Santé et roman : MEMENTO MORI

Santé et roman : MEMENTO MORI

L’être humain est condamné, du fait de son agitation spirituelle, à s’interroger sur le fondement ultime de la réalité et la raison qui le pousse à exister.

Pour cette raison et tout au long de l’histoire, les hommes ont exprimé sur différents supports littéraires, sculpturaux et picturaux, son propre hymne à la fragilité humaine, à la banalité des plaisirs mondains et à l’inconsistance de tout face à la mort.



Commençant aux temps bibliques où la fameuse “Vanité des vanités” de l’Ecclésiaste est déclarée (Vanité des vanités, tout est vanité), passer par le “souvenir mori” (rappelez-vous que vous devez mourir) de la Rome antique et plus tard au baroque avec le “vanité” (en vain), que Il ne fait pas allusion à la notion d’orgueil ou d’arrogance mais plutôt à l’illusion de la vie et à l’insignifiance des possessions matérielles.



Le mode de “vanité”, en plein essor Baroque influencé par Le relativisme cartésien adopte une grande variété de symbolisme pour décorer le besoin d’exprimer ce vide existentiel : fruits mûrs, feuilles fanées ou horloges comme allégorie du temps qui passe, insectes et pourriture pour indiquer la décomposition du corps, coffres d’argent et de bijoux comme symboles de l’inconsistance des biens matériels, etc.

Mais le détail qui presque toujours révèle la présence d’une scène de “vanitas” est l’apparition d’un crâne humain.


Lié à “souvenir mori” des Romains, le crâne met en garde contre la fragilité et la fugacité de l’être humain après le passage du temps. Tertullien, dans son Apologétique, raconte que lorsqu’un consul revenait triomphant à Rome, il y avait la coutume de nommer un serviteur pour l’accompagner et dont la mission était de tenir la couronne de laurier sur la tête du vainqueur tout en lui chuchotant à l’oreille la phrase “souviens-toi que tu dois mourir”, comme un avertissement qu’il doit se comporter en homme, non en dieu, et lui rappeler que la mort, qui est égalitaire et niveleuse, coupe avec sa faux tous les privilèges de la hiérarchie et de la fortune car, devant elle, le plus riche n’a qu’un linceul .

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Le crâne symbolise le vrai visage du spectateur : “regarde vers toi bien en moi, car je suis ton miroir”.


Ainsi, la présence d’un crâne dans l’expression artistique indique le “memento mori” ou “vanitas”, deux formules qui rappellent que l’on est mortel et qui induisent la déception. de ce monde ou aussi appelé, fin de l’illusion.



La vertu sans prudence est une vaine vertu


Considéré la Prudence comme la vertu adéquate pour découvrir la tromperie du monde, nou est-ce par hasard que le crâne fait aussi partie de ses attributs.

Aussi connu sous le nom de sagesse pratique ou de compréhensionAristote éleva la prudence au rang de vertu intellectuelle, arguant que c’est sa sage délibération qui permet de distinguer et de différencier le bon du mauvais.

Concept quoi Cicéron et Sénèque adoptèrent : prudence “consiste en connaissance, de bonnes choses, de mauvaises choses, et de choses qui ne sont ni bien ni mal » (Cicéron. nat. deor. 3, 138)

Ovide dans son Fasti (Ov. jeûne. 1, 89-144) fait référence à ce type de connaissances à partir de l’image littéraire du dieu Janus, dont le double visage lui permet de observer simultanément l’entrée (naissance) et la sortie (décès), capacité également liée à Hécate, la déesse à trois visages qui garde le carrefour de trois routes, capable de visualiser les trois phases du temps avec la sagesse que cela implique, les deux aspects, qui héritera plus tard l’image de la prudence. (2)
Prudencia, arche de saint Augustin à Pavies. XIV

Par conséquent, à travers leurs visages et leurs yeux divers, la prudence a le pouvoir de connaître les trois états de temps prenant la mémoire du passé (mémoire) pour s’appliquer au présent (intelligence) selon ce qu’il prévoit arrivera dans l’avenir (providence).

“Prudence prévoit combien peut prévoir, observer et s’éloigner de vous, bien avant que ça n’arrive, tout ça Je peux te faire du mal” (Sénèque. épist. 98, 7).

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Le même, bien qu’avec plus de rhétorique, expose l’Église catholique : “C’est la vertu qui dispose la raison pratique à discerner notre vrai bien en toute circonstance et à choisir les bons moyens pour y parvenir” (Catéchisme, 1806).

Bref, la prudence, c’est avoir l’esprit sain pour savoir utiliser la juste et juste mesure dans chaque action.

Sans aucun doute, ses qualités sont assimilées à la sagesse offerte par les célèbres aphorismes grecs qui persistent avec modération, rien de trop“, et dans la connaissance de soi,”Apprenez a vous connaître”. Se connaître, c’est acquérir la lucidité sur sa propre nature et les limites auxquelles elle est soumise.

Et c’est ici que l’allégorie du crâne prend sens comme attribut de la prudence, puisque désormais l’homme il regarde vers le passé pour se rendre compte que son avenir est périssable, mortel, bref, un crâne.

Peut-être que la meilleure façon de représenter ce concept pertinent afin d’en prendre conscience, est d’impressionner le personnel montrant celui qui sera son visage après la mort, qui égalise et entraîne dans sa ronde tous les êtres humains, quels qu’ils soient, quel que soit leur âge et sans tenir compte de leur statut social.


Dans la diversité des attributs variables pour une même allégorie et, contrairement au baroque qui Plus il y a d’éléments dans la représentation, mieux c’est, ce qui n’était pas le cas dans le roman qui cherchait à préciser le maximum d’informations avec un minimum de symbolisme.


On en trouve ainsi un exemple dans le soi-disant “crâne d’Adam”, aux pieds du Christ crucifié, un recueil d’images de théories différentes mais qui convergent toutes, d’une manière ou d’une autre, sur la présence et le sens de la mort.


Ou dans la soi-disant “femme avec un crâne” sur le tympan des Platerías à Saint-Jacques-de-Compostelle, sculptée par l’un des ateliers romans les plus célèbres, dont la capacité artistique en matière de représentation dépasse toutes les attentes de ses contemporains. Dans ce cas, un femme hiératique aux vêtements gréco-romains, reste assise dans un siège distingué tenant sur ses genoux un crâne humain qu’elle désigne de l’index.


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Et nous l’avons ici, expulsé de son contexte d’origine et confiné dans un puzzle de sculptures survivantes. Cette femme magna qui pointe un crâne humain sur ses genoux, a été dépouillée de son environnement il y a longtemps et placée dans un environnement hostile.

D’autres personnes, d’autres époques et d’autres connaissances vides de sens lui ont donné une réputation différente. Dépossédée de son statut de dignité, elle est désormais une transgresseur, une femme adultère qui, mortifiée dans sa punition, doit quotidiennement baiser le crâne de son amant.

Paradoxalement, cette prudence savante qui veille à maintenir la santé de notre entendement ainsi que la pureté de notre âme, cette prudence révélatrice vanité qui au temps de ses créateurs pointé du doigt la fin inexorable de nos insomnies éphémères, a connu ce qu’il tient tant à avertir, l’inconsistance des honneurs, le mépris du monde et la certitude de sa mort.

Madeleine de Francesco Furini XVIe siècle

Privé de sa saine vertu, le même passage du temps a déplacé les symboles de la prudente vanité vers un autre réceptacle religieux ; spécifiquement à un personnage biblique qui a toujours été assimilé par l’Église au péché, à la vanité mais aussi au salut, la figure de la Madeleine pénitente.

Sans aucun doute, c’est la scène du moment présent, lorsque Magdalena, contemplant son avenir dans le crâne, entrevoit la futilité de sa vie passée et comprend que son salut futur réside dans la décision qu’elle prend dans le présent. Avec prudence, la figure de la Madeleine nous exhorte à nous préparer en tout temps à comparaître devant Dieu qui, au Jour du Jugement, demandera à rendre compte de nos actes.

“Regarde-toi bien en moi, car je suis ton miroir.”

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