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Poèmes d’un espoir vacillant

Poèmes d’un espoir vacillant

Le nouveau recueil de poèmes de Fabio Pusterla part d’un néologisme, Tremalume, apparu comme par magie sur la page : un mot dans lequel, de l’aveu même de l’auteur, « le tremblement, la menace et l’inquiétude n’éliminent en rien la petite survie d’un lumière, d’une lumière minimale sur laquelle s’appuyer ». Une trace d’espoir, donc.

Expérimentalisme décidé

Divisé en cinq sections (Le barre, Requiem, Cielo dei vinti, Lugangeles, Angelicanze), précédées d’un texte proémial (Word spaceship word liberty), Tremalume est un recueil varié et multi-stylistique, dans lequel l’effusion du sujet (Dirty cage) s’ensuit un expérimentalisme décisif (Requiem pour une maison de riposte lombarde), qui place la lyrique de Pusterla dans un creuset d’extra-localisation du mot et d’élargissement existentiel.

Formule décolonisante

Une large place est donnée à la formule décolonisatrice – une analyse de la critique postcoloniale serait tout à fait appropriée – grâce à la figure de Truganini, qui fut le dernier aborigène de Tasmanie après le génocide du peuple Palawa. Le poète célèbre cette femme avec deux séquences très intéressantes, peut-être les plus hautes de tout le livre, Frammenti di Truganini et Canzoni di Truganini : « Truganini te regarde / avec sa couleur de pierre / livide. Avec son odeur de champignon/fétide. Avec son paddy / douleur aride». De plus, le nom même de Truganini agit à la Montalienne avec sa musicalité rugueuse. Et, de fait, dans les vers de Pusterla, la nomination a certainement une place prépondérante dans la dictée. Pensez au (pseudo-)lemme « angelicanza » de Dante : « Angelicanza, un parfum qui me suit / depuis longtemps sans raison apparente. / Deux occurrences dans les Fiore dei contrasti / puis rien de plus dans l’œuvre majeure, / à la place pleine d’anges. […] / Pas l’ange, pas sa figure métaphysique triomphante / éblouissante, / pas l’image ; plutôt une essence éventuelle / une grâce qui apparaît avec d’autres mineures». Un rôle tout aussi décisif revient à la lumière, symbole d’une liberté politico-sociale tant attendue : « Dans les ravins les yeux / ils attendent le retour de la lumière. / Des malades t’attendent / lumière fugitive que tu rendras // lumière migrante ».

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La lumière, dans ses multiples qualités, est également présente dans un texte dédié au père poétique de Pusterla, Philippe Jaccottet, poète franco-suisse récemment décédé, auquel l’auteur tessinois a consacré l’essentiel de son travail de traduction. Marcos y Marcos réimprime pour l’occasion les Pensées sous les nuages ​​(qui incluent Dans la lumière d’hiver), traduites et éditées par Pusterla lui-même. Qui écrit en introduction : « Ombre et lumière, confrontation perpétuelle entre deux éléments antithétiques qui tirent leur raison d’être l’un de l’autre, se nourrissent mutuellement : tel pourrait être le fond changeant et complexe de la poésie de Philippe Jaccottet, qui a grandi les années autour d’une recherche sévère, qu’on voudrait définir comme éthique, si le terme n’était pas trop lourd et mal adapté à la réserve dont l’auteur a toujours entouré son œuvre». Jaccottet est un poète pauvre en lui-même, exotopique (dira Bakhtine), toujours orienté à chercher dans la splendeur de l’altérité et dans la pudeur de l’ego la modulation exacte pour entrer en contact avec le mystère de l’être.

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Fabio Pusterla, Tremalume, Marcos et Marcos, p. 192, 20,00 €

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