Milan Kundera, un écrivain banni depuis quatre décennies

Milan Kundera, un écrivain banni depuis quatre décennies

2023-07-12 18:12:34

Milan Kundera, l’un des écrivains tchèques les plus célèbres de tous les temps, n’a pas été tchèque, mais français, une bonne partie de sa vie. Il a été déchu de sa nationalité tchécoslovaque par le régime communiste à la fin des années 1970 et, après une période d’apatridie, a obtenu la nationalité française en 1981 dans le pays où il vivait en exil. Après la chute du mur de Berlin en 1989, il s’est rendu plusieurs fois dans son pays, désormais à l’abri des persécutions, mais il n’a même pas récupéré personnellement la Médaille du Mérite que lui a décernée le président Václav Havel en 1995.

Quarante ans seulement après avoir fui son pays natal, en 2019, l’ambassadeur tchèque à Paris Petr Drulák s’est rendu dans son appartement parisien pour lui remettre la carte de nationalité avec laquelle il a finalement récupéré sa nationalité tchèque. Il n’y avait pas de cérémonie, pas de drapeaux ou d’hymnes, une dernière lueur des relations conflictuelles de l’écrivain avec le gouvernement de son pays à vie. La réconciliation n’a été scellée que lorsque Milan Kundera a remporté le prestigieux pRemio Franz Kafka, en 2020, en reconnaissance de sa carrière, décerné par la Société Franz Kafka de son pays natal et la ville de Prague. “Son travail représente non seulement une contribution extraordinaire à la culture tchèque (…) mais a eu un écho dans la culture européenne et mondiale”, a reconnu le jury de la Société Franz Kafka. Cette même année, il décide de faire don de sa bibliothèque et de ses archives à sa ville natale, Brno.

Ses problèmes avec le gouvernement tchèque ont commencé en 1950, lorsqu’il a été expulsé du parti communiste pour leurs positions individualistes, selon les dirigeants. Après le Printemps de Prague, il prend définitivement ses distances avec son idéologie de jeunesse, pour ne pas être d’accord avec le totalitarisme ou le collectivisme et après avoir signé le roman ‘Blague‘ (1967), une satire du communisme stalinien qui lui vaut une interdiction d’écrivain en Tchécoslovaquie.

Ses livres ont été interdits et il a été contraint de survivre en tant que musicien de jazz avant de finalement s’exiler. Dans une histoire aussi comique que dévastatrice, il racontait l’histoire de l’étudiant Ludvik Jahn, une transcription de Kundera lui-même, qui a eu l’idée d’écrire une carte postale de blague à sa petite amie Marketa dans laquelle il ironisait sur l’optimisme communiste et a cité l’indicible dissident Trotsky, assassiné par le même Staline dont les soldats continuent d’occuper le pays. Jahn est expulsé de l’université, ses camarades de classe retiennent son salut, toutes ses chances de promotion personnelle sont éliminées et il finit par être condamné à travailler dans les mines.

Kundera a continué à entretenir une relation difficile avec son pays d’origine, même après l’avènement de la démocratie. Il en vint à se sentir tellement banni qu’il adopta à partir de 1994 le français comme langue littéraire, au point de refuser de revoir les traductions tchèques de son œuvre, apparemment dégoûté par des polémiques dont il défendit à maintes reprises le mensonge, comme la sombre affaire de la plainte contre Miroslav Dvořáček. Le soldat tchèque a fait défection et s’est enfui en Allemagne de l’Ouest en 1949. Là, il a été recruté pour espionner la Tchécoslovaquie communiste et est retourné dans le pays sous une fausse identité. A Prague, il rencontra une vieille connaissance, Iva Militka, dans la chambre de laquelle il laissa sa valise dans la résidence étudiante. En 2008, il a été publié que Kundera avait découvert que Dvořáček était un déserteur et l’avait signalé à la police, selon l’historien Vojtěch Ripka. Au moment de la plainte, Kundera avait 20 ans et était membre du Parti communiste. Ce n’est que plus tard qu’il a commencé à prendre ses distances, dans les années 1960, il faisait partie de l’aile réformiste du parti et après l’échec du Printemps de Prague, il est devenu dissident. Selon sa version, cette histoire était une tentative de le discréditer et un clou important dans le cercueil de la relation avec son propre pays.



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