« L’instrumentalisation des œuvres d’art et des débats sociétaux : une tendance parasitaire »

« L’instrumentalisation des œuvres d’art et des débats sociétaux : une tendance parasitaire »

On ne compte plus, depuis le début de l’été – et ça ne s’arrête pas -, une tendance à parasiter les œuvres d’art, à les “sociologiser”, à les instrumentaliser, à en faire des débats sociétaux ou polémiques. Leur ambition première, qui est de créer un alliage sensible entre un récit et une forme, s’en trouve éclipsée. Mais il est si rentable, à notre époque, de contourner le sujet esthétique…

Cela a commencé avec Barbiesur les écrans depuis juillet. Film féministe ou pas ? Le nombre de chroniques publiées sur le sujet dans le monde entier est effarant, rédigées à 90 % par des femmes – les hommes semblent disqualifiés, comme l’est Ken dans le monde de la poupée.

Que la question ait simplement pu exister dit l’aveuglement. Car l’essentiel est ailleurs. La firme Mattel, deuxième fabricant mondial de jouets au monde, ayant besoin de relancer les ventes (en berne) de sa Barbie et de redresser son cours de Bourse, a eu l’idée du film, en voulait une lecture résolument féministe (pas gagné) afin d’actualiser la poupée et de séduire le public le plus large, a choisi une cinéaste, Greta Gerwig, qui se qualifie d'”ultraféministe”a modifié plusieurs points du scénario, placé des produits à l’écran, est venue à quatre reprises sur le tournage…

Lire le décryptage : Article réservé à nos abonnés Barbie, naissance d’une franchise hollywoodienne

Bravo, l’artiste. Le film est un triomphe, les ventes de Mattel ont explosé. On relira ici l’essai prémonitoire de Stéphane Beaud et Gérard Noiriel, Race et sciences sociales (Agone, 2021), qui montre comment les questions identitaires sont une aubaine pour les entreprises mondialisées, qui y voient le moyen d’acheter la paix sociale en interne, de gagner des parts de marché en externe, et de faire oublier les questions sociales en général.

Brouillage des genres

La musique a également donné lieu à des débats affligeants. Alors qu’un média belge lui demandait, au cœur de l’été, de citer trois titres de chansons à fuir, Juliette Armanet a lâché “trois fois” Les Lacs du Connemarade Michel Sardou, dénonçant “son côté scout, sectaire, sa musique immonde. Cette chanson me dégoûte.” Et puis : “C’est de droite, rien ne va.

Juliette Armanet a ouvert un débat intéressant : en quoi cette chanson et cette musique sont-elles esthétiquement pauvres ? Mais elle l’a fermé illico en ajoutant que le “Lac” est de droite, faisant l’amalgame avec le chanteur. Ça n’a pas loupé, les réseaux sociaux, journaux et même responsables de parti se sont écharpés sur des postures usées, entre image réac de Sardou et image woke d’Armanet.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Quand Juliette Armanet s’en prend aux “Lacs du Connemara”, de Michel Sardou

Jean-Jacques Goldman, lui, n’a rien demandé ; il ne s’exprime plus ni ne chante depuis vingt ans. Mais, comme il est la personnalité préférée des Français, il est convoité. L’historien Ivan Jablonka vient de publier Homme d’or (Seuil), une biographie dans laquelle il se positionne en fan plus qu’en chercheur. Mais, là encore, ce dernier sociologise son sujet, en fait un révélateur socioculturel des années 1980, sans rien dire ou presque des ressorts créatifs de l’auteur-compositeur. Il y aurait pourtant beaucoup à dire (“Quand la musique est bonne”c’est tout de même un peu bêta). Mais pas besoin. Le livre se vend bien, comme Barbie se vend bien.

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