Après avoir prétexté une «dépression majeure» pour justifier sa «négligence», un ancien notaire de Laval a finalement été reconnu coupable par son ordre professionnel d’avoir contribué à faire disparaître près de 3,8 M$ au Cambodge pour un riche entrepreneur.
«Le notaire [Simon Chartrand] a même abdiqué ses responsabilités professionnelles et déontologiques à titre de notaire en faveur de Jean-François Malo», a tranché le Conseil de discipline de la Chambre des notaires.
Dans une décision de 57 pages rendue il y a quelques semaines, on apprend que l’ex-notaire prétend avoir été «victime» d’arnaqueurs. Cette vaste fraude a commencé en 2019 lorsque le promoteur Jean-François Malo a emprunté 7,2 M$ à deux entreprises, soit 3,8 M$ à l’entreprise Crédit Transit et 3,4 M$ à Gestion Groupe Bernard.
Simon Chartrand est alors choisi par Malo pour déposer en fidéicommis les 7,2 M$ confiés par ces deux sociétés, explique le Conseil. Ce dernier doute d’emblée que le notaire ait réellement été berné par des «fraudeurs habiles», précise-t-il.
«Aveuglement volontaire»
L’ex-notaire, radié du tableau de l’ordre depuis 2020, a donc été reconnu coupable des deux plaintes déposées à son endroit. La première pour avoir «accepté de prêter ses services à la commission à un acte illégal». La seconde concerne le détournement de 3,8 M$ dans une banque au Cambodge dans le cadre de ses fonctions.
Notons que les deux firmes à l’origine de ce prêt ont «perdu à jamais» cette somme dans cette banque de l’Asie du Sud-est, selon un juge de la Cour supérieure, qui s’est penché sur cette affaire en 2023.
Vidéo publiée en 2022 où l’ex-notaire explique ses déboires avec son ordre:
Le Conseil de discipline reproche aussi à Simon Chartrand d’avoir carrément fait preuve «d’aveuglement volontaire», d’«imprudence» et de «négligence». En raison de sa dépression sévère, il a notamment permis à son client Jean-François Malo de transmettre lettres et courriels à sa place pour «sauver» son financement.
«Il dit même avoir commis une faute lourde lorsqu’il a complété les formalités en vue de procéder au transfert de la somme de 3 769 275,25$ au Cambodge. À cette occasion, il n’a pas prêté attention à tous les détails», peut-on lire dans la décision.
Le Conseil conclut toutefois que rien ne prouve que sa dépression l’empêchait d’exercer sa profession avec rigueur, lui qui n’a même pas reconnu les fausses lettres ou faux courriels au cœur de cette fraude rocambolesque. Une autre audition est d’ailleurs prévue pour établir ses sanctions.
Malo dans l’eau chaude
Rappelons que Jean-François Malo avait d’abord emprunté en 2019 7,2 M$ aux deux firmes pour éviter que des entités du Mouvement Desjardins saisissent 42 immeubles lui appartenant.