2024-03-26 00:42:31
La parution du livre MANIAQUE, de Benjamin Labatut, a renouvelé l’attention sur l’un des pères de l’informatique moderne, John Von Neumann. Tout au long du texte, le lecteur perçoit l’histoire comme un outil dont le destin est le véritable thème de l’œuvre : l’influence mutuelle qu’exercent l’intelligence artificielle et l’esprit humain. A cette fin, comme on ne pouvait s’y attendre, il consacre bon nombre de pages à l’ordinateur MANIAC.
De cette façon, Labatut présente MANIAC (Analyseur mathématique, intégrateur numérique et ordinateur) comme une machine capable de rendre n’importe quel calcul inimaginable pour les humains. De plus, il le présente comme un outil nettement plus puissant que l’esprit humain et un gadget à la portée de quelques-uns seulement. Pourtant, vu à partir de 2024, MANIAC n’est rien d’autre qu’un simple jouet informatique, un simple prototype de ce que l’avenir (notre présent) allait apporter à l’informatique.
Qu’y avait-il de si spécial chez MANIAC ?
Qu’est-ce qui fait de MANIAC un ordinateur si unique qu’il puisse être placé sur le même axe que l’origine de l’intelligence artificielle ? Ce n’est pas l’ordinateur le plus puissant, ni le premier ordinateur. C’est quelque chose de plus.
Le mérite de la création de MANIAC doit être attribué à Métropole Nicolas Constantinmais dans la conception, il y a une contribution très importante de Von Neumann.
MANIAC a été construit en 1952, mais ses bases opérationnelles ont été créées des années auparavant, en 1945. Il s’agit de l’architecture de Princeton, également appelée architecture de Von Neumann en hommage à son créateur.
Cette architecture apportait une nouveauté très importante par rapport à ses prédécesseurs, comme le célèbre ENIAC. Il s’agit de la possibilité de stocker en mémoire des programmes qui seraient lus à partir de cartes perforées.
Jusque-là, les ordinateurs (les rares qui existaient) nécessitaient des modifications manuelles pour recevoir de nouvelles instructions. Autrement dit, pour modifier les instructions, les programmeurs ont dû changer les câbles et les fiches. Afin de donner des instructions de fonctionnement à MANIAC, le programmeur les rédigeait sous forme de cartes perforées, qu’il insérait ensuite dans l’ordinateur.
Cela peut sembler un simple formalisme technique, mais cela a des implications très importantes. Avec les changements manuels de câbles et de fiches, le passage d’un programme à un autre peut prendre des semaines. Cependant, avec les programmes stockés en mémoire, sur des cartes, le processus était beaucoup plus agile. Différents programmes pourraient être exécutés même le même jour.
Malgré sa pertinence, MANIAC n’est pas la première machine à s’appuyer sur cette architecture. Von Neumann a réalisé le design dans le travail de création de EDVACqui a été présenté en 1949. Même en 1948, il a été présenté SEMqui était basé sur le même concept.
Première victoire aux échecs pour une machine
MANIAC doit être crédité d’un record notable : en 1956, il fut le premier ordinateur capable de gagner une partie d’échecs contre une personne.
Les scientifiques de Los Alamos Ils ont organisé trois parties d’échecs pour le mettre à l’épreuve. Le premier était MANIAC contre MANIAC. Le deuxième était MANIAC contre Martin Kruskal, qui était mathématicien et physicien à l’Université de Princeton, ainsi qu’un joueur d’échecs expérimenté. Le troisième était MANIAC contre un homme anonyme qui a suivi un cours intensif sur les bases des échecs pendant une semaine.
Il est vrai qu’il s’agissait d’une version simplifiée du jeu (sans fous) et que MANIAC mettait 20 minutes pour émettre chaque coup. Il est également vrai que la personne qui a joué à ce jeu n’avait appris à jouer qu’une semaine auparavant. Cependant, c’est ainsi qu’a commencé une bataille machine-humain qui s’est finalement terminée par La victoire de Deep Blue sur Kasparov 41 ans plus tard, en 1997. Cette fois, sans limites.
Cible : la bombe H
L’ordinateur n’a en aucun cas été conçu dans un but aussi récréatif que les échecs. Le but principal de la machine était d’effectuer les calculs nécessaires à la construction de la bombe H, la bombe nucléaire à fusion, 600 fois plus puissante que celle larguée sur Hirosima et qui nécessitait des processus bien plus complexes.
Cependant, la facilité avec laquelle MANIAC pouvait être reprogrammé lui permettait d’être utilisé pour d’autres tâches sans qu’il n’y ait de nouveaux calculs à effectuer. Par exemple, avec MANIAC, la première prévision météorologique a été réalisée en moins de 24 heures, ainsi que la première équation d’état calculée avec les méthodes de simulation de Monte Carlo.
MANIAC ne se distingue pas seulement par sa reprogrammation. Il a également introduit un système de mémoire innovant sous la forme d’un tableau bidimensionnel. Cette façon de disposer les cellules mémoire a permis d’obtenir une amélioration notable des performances, grâce à laquelle les enregistrements susmentionnés ont été obtenus.
Soixante-dix ans après l’apparition de MANIAC, l’informatique a évolué de manière étonnante. Les supercalculateurs actuels, comme le MareNostrum espagnol, laissent MANIAC au niveau d’un simple jouet pour enfants. Dans nos poches, nous transportons des appareils qui font plus que multiplier la capacité de ces machines primitives. Cependant, une bonne partie des ordinateurs actuels continuent d’utiliser la même architecture ou les mêmes versions avec de légères modifications. Il n’est donc pas erroné de parler de John Von Neumann comme de l’un des pères de l’informatique, et avec elle de l’intelligence artificielle.
Le jeu (ou bataille) homme-machine va continuer…
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