“L’ombre d’Artemisia”, destins croisés et violences contre les femmes dans le livre de Cohen

Deux destins qui se croisent et se chevauchent. Deux expériences tragiques et douloureuses qui semblent se poursuivre même si elles se déroulent à des moments et de manières complètement différentes. Des expériences unies par un même fil conducteur, la violence contre les femmes. C’est le sens de ‘L’ombre d’Artemisia’, un roman sur la fragilité et la maltraitance signé par l’écrivain et scénariste Maurizio Cohen et publié chez Vallecchi (pp. 316 euro 18). “Quand on ajoute de la force au désir d’un homme et qu’on lui enlève le respect, il n’y a pas de défense”, lit-on dans le livre. Une « vérité » que sont obligées de vivre les deux protagonistes du livre : Jenny, une jeune actrice, et la peintre Artemisia Gentileschi sur laquelle Jenny est en train de faire un film.

Dans la Rome du XVIIe siècle, traversée de ferments culturels de toutes sortes, laboratoire d’art et de culture, la vie d’Artemisia est soumise au jugement final de l’Inquisition. “Cette femme, Votre Éminence, continue de pécher. Non seulement – telle est l’accusation portée contre Artemisia – elle a terni l’honneur et la respectabilité de nombreux citoyens pieux et généreux, mais elle tente, grâce à l’esprit maléfique logé entre ses jambes depuis qu’elle est adolescente, pour se montrer comme une victime bénie à nos yeux à tous”. Non seulement cela, Artemisia est également violée par un ami de son père, son professeur de peinture. C’est le même sort qui arrive à Jenny aussi. Pendant le tournage du film, la jeune fille, qui rentre chez elle, est agressée par trois jeunes de la « bonne » Rome. Une violence qui s’exerce à une date symbolique, celle où les femmes sont honorées et célébrées, le 8 mars. C’est ainsi que l’histoire tragique vécue par un personnage historique marquant et celle de Jenny se rejoignent d’une manière ou d’une autre. Encore sous le choc, la jeune fille se retrouve dans la situation paradoxale de devoir faire face à deux procès : le matin au tribunal, celui immédiat pour le viol qu’elle a subi, et l’après-midi celui d’Artemisia reproduit sur le plateau.

Ainsi, petit à petit, le personnage du peintre devient une sorte d’obsession pour Jenny. Les deux femmes, surmontant toute contrainte de temps, établissent une relation pleine d’émotions et de complicité mais aussi de forts malentendus, qui finit par menacer la stabilité psychologique de Jenny, déjà fragile. Le livre de Cohen – qui a écrit les livres “The Cage” et “Ninety” et a collaboré avec plusieurs réalisateurs dont Francesco Nuti, Tinto Brass et José Sanchez – est une histoire qui démontre une seule grande vérité : à travers l’histoire, rien ne change et tout se répète. .