Tensions autour de la possibilité de revendre à perte le carburant

Tensions autour de la possibilité de revendre à perte le carburant

Après les déclarations chocs, le retour à la réalité économique ? Ce mardi, à l’issue de la réunion qui s’est tenue à Bercy sur la possibilité de revendre à perte le carburant à compter du 1er décembre prochain, ni les distributeurs invités, ni Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, qui les a reçus, n’ont souhaité s’exprimer. Officiellement du moins.

Car depuis qu’Élisabeth Borne a annoncé, dans nos colonnes, qu’à titre “exceptionnel”, l’interdiction de revente à perte (inscrite dans la loi depuis 1963) allait être levée, “sur une période limitée de quelques mois”, les patrons de la grande distribution ne décolèrent pas.

“Samedi soir dernier, quand on a découvert l’interview, on a d’abord cru que les propos de la Première ministre n’avaient pas été compris par vos journalistes”, rembobine un distributeur. “Franchement, elle a fumé la moquette ! ” balance un autre. Seul un troisième, bien que “sceptique” sur cette mesure, dit “comprendre” le dilemme actuel du gouvernement : “le carburant à 2 euros, c’est un tabou, c’est aussi le spectre des Gilets jaunes, on peut entendre qu’ils fassent feu de tout bois pour alléger la facture des automobilistes”.

Une baisse qui pourrait se répercuter sur l’alimentaire

Oui, mais voilà, ont fait valoir les patrons d’enseignes ces derniers jours : aucune entreprise ne peut survivre en vendant à perte. A fortiori si, comme l’annonçait dimanche le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, les prix à la pompe étaient rabotés de “50 centimes”, ce qui représenterait “une économie de 25 euros sur un plein de 50 litres”. “Un distributeur indépendant qui devrait baisser ses tarifs de 50 centimes est mort en trois semaines”, fustige l’un d’eux, qui s’exprime comme bien d’autres avec véhémence sur le réseau social LinkedIn.

À Bercy, Bruno Le Maire l’a bien compris. Non seulement, après avoir reçu les pompistes indépendants, lundi, il confirmait que les stations indépendantes “bénéficieront de compensations”, mais il rappelait aussi et surtout mardi que cette mesure “exceptionnelle” est juste une “faculté supplémentaire, ouverte aux distributeurs qui le peuvent, pour participer à la baisse des prix”.

Une sacrée marche arrière. En clair, donc : rien n’est obligatoire. “Le Maire a compris nos contraintes, il sait que cette décision impacte directement nos comptes d’exploitation. Il nous ouvre juste un droit”, se réjouit un patron d’enseigne, qui a bien fait valoir à Bercy le fait que s’il perd trop d’argent sur l’essence, il pourrait être tenté… de relever ses prix dans l’alimentaire. Autant dire qu’alors certains paniers ou trimestres anti-inflation auraient du plomb dans l’aile.

“Cinq centimes, cela représente des millions d’euros”

Ce droit, les distributeurs vont-ils l’utiliser à compter du 1er décembre ? Si c’est le cas, ce sera avec parcimonie. Pour l’heure, chacun fait tourner ses calculettes. Ira ? Ira pas ? “L’enjeu est financièrement tellement important que chaque enseigne multiplie les scénarios”, décrypte un bon connaisseur du sujet. Sachant que si l’une d’elles sort du bois (tous les regards se tournent vers Michel-Edouard Leclerc), les autres seront obligées de suivre.

“On fera sûrement des opérations, mais ponctuelles, comme le temps d’un week-end par exemple, à l’instar de ce qu’on a fait pour les prix coûtants”, déroule le porte-parole de l’une des principales enseignes. Qui tient à être transparent : “Inutile d’espérer une baisse de 20, voire 10 centimes. Tout au plus, nous irons à 5 centimes.”

“Cinq centimes, mais c’est déjà énorme, cela représente des millions d’euros de perdus en un week-end !” tempère un autre, qui évoque plutôt une “réduction faciale très modeste”. Traduisez, une très faible baisse tarifaire. Mais n’exclut pas, en revanche, de monter une opération “à perte”, par exemple lors d’un des week-ends précédant Noël.

Rien ne se fera en tout cas avant le 1er décembre, le gouvernement ayant confirmé ce mardi que la loi qui doit changer les règles du jeu était attendue pour cette date. “1,99, c’est un plafond, la politique de TotalEnergies sera assurée (…) Je ne descendrai pas plus bas. C’est déjà un effort important”, a de son côté déjà prévenu le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné, interrogé par un journaliste de l’émission “Quotidien”, actant le refus de vendre à perdre, alors que l’enseigne a déjà décidé d’un plafonnement des prix.

“Encore une annonce de Matignon sans concertation”, soupire un distributeur, qui rappelle le “précédent couac du trimestre anti-inflation, qui a laissé des traces. Une fois encore, c’est à nous et à nous seuls qu’on demande des comptes”, regrette-t-il, les yeux tournés vers certains industriels, accusés “de ne pas avoir suffisamment répercuté la récente baisse des matières premières dans leurs tarifs”.

Conscient que les relations avec les enseignes de la grande distribution sont chaotiques depuis plusieurs mois, Bruno Le Maire a clos la réunion de mardi en rappelant que les 75 multinationales concernées par ces reproches seraient à leur tour reçues “dans les prochains jours”.
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