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Pourquoi y a-t-il si peu de femmes à la tête des plus grandes entreprises du Royaume-Uni ?

by Nouvelles

Les femmes représentent 49 % des plus de 16 ans en activité au Royaume-Uni. Pourtant, sur les cent PDG qui dirigent actuellement les plus grandes entreprises publiques du pays en termes de capitalisation boursière (FTSE 100), seules dix sont des femmes.

Il y a un manque de diversité parmi les PDG britanniques en termes de race, de classe et de niveau d’éducation (Groupe Égalité, 2023). Mais le manque de diversité est plus marqué chez les femmes.

Figure 1 : Femmes PDG de grandes entreprises dans les pays avancés (%) Source : Données collectées par l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) à partir de janvier 2017 et précédemment par l’ Commission européenne.

Remarque : Sur la base du pourcentage de femmes PDG au moment de la publication annuelle Liste Fortune 500.

La part actuelle est une amélioration par rapport à 2020, lorsqu’il y avait plus de PDG nommés Peter que de femmes.

Des progrès ont également été réalisés au sein des conseils d’administration, qui sont désormais composés à 42 % de femmes (Revue des femmes dirigeantes du FTSE 2024). Mais la représentation au sein des conseils d’administration n’a pas entraîné les mêmes progrès dans les comités exécutifs, où les femmes n’occupent que 30 % des postes.

L’obstacle à l’accès des femmes aux postes de direction (les postes de direction d’une entreprise) a été qualifié de « plafond de verre ». Pourquoi existe-t-il et que peut-on faire pour y remédier ?

L’argument commercial en faveur des femmes PDG

Les entreprises dirigées par des femmes obtiennent de meilleurs résultats, selon des recherches menées par des cabinets de conseil et des institutions financières, mais ces résultats ne sont pas rigoureux (Jeong et Harrison, 2017; Edmans, 2018).

Des méta-analyses évaluées par des pairs dans plusieurs pays ont révélé une corrélation positive statistiquement significative entre les femmes PDG et la performance des entreprises. Mais en termes réels, cet effet est très faible (Pletzer et coll., 2015; Post et Bryan, 2015).

En d’autres termes, les femmes PDG n’améliorent pas considérablement les résultats d’une entreprise. Mais elles ne les dégradent pas non plus. Si le sexe a peu d’effet sur les performances d’une entreprise, pourquoi si peu de femmes occupent-elles les postes les plus élevés ?

Pourquoi y a-t-il si peu de femmes PDG ?

Préjugé

L’une des raisons possibles du manque de femmes PDG est le stéréotype selon lequel les hommes sont naturellement mieux adaptés à ce poste. Les idées préconçues sur les femmes peuvent donner lieu à des comportements discriminatoires sur le lieu de travail et peuvent être désavantageuses pour les femmes lors des décisions d’embauche.

La société a des idées préétablies sur les traits de caractère des hommes et des femmes. Par exemple, les traits féminins stéréotypés incluent l’empathie, la gentillesse et la loyauté, tandis que les traits masculins stéréotypés incluent la compétence, la compétitivité et la domination (Heilman, 2012). Ces traits masculins sont positivement associés au leadership.

De plus, lorsque les femmes présentent des traits masculins, elles sont perçues différemment des hommes (Eagly et Carli, 2007). L’affirmation de soi est considérée comme un attribut positif pour un homme, mais négatif pour une femme, à moins qu’elle ne puisse également démontrer le comportement communautaire attendu des femmes (Heilman et Okimoto, 2007).

Lorsque les femmes PDG expriment leur colère, leur compétence est dévalorisée. Mais pour les hommes, la compétence perçue augmente ou reste la même (Brescoll et Uhlmann, 2008). Cela suggère que l’« androcentrisme » est à l’œuvre dans le monde de l’entreprise, le point de vue masculin étant central (Bailey et coll., 2020).

Le « double lien » exprime l’idée que les femmes doivent marcher sur une ligne fine, en affichant simultanément des traits opposés. On attend d’elles qu’elles soient féminines, mais pas trop féminines dans leur tenue, leur langage et leur ton de voix (Oakley, 2000).

Les femmes sont confrontées à un dilemme : si elles adoptent un style linguistique typiquement masculin, elles peuvent être perçues comme agressives, mais si elles sont trop féminines, elles risquent de manquer d’autorité (Coates, 2015).

Un écart de confiance entre les sexes

Les recherches révèlent que les femmes sont plus susceptibles d’éviter les concours de promotion en raison d’attitudes différentes à l’égard de la concurrence et de niveaux de confiance par rapport aux hommes (Niederle et Vesterlund 2011).

Le manque de confiance en soi peut amener les femmes à se retirer de la compétition pour des postes plus élevés. Parmi les titulaires d’un MBA (un diplôme universitaire de troisième cycle standard en commerce), 12 % des femmes aspiraient à des postes au sein du conseil d’administration cinq ans après l’obtention de leur diplôme, contre 22 % des hommes (Weiser, 2021).

Ce fossé de confiance entre les sexes se crée tôt dans la vie, à travers les attentes sociales, l’expérience et la culture. Un manque de confiance conduit les évaluateurs à se forger des croyances trop pessimistes à l’égard des femmes (Exley et Nielsen, 2024). Cela crée un cercle vicieux, car les femmes peuvent intérioriser ce pessimisme et devenir moins confiantes.

Réseaux

En 2023, 77 % des nominations de nouveaux PDG étaient des recrutements internes (Forsdick, 2024). Les conseils d’administration et les comités de sélection des PDG privilégient les candidats qu’ils connaissent et qui ont une connaissance approfondie de l’entreprise.

Cette pratique augmente la confiance entre le PDG et le conseil d’administration, comme le montre la réduction de la surveillance du conseil d’administration lorsqu’il existe des liens de réseau (Fracassi et Tate, 2012). Ces liens incluent le fait de siéger aux mêmes conseils d’administration d’organismes de bienfaisance, d’être diplômé de la même université et de jouer au golf dans les mêmes clubs.

Les femmes sont moins susceptibles de recevoir de l’aide liée au travail de la part de leurs réseaux informels (McGuire, 2002). Un exemple de la culture populaire qui met en évidence ce phénomène est la sitcom américaine Amis quand Rachel se met à fumer pour ne pas rater les discussions d’affaires qui ont lieu pendant les pauses cigarettes : elle obtient ainsi une promotion.

Le mentorat basé sur le type met en relation des employés de bas niveau avec des cadres supérieurs qui leur ressemblent en termes de sexe et de race. Ce mécanisme imite les réseaux sociaux naturels dans lesquels les gens ont tendance à mieux communiquer lorsqu’ils ont des intérêts et des expériences communs (Athey et coll., 2000).

La plupart des cadres dirigeants sont des hommes, il y a donc moins de femmes mentors. Par conséquent, les femmes ne bénéficient pas du même capital humain que le mentorat. L’exclusion des femmes des réseaux informels peut expliquer en partie pourquoi la plupart des PDG sont encore des hommes blancs.

Pipeline : rôles commerciaux versus rôles fonctionnels

Le cheminement traditionnel vers la haute direction consiste à obtenir un diplôme lié aux affaires, qui est dominé par les hommes, suivi d’un programme de MBA (Murray, 2023). Les femmes qui suivent ce parcours se retrouvent souvent dans des rôles fonctionnels, à savoir les ressources humaines (RH) et le marketing, tandis que les PDG sont sélectionnés parmi les rôles commerciaux (Pipeline, 2023).

Les femmes représentent 71 % des effectifs RH, en partie en raison de l’idée selon laquelle les femmes possèdent les compétences générales nécessaires à ces postes. En outre, sur le lieu de travail, les femmes effectuent davantage de tâches définies comme « non promouvables ». Il peut s’agir de former les nouveaux employés, de prendre des notes lors des réunions ou même d’organiser la fête du bureau (Weingart et al, 2022).

La pénalité de la maternité

Les femmes de 16 à 24 ans représentent environ 50 % des cadres. Mais lorsqu’elles atteignent l’âge où la procréation est la plus fréquente (entre 25 et 44 ans), cette part diminue et ne se rétablit jamais complètement.

Avoir des enfants retarde ou arrête la progression de carrière des femmes, mais pourquoi ?

Figure 2 : Proportion de femmes occupant des postes de direction au Royaume-Uni par âge Source : Proportion de femmes occupant des postes de direction, Royaume-Uni, 2012 à 2022, Office for National Sstatistiques (ONS)

Avoir des enfants affecte les revenus des femmes mais pas ceux des hommes (Kleven et coll., 2019, 2023). L’écart de revenus peut en partie être attribué à l’interruption de carrière et aux différences dans les heures travaillées (Bertrand et al, 2009).

Ces différences se produisent dans la mesure où les femmes assurent la majorité du travail non rémunéré, notamment la garde des enfants, les tâches ménagères et les soins aux autres membres de la famille. Ce surcroît de travail fait des femmes des employées moins flexibles.

La lauréate du prix Nobel d’économie 2023, Claudia Goldin, montre que l’ascension des travailleurs masculins vers l’ancienneté est enracinée dans de longues heures et une disponibilité constante (Goldin, 2014). La maternité empêche les femmes d’adopter ce style de travail.

Figure 3 : Nombre moyen d’heures de travail non rémunéré effectuées par semaine par âge et par sexe au Royaume-Uni en 2015 Source : Enquête européenne harmonisée sur l’utilisation du temps, Royaume-Uni, 2015, ONFigure 4 : Pourcentage des personnes de 16 à 64 ans employées à temps plein et à temps partiel, par sexe Source : Emploi à temps plein et à temps partiel, Royaume-Uni, 2023, ON

De plus, les femmes sont moins susceptibles d’être embauchées si l’on s’attend à ce qu’elles prennent un congé de maternité (Booth, 2023). Il existe un préjugé selon lequel les femmes qui prennent le temps d’avoir des enfants sont moins engagées dans leur carrière ou sont des employées moins fiables (Arena et al, 2022).

Ce préjugé se traduit par un manque d’investissement dans les femmes en âge de procréer, créant ainsi un vide dans le vivier des femmes PDG.

Que peut-on faire pour résoudre le problème ?

Les entreprises et le gouvernement peuvent prendre des mesures pour contribuer à réduire cet écart.

Lutter contre la pénalité liée à la maternité

Le gouvernement britannique réalise le plus gros investissement de l’histoire dans la garde d’enfants. La réduction du coût de la garde d’enfants donne aux femmes la possibilité de retourner au travail plus tôt, réduisant ainsi la perte de capital humain (Casarico, 2023).

Mais l’intervention monétaire à elle seule ne suffit pas. Au Danemark et en Corée du Sud, par exemple, la pénalité de maternité persiste malgré une intervention monétaire extensive (Falaise, 2018). Remettre en question les préjugés sous-jacents et adopter des pratiques de travail flexibles peut également avoir un impact positif dans la lutte contre les préjugés liés à la maternité (Renard et Quinn, 2015).

Du conseil d’administration à la haute direction

L’augmentation du nombre de femmes au sein des conseils d’administration des entreprises a un effet positif sur le nombre de femmes au sein des instances dirigeantes (Matsa et Miller, 2011). Les femmes aident les autres de diverses manières, notamment en modifiant leurs préférences en matière d’embauche, en changeant la culture de l’entreprise et en servant de modèles.

Le Royaume-Uni a adopté une approche volontaire pour augmenter le nombre de femmes dans les conseils d’administration, tandis que certains pays européens ont fixé des quotas formels.

Tableau 1 : Quotas imposant la présence de femmes au sein des conseils d’administrationSource : Part des femmes au sein des conseils d’administration des plus grandes sociétés cotées en bourse 2010-2022, OCDE; résumés des quotas disponibles sur Revue des femmes dirigeantes du FTSE 2024.

L’approche du Royaume-Uni a consisté à financer trois rapports indépendants sur les femmes dans les entreprises du FTSE 100. La visibilité du problème a poussé le secteur à agir, et le Royaume-Uni obtient des résultats similaires à ceux des pays ayant mis en place des quotas.

Figure 5 : Part des femmes dans les conseils d’administration des plus grandes sociétés cotées en bourse dans les pays avancés (%) Source : Part des femmes dans les conseils d’administration des plus grandes sociétés cotées en bourse 2010-2022, OCDE

Le Évaluation des femmes dirigeantes du FTSE 2024 révèle que 40 % des nouvelles nominations de cadres sont réservées aux femmes (Évaluation des femmes dirigeantes du FTSE2024). De plus en plus de femmes entrent dans l’industrie, ce qui normalise leur leadership. Bien que l’égalité des sexes parmi les PDG soit encore loin – environ 76 ans – des progrès sont réalisés (McCulloch, 2023).

Où puis-je en savoir plus ?

Qui sont les experts sur cette question ?

  • Marianne Bertrand
  • Alex Edmans

Auteur : Rebecca Walton, Queen’s University BelfastImage : Jacob Wackerhausen sur iStock
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