Un tel rassemblement n’avait jamais eu lieu. trente-sept chefs d’état-major (ou leurs représentants) se sont retrouvés pour échanger sur la sécurité du continent et le soutien à l’Ukraine. Un moment d’autant plus historique que l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon, le Canada et l’Ukraine étaient présents, aux côtés des nations membres de l’Alliance atlantique. Seul absent : les Etats-Unis.
Cet événement a jalonné une semaine inédite d’échanges autour de la défense européenne. Au moment où les généraux les plus étoilés s’asseyaient à la même table, les tensions se trouvaient à leur paroxysme entre le continent et le “grand frère” américain.celui-ci venait de couper brutalement son aide militaire aux Ukrainiens, stoppant net les livraisons d’armes et lui fermant le robinet des renseignements militaires.
Comment avancer sans Washington ? Les autorités françaises ont su tirer profit des hasards du calendrier. Les chefs d’état-major se sont opportunément réunis à l’occasion de la deuxième édition d’un forum organisé dans l’enceinte de l’Ecole militaire. en ouverture de leurs travaux,Emmanuel Macron leur a proposé de passer « du concept au plan pour définir des garanties de sécurité crédibles,afin qu’une paix solide et durable soit possible en Ukraine »,car « c’est le moment où l’Europe doit peser de tout son poids,pour l’Ukraine et pour elle-même ».
On nage en plein dilemme. Tous les participants aux récents forums admettent qu’il faut plus d’autonomie stratégique de l’Europe, plus d’européanisation de sa défense, mais sans s’éloigner des Etats-Unis.
« On se trouve en pleine rupture amoureuse avec Washington, mais on hésite à passer à la phase de deuil. »
Guillaume Lasconjarias, directeur des études à l’IHEDN
La mobilisation industrielle est au cœur du défi de la remontée en puissance militaire des européens.
« Les industries de défense de l’Ukraine produisaient pour un montant d’un milliard d’euros en 2022 et sont passées à 30 milliards en 2024. Nous pouvons donc le faire au niveau européen », a insisté le commissaire européen à la Défense.
Il a rappelé que le plan “réarmer l’Europe” envisageait des facilités et des aides pour 800 milliards d’euros dans les années à venir.
Ces nouveaux outils, dont un emprunt commun, devraient être utilisés à plein. Mais ils ne suffiront pas. Le budget de la Défense atteint actuellement une cinquantaine de milliards d’euros, soit le double de ce qu’il était en 2017. La loi de programmation militaire a donné un objectif de 67 milliards d’euros en 2030.L’accélération des menaces a mené Sébastien Lecornu de le porter plutôt jusqu’à une centaine de milliards. Emmanuel Macron a sommé le gouvernement d’exclure toute hausse d’impôt et toute aggravation du déficit, alors que les finances du pays sont en souffrance. On propose plutôt de “mobiliser” l’épargne privée.
Emmanuel Macron a reçu les grands industriels de la défense français. Il leur a demandé d’accélérer encore leur production, alors même que ces derniers ont du mal à résoudre leurs goulets d’étranglements.
« Le temps industriel ne peut pas être raccourci », rappelle Guillaume Lasconjarias.
Les entreprises civiles pourraient être sollicitées. En Allemagne, il est déjà question d’utiliser des lignes de production d’une entreprise emblématique actuellement en challengingé, pour construire des blindés.
Mais cela ne suffira pas à résoudre l’un des problèmes majeurs des Européens : la fragmentation du marché de leurs équipements. Une harmonisation permettrait, à terme, de faciliter le maintien en condition opérationnelle de tous ces armements et de réduire leur coût initial. Les Ukrainiens font l’expérience de cette difficulté au quotidien.
« Les grands industriels n’ont pas une énorme appétence pour la coopération », a rappelé un spécialiste.
Sans une pression politique forte,cela ne changera pas.
L’Europe face au défi de son autonomie stratégique : Une défense européenne sans Washington ?
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L’absence inattendue des États-unis lors d’un rassemblement historique de 37 chefs d’état-major (ou leurs représentants) à l’École militaire a mis en lumière la volonté européenne de renforcer son autonomie stratégique. Cet événement, marqué par la présence de l’Australie, de la nouvelle-Zélande, du Japon, du Canada et de l’Ukraine, intervient dans un contexte de tensions exacerbées avec Washington suite à l’arrêt brutal de son aide militaire à l’Ukraine.
Un tournant pour la défense européenne ?
Le président Macron a appelé à passer “du concept au plan” pour garantir la sécurité de l’Ukraine et de l’Europe, soulignant l’importance d’une action européenne déterminée. Malgré l’affirmation partagée d’un besoin d’autonomie stratégique et d’une européanisation de la défense, un dilemme persiste : comment avancer sans s’éloigner des États-Unis ? Guillaume Lasconjarias, de l’IHEDN, parle même de “rupture amoureuse” avec Washington.
Le défi de la mobilisation industrielle
La remontée en puissance militaire européenne repose sur une forte mobilisation industrielle. L’exemple ukrainien, avec une augmentation de sa production d’armement de 1 milliard d’euros en 2022 à 30 milliards en 2024, est mis en avant. Le plan “Réarmer l’Europe”, avec 800 milliards d’euros d’aides, ainsi qu’un emprunt commun, doit permettre d’accélérer la production. Cependant, le budget actuel de la défense européenne (environ 50 milliards d’euros) devra augmenter considérablement pour atteindre les objectifs fixés, malgré les arduousés financières et la nécessité d’éviter de nouvelles hausses d’impôts. L’accent est mis sur la mobilisation de l’épargne privée et l’accélération de la production par les grands industriels de la défense, même si cela pose des défis techniques et organisationnels. L’utilisation de capacités industrielles civiles est également envisagée.
| Aspect | Description | Défis |
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| Objectif | Renforcer l’autonomie stratégique de l’Europe et sa défense | Dépendance vis-à-vis des États-Unis |
| Financement | Plan “Réarmer l’Europe” (800 milliards d’euros), budget actuel de la défense (50 milliards d’euros), objectif 2030 (67 milliards d’euros), possible augmentation | Difficultés financières, mobilisation de l’épargne privée |
| Production Industrielle | Accélération nécessaire, utilisation potentielle de capacités civiles, problématiques de goulots d’étranglement | Temps industriel limité, fragmentation du marché, coopération difficile entre industriels |
| Coopération | Nécessaire pour l’harmonisation des équipements et la réduction des coûts | Réticence des grands industriels |
FAQ
Q : Quelle est la principale difficulté pour l’Europe en matière de défense ?
R : La fragmentation du marché des équipements européens et la nécessité de renforcer sa coopération industrielle.
Q : Quel est le rôle des États-Unis dans ce contexte ?
R : Leur absence lors d’un sommet crucial souligne la volonté européenne d’accroître son autonomie, notamment face à l’arrêt de leur aide militaire à l’Ukraine.
Q : Comment l’Europe compte-t-elle financer sa montée en puissance militaire ?
R : Grâce au plan “Réarmer l’europe”, à l’augmentation du budget de la défense et à la mobilisation de l’épargne privée.
Q : Quels sont les défis industriels majeurs ?
R : L’accélération de la production, la résolution des goulots d’étranglement et la coopération entre les industriels de la défense.