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Où est le soulèvement ?, quotidien Junge Welt, 9 janvier 2025

by Nouvelles

2025-01-09 02:00:00

Production cinématographique Grandfilm/UlrichSeidl

Tir aveugle : décor convivial au stand de tir

Si un film commence par un meurtre, il s’agit généralement d’un crime ou d’un thriller. Mais il semble que Daniel Hoesl et Julia Niemann ne considèrent même pas ces conventions dignes d’être parodiées. Dès que quelqu’un est abattu par balle dans « Veni Vidi Vici », les deux réalisateurs répondent déjà à la question cardinale, qui a été transformée en terme de genre anglais « polar » : l’auteur dans cette affaire est un père de famille et un investisseur majeur, Amon. (Laurence Rupp) veut accroître encore sa fortune d’un milliard de dollars en construisant une usine de batteries. Mais surtout, les cinéastes autrichiens ignorent les schémas narratifs les plus courants avec lesquels les romans policiers et les thrillers abordent le rétablissement de l’ordre et donnent une morale au crime : dans leur deuxième réalisation commune (après le documentaire « Davos » de 2020), Hoesl et Niemann ils ne nous laissent aucune démarche d’enquête et n’utilisent pas non plus la proximité intime que la perspective narrative choisie crée avec le protagoniste meurtrier pour faire la lumière sur les mobiles du crime.

Le scénario de Hoesl rend les preuves si claires dès le début que la police n’aurait qu’à faire le rapprochement si elle ne voulait pas nier de manière persistante les faits concernant la longue série de meurtres. Les policiers locaux ont même complimenté d’un ton bourru un témoin oculaire de leur poste de garde. Entre-temps, le journaliste Volker (Dominik Warta) est parvenu à la conclusion qu’Amon est responsable des actes sanglants, ce que la rédactrice en chef (Martina Spitzer) d’un grand média imprimé balaye en disant : “Vous êtes et allez reste un théoricien du complot. »

Pendant ce temps, un bonheur exubérant se reflète sur le visage de l’agresseur alors qu’il rentre chez lui à vélo, ravi après le meurtre initial. Mais hormis un gros plan sur cette expression muette du visage, le film ne nous donne aucune raison pour les plans fatals entrecoupés négligemment. Difficile d’imaginer qu’Amon soit sujet à un instinct meurtrier indomptable, tant il dégage généralement un équilibre enviable. Puisqu’il n’avait auparavant aucune relation apparente avec ses victimes, qui restent anonymes, aucun autre motif ne se suggère.

Bref, le protagoniste de cette satire sociale tue parce que les cinéastes le veulent ainsi. Et ils veulent évidemment que cela provoque leur public, car on nous parle bien sûr lorsqu’Amon se demande dans un dialogue avec Volker : « Je peux tout m’en sortir. Où est le soulèvement ? Pourquoi les gens supportent-ils cela ? » Les commentaires suffisants que Paula (Olivia Goschler), la fille adolescente d’Amon, intervient occasionnellement hors écran conduisent à une question similaire et pointue.

L’impunité du meurtre peut donc être considérée comme une métaphore du pouvoir oligarchique des super-riches, même s’il est fécond que le sens de l’exagération cynique ne soit jamais défini plus en détail. Paula murmure dès le début que l’insolence l’emporte. Et sa belle-mère Viktoria (Ursina Lardi) se moque d’un commerçant qui s’est fait voler lorsqu’elle se joint apparemment à ses éloges des vertus secondaires et utilise des expressions comme « Honnêtement, dure le plus longtemps » avec un doux sourire. Mais l’humour coquette de ce film ne se limite pas au truisme selon lequel l’argent corrompt le caractère et que les circonstances sont injustes.

Ainsi, l’étrangeté provoquée par l’apparente insensé des actes sanglants d’Amon dure jusqu’à la fin. Et cela colore également la perception du bonheur de la famille, couronné très tôt par la nouvelle de la grossesse désirée de Victoria et qui s’accorde parfaitement avec le temps impérial qui caresse les jolis contreforts des Alpes dans “Veni Vidi Vici”. Les scènes domestiques ont d’ailleurs été tournées au palais Rasumofsky de Vienne, qui est, selon Hoesl, la « plus grande maison privée d’Autriche », où l’autorisation de filmer a probablement été accordée parce que le cinéaste né en 1982 avait déjà été en contact avec de vrais des gens très riches lors de ses recherches sur son deuxième long métrage “WinWin” (2016).

Il n’est pas nécessaire de connaître personnellement les oligarques d’Europe centrale pour soupçonner qu’il n’y a pas plus à craindre de leur part qu’ils tirent sans discernement sur des personnes sans méfiance que de la part des boulangers ou des chauffeurs de taxi. Mais le plus effrayant dans ce film, c’est qu’il donne presque envie d’une provocation aussi meurtrière de la part d’un homologue réel d’Amon. Contrairement aux intentions de Hoesl et Niemann, leur intrigue renforce inévitablement les doutes quant à savoir si autre chose qu’un auto-sabotage insensé pourrait réellement freiner l’invulnérabilité de la caste des milliardaires représentée.



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