C’est une position de premier plan qui en dit long sur la place des cryptomonnaies dans l’économie mondiale de demain. Pour la première fois, l’Inde a été consacrée championne en termes d’adoption de ces nouvelles jetons numériques échangés sur les blockchains en 2023, selon le quatrième indice annuel réalisé par le cabinet Chainalysis, et ce, malgré le ralentissement mondial du marché des crypto. Le pays le plus peuplé au monde, avec ses 1,4 milliard d’habitants, a ainsi dépassé le Nigeria (2ème) et le Vietnam (premier l’année dernière).
« L’Inde est le pays qui adopte le plus de cryptomonnaies (…) ce qui est peut-être encore plus impressionnant, c’est qu’elle est devenue le deuxième plus grand marché au monde en termes de volume de transactions brutes estimées, dépassant ainsi plusieurs pays plus riches ». Cependant, en Inde, où une interdiction totale est imminente, la réglementation et la fiscalité entourant le secteur sont devenues prohibitives pour la détention ou le minage de crypto-actifs.
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Mais l’Inde est surtout le porte-parole d’un ensemble de pays émergents. « La région de l’Asie centrale, de l’Asie du Sud et de l’Océanie (CSAO) domine le haut du classement, avec six des dix premiers pays situés dans la région », note Global Crypto Adoption, qui a analysé les flux de cryptos sur Internet dans 154 pays (contre 146 l’année dernière). L’indice se concentre moins sur les volumes échangés que sur l’adoption par le plus grand nombre de personnes, qui investissent « la plus grande part de leur richesse dans les cryptomonnaies », selon cinq sous-indices. Plus précisément, le cabinet américain analyse la valeur reçue sur les plateformes d’échanges centralisées, décentralisées (DeFi), en pair-à-pair (P2P) et les petites dépenses transférées, pondérée par la parité de pouvoir d’achat (PPA) par habitant. « Notre indice prend en compte des centaines de millions de transactions et 13 milliards de visites sur le Web », précise le cabinet spécialisé dans les cryptos.
Malgré la prédominance des pays émergents qui se confirme une fois de plus, « l’adoption des cryptomonnaies à l’échelle mondiale est en baisse » cette année, constate Chainalysis.
Et cela peut s’expliquer ainsi : « bien qu’il y ait eu une nette reprise depuis le marasme de la fin 2022, au moment de l’effondrement de FTX, l’adoption par le grand public est encore loin de ses niveaux historiques les plus élevés ».
Des jeunes technophiles à faibles revenus
Cependant, Chainalysis note une exception marquante : « les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (RMI) » sont en tête de l’adoption. Cela signifie, selon la Banque mondiale qui se réfère au revenu national brut (RNB) par habitant pour classer les pays en fonction de leur niveau de richesse : les revenus annuels compris entre 1 086 et 4 255 dollars (1 010 et 3 950 euros). C’est le cas, par exemple, en Inde, au Nigeria et en Ukraine. En dessous se trouvent les pays aux revenus bruts annuels inférieurs à 1 000 euros, tels que l’Éthiopie, le Soudan et le Yémen. En d’autres termes, les cryptomonnaies prospèrent là où les populations sont pauvres, jeunes, technophiles et ont un accès, même limité, à Internet.
« Les pays à faible revenu sont souvent des pays en plein essor, avec des industries et des populations dynamiques et en croissance (…) 40 % de la population mondiale vit dans des pays à faible revenu, soit plus que dans toute autre catégorie de revenus », prévoit le cabinet d’études.
L’Ukraine et la Russie reculent par rapport à 2022
Après le trio de tête, les leaders de l’adoption sont donc l’Ukraine (qui recule toutefois de 3 places par rapport à 2022), et, via des plateformes centralisées, les Philippines, l’Indonésie, le Pakistan, le Brésil, la Thaïlande, la Chine, la Turquie et la Russie en guerre qui cherche à contourner les sanctions financières occidentales. Au Pakistan, « le pic le plus important a eu lieu au cours des 16 derniers mois, la valeur de la roupie étant passée de 178 PKR pour un dollar américain en janvier 2022 à 320 PKR en août », témoigne un jeune adepte des cryptos qui constate l’érosion de l’épargne traditionnelle.
« Le marché des actions et de la bourse s’est effondré. Et les gains que vous réalisez peuvent être effacés par l’inflation », explique un autre citoyen cité dans l’étude. « Les Pakistanais n’ont pas non plus le droit de détenir des devises étrangères en espèces – elles doivent être déposées dans une banque. Pour beaucoup, cela rend les cryptomonnaies, en particulier les stablecoins, indispensables », écrit Chainalysis.
En Europe, comme en 2022, le pays leader en termes d’adoption reste le Royaume-Uni. Il convient également de noter que, en termes de volumes de transactions, la part des institutions y est importante, contrairement aux petits commerces où l’adoption est encore lente.
Qu’en est-il de la France ?
Une étude sur l’adoption des cryptomonnaies réalisée par Chainalysis est publiée en plusieurs étapes. Le classement des pays européens ne devrait être connu qu’aux alentours du 16 octobre, selon le cabinet.
En 2022, 9,4% des Français détenaient des crypto-actifs, contre 8% en 2021, selon une autre étude sur l’adoption des crypto-actifs en France réalisée par Ipsos, l’Adan et KPMG.
