l’homme de glace trouve une voix – Corriere.it

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2024-03-04 21:23:09

De FÊTE D’ARIANNE

«De flèche et de givre» (Mondadori) : Piero Lotito imagine l’existence d’Ötzi, la momie de Similaun retrouvée à 5 300 ans dans un excellent état de conservation

Coucher de soleil de l’été 1991. Le 19 septembre, un couple de touristes allemands, Erika et Helmut Simon, en excursion dans la zone de Giogo di Tisa dans le Val Senales, à 3 210 mètres d’altitude, ont découvert un corps masculin émergeant de l’eau fondue du glacier. Les parfaites conditions de conservation du cadavre laissent dans un premier temps supposer qu’il s’agissait d’un alpiniste disparu. Suite à une observation plus attentive, grâce à la hache et aux vêtements, également presque intacts, on en déduit qu’il pourrait s’agir d’un corps très ancien, remontant à l’âge du cuivre. Renommé Ötzi, en raison du découverte fortuite dans la vallée de l’Ötzal, au pied du mont Similaunaujourd’hui la relique est conservée dans une chambre froide du Musée de Bolzano, afin de maintenir l’état exceptionnel préservé par la glace.


Les restes de l’homme, assassiné à l’âge de 46 ans, offre de nombreuses informations à ceux qui le visitent : 159 centimètres de hauteur, avec un poids spécifique de 13 kilos (de son vivant, il est déclaré avoir pesé 50), des vêtements et des chaussures en cuir qui l’identifient comme chasseur et des récipients en écorce de bouleau qui lui permettent à la localisation temporelle. Une découverte historico-archéologique qui permet de définir les us et coutumes de l’époque. Un simple outil de compréhension du passé, donc vidé de ce bagage émotionnel typique de l’être humain. Des émotions qui Piero Lotito lui permet d’émerger dans le roman De flèche et de givre (Mondadori).



Ötzi parle à la première personne, retraçant les étapes de sa vie et nourrissant le lecteur de ses souvenirs les plus intimes. De son enfance marquée par les enseignements sévères de son père Urd et l’affection de sa mère Meal, jusqu’à la peur de la mort qui se profile comme une ombre derrière lui. Très jeune, il fait l’expérience du deuil de la mort prématurée d’Urd, avec qui il partagera son destin. Il le retrouve personnellement, allongé dans la neige, après avoir été assassiné par derrière. Un avertissement sur l’épilogue qui l’attend. Une vie consacrée à la chasse, pour subvenir aux besoins de la famille, qu’ils mènent tous deux avec un analphabétisme émotionnel et une froideur glaciale, rejetant leurs affections. Cette glace qui déterminera sa condamnation : au malheur dans la vie et à la mort solitaire. Une relation conflictuelle, celle avec son père autoritaire, auquel il aspire pourtant tout au long du cycle de son existence, essayant de l’imiter et de le déjouer.

L’amitié adolescente avec Ief est poignante : d’abord par le sentiment de nostalgie dû à l’abandon, puis par le remords qui suit la trahison. Mais face aux intentions meurtrières de son ancien camarade de jeu à son égard, Ötzi se révèle capable de pitié. La découverte tardive du désir, à l’âge adulte, l’initie à la passion. Alesh, la femme qu’il aime et la femme d’Ief, cela nourrit aussi en lui cet instinct protecteur qu’il avait déjà éprouvé envers sa mère.

Le roman est le portrait d’un être humain controversé, imparfait, traversé de passions exagérées et parfois pécheresses, comme toute personne ordinaire.. Dès la mort de Meal, Ötzi goûte à la solitude due à l’insouciance de son propre village, qui le répudie et le contraint à l’exil. «Il était établi par l’héritage moral de notre village qu’à la mort de l’un, tous les autres se sentaient comme un seul corps. Mais cela ne valait que pour le salut par le feu : chacun continuerait alors à vivre comme toujours, en prenant soin seul de lui-même. » Un héritage contemporain, dicté par le même instinct de survie qui, bien qu’anachronique en apparence, est plus que jamais d’actualité. Un égoïsme sous-jacent qui trouve ses racines dansun homme loup hobbesien.

Un livre qui parle donc un langage universel, celui des sentiments, qui ébranlent l’âme de chacun, transcendant l’espace et le temps. Ötzi, poussé par le désespoir, fait face à une mort certaine pour sauver sa vie. Un oxymore qui paraît aujourd’hui peut-être trop familier et peu inquiétant. La montagne représente pour le protagoniste la voie de fuite, l’espoir et en même temps le piège, ce dont la mer est une métaphore pour de nombreux êtres humains. C’est le pouvoir de ce livre d’être intemporel, faisant de ceux vécus par l’homme des glaces des drames dans lesquels s’identifier.

4 mars 2024 (modifié le 4 mars 2024 | 19h23)



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