L’anniversaire du coup d’État au Chili marque les 50 ans du renversement de Salvador Allende, de l’ère Pinochet et des dictatures militaires en Amérique latine. La récente annonce du gouvernement chilien de relancer les efforts pour identifier les personnes disparues est d’une importance capitale.
Au début des années 70, le programme de l’Unité populaire de Salvador Allende suscitait l’admiration de la gauche et des progressistes européens. Il se distinguait par sa politique audacieuse de redistribution des richesses nationales, son extension de la réforme agraire entamée sous le régime d’Eduardo Frei, ainsi que par sa volonté de reprendre le contrôle des vastes ressources naturelles convoitées par les États-Unis.
Cependant, les espoirs suscités par le socialisme démocratique de la république andine ont été rapidement balayés par les horreurs de la dictature militaire. Entre 1973 et 1990, près de 200 000 Chiliens ont fui le régime de terreur du général Pinochet en raison des violences de masse. L’histoire de cet exil est non seulement celle du Chili et de sa population, mais aussi celle de tous les pays qui les ont accueillis.
En Suisse, dans un contexte de guerre froide, le gouvernement fédéral a d’abord adopté une politique restrictive à l’égard des réfugiés politiques chiliens soupçonnés d’être des révolutionnaires. Ils n’ont accepté que 200 personnes. De nombreux militants, paroissiens, intellectuels et familles ont protesté contre cette décision et se sont engagés à accueillir un exilé chilien chez eux. Sous la pression, le Conseil fédéral a finalement accordé l’asile à environ 2000 réfugiés chiliens. La mobilisation du réseau à Genève, en particulier par le biais du Comité Mémoire et Justice, a permis de sauver de nombreuses vies en documentant et en archivant les crimes de la dictature de Pinochet.
L’activité du Comité a été mentionnée lors de la cérémonie qui a eu lieu le 11 septembre à l’Université de Genève. Parallèlement, l’exposition “No Memorials: histoires matérielles de l’exil chilien à Genève”, soutenue par la Ville de Genève et impliquant de nombreuses associations de la communauté chilienne, est visible au Commun, espace culturel de la Ville de Genève jusqu’à demain. Cette exposition met en valeur le travail de l’artiste chilienne Marisa Cornejo, ainsi que d’autres artistes chiliens de renom à la Galerie Gallatin de New York. “No Memorials” s’inscrit dans une tendance actuelle d’expositions consacrées aux travailleurs immigrés à Genève, Lausanne, Bienne et Zurich, qui permettent de réinterroger la relation de notre pays avec ses communautés étrangères grâce à l’art contemporain.
* Membre fondateur de l’Association Marisa Cornejo Studio
– Célébrer la mémoire de l’exil chilien
Emmanuel Deonna – Journaliste et critique indépendant, membre fondateur de l’Association Marisa Cornejo Studio