique aux multiples influences, prouvant ainsi, à une époque où les débats sur la “réappropriation” peuvent être stériles, que l’art est fait pour circuler. Pour soutenir le flow puissant et sinueux du MC africain, FlexFab propose des instrus construites à partir de sons issus de musiques urbaines (électro, rap, trap) et africaines (rumba, afrobeats). Il en résulte une succession de morceaux courts et puissants taillés pour la scène, avec en toile de fond ce symbole fort d’une union artistique réussie entre deux continents que l’on oppose encore trop souvent. Stéphane Gobo
FlexFab & Ziller Bas, “Mugo! 2” (Musique NSK).
En concert le 8 juillet à Fleurier (Trouble A Music Festival), le 14 juillet à Bienne (Pod’Ring) et le 22 juillet à Nyon (Paléo).
Godflesh, grands dieux!
