« L’extractivisme » détruit la nature : pour y faire face, la Cop15 doit aller au-delà des simples cibles | Rosemary Collard et Jessica Dempsey

« L’extractivisme » détruit la nature : pour y faire face, la Cop15 doit aller au-delà des simples cibles |  Rosemary Collard et Jessica Dempsey

UNLors de la Cop biodiversité qui se déroule à Montréal, une grande attention sera portée sur une proposition de politique appelant à protéger 30 % des terres et des océans de la planète d’ici 2030, connue sous le nom de 30×30. Les aires protégées ont leur place pour faire face à la crise de la biodiversité, mais nous savons aussi qu’elles sont insuffisantes. Depuis les années 1970, ils ont augmenté quadruple à l’échelle mondiale, s’étendant à environ 17% de la planète, mais les taux d’extraction ont plus de triplé. Cette expansion incessante de la foresterie, de l’exploitation minière, de la monoculture et du développement des combustibles fossiles est un conducteur central de la perte de biodiversité. Mettre fin ou au moins réduire «l’extractivisme» doit être au centre de la Cop15.

L’extractivisme est plus que l’extraction. L’extraction est le retrait non préjudiciable de la matière de la nature et sa transformation en choses utiles aux humains. Extractivisme, terme né de la lutte et de la pensée anticoloniales dans les Amériques, est un mode d’accumulation basé sur l’hyper-extraction avec des bénéfices et des coûts disproportionnés : prélèvement massif et concentré de ressources principalement pour l’exportation, avec des bénéfices qui s’accumulent largement loin des sites d’extraction. Une estimation met le drain du sud au nord à un montant stupéfiant de 10 milliards de dollars (8 milliards de livres sterling) par an.

Pourtant, à travers toutes les lignes politiques et dans les pays du monde entier, l’histoire raconte que ces développements massifs nous apportent à tous le bien-être : des emplois qui mettent de la nourriture sur la table et des impôts qui financent l’éducation et les soins de santé. Là où nous vivons, en Colombie-Britannique, ne fait pas exception. Après avoir pris sa retraite de son poste de premier ministre de la province et répondu aux critiques concernant son bilan environnemental inégal, John Horgan résumait la philosophie dominante : « Nous continuerons à avoir des débats vigoureux sur l’exploitation forestière ancienne, sur le pétrole et le gaz, sur l’exploitation minière. Mais ce sont des éléments absolument essentiels pour aller de l’avant.

Absolument essentiel? C’est un choix de mots intéressant. L’extractivisme apporte des rentes de ressources et des recettes fiscales qui financent les services publics, tels que les écoles et les hôpitaux. Cela crée des emplois. C’est une grande partie de la double réflexion de Horgan pour ouvrir puis fermer le débat sur l’extraction. La perception de l’intérêt public, même inégalement réparti, maintient fermement l’extractivisme sur l’avenir, comme s’il ne pouvait pas être délogé, comme s’il finirait par s’arranger : plus d’extraction est ici une nécessité absolue pour permettre une autre, plus verte, plus sûre monde. Justin Trudeau a justifié l’achat d’un pipeline non rentable, épuisant les fonds publics et violant les droits des Autochtones en arguant qu’il était nécessaire pour une bonne politique climatique, en ce sens qu’il achetait de la bonne volonté pour une taxe sur le carbone.

L’extractivisme peut être lui-même robuste et durable, mais il est ne pas créer des conditions de vie robustes et durables pour tous. Cela crée une profonde insécurité et un danger extrême – vagues de chaleur, incendies, inondations – qui se sont tous produits en Colombie-Britannique en l’espace de six mois en 2021, causant au moins 619 décès. Une récente rapport a estimé les dommages à 10 à 17 milliards de dollars canadiens (6 à 10 milliards de livres sterling), soit 3 à 5 % du PIB de la province.

À l’échelle internationale, l’extractivisme est au cœur des coûts inégaux de la crise climatique, une question placée en tête de l’agenda climatique de la Cop27 par les peuples autochtones, les militants et les pays du Sud. Au-delà de cela, les sites d’extraction pollués dépossèdent les populations autochtones et locales, tandis que les minéraux, le bois et le pétrole circulent généralement ailleurs, enrichissant les actionnaires, les États et les PDG éloignés. Ces avantages et fardeaux de l’extractivisme reflètent les hiérarchies raciales forgées lors des rencontres coloniales et de l’esclavage, comme l’a récemment souligné l’ONU sur les droits de l’homme. rapport conclu.

Les aires protégées semblent être une solution directe évidente à la perte de biodiversité : il suffit de réserver des terres pour la nature. Mais de nombreuses organisations autochtones et de défense des droits de l’homme s’opposent au 30×30 en raison de son potentiel de « dévaster la vie des peuples autochtones » ; les aires protégées ne font pas non plus assez pour freiner l’extraction qui entraîne la perte de biodiversité.

Au lieu de cela, nous devons nous mettre au travail pour construire un monde où la santé, la sécurité et le bien-être ne sont pas liés à une extraction sans fin. La construction de ce monde doit être dirigée par ceux qui sont les plus touchés par l’extractivisme et informés par des siècles de luttes radicales en quête de transformation.

Au Canada, des idées importantes circulent sur le passage du PIB à des indicateurs de Bien-être économique défini par les Premières Nations. Il y a des appels à l’international redistribution et réparations avancées dans les débats sur le climat et la biodiversité pour atténuer l’extractivisme qui accompagne les niveaux élevés de pauvreté et d’endettement. Ces idées doivent passer des marges vers le centre – y compris à la Cop15 – où appels l’annulation et la restructuration de la dette doivent encore être convenues.

Ces actions peuvent ne pas sembler être des gains directs pour la biodiversité, mais elles sont essentielles pour briser l’étreinte de l’extractivisme et réparer une longue histoire d’exploitation coloniale et racialisée. L’emprise de l’extractivisme doit être relâchée si la Cop15 et l’action ultérieure des États vont accomplir quelque chose de significatif pour la biodiversité.

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