Totem ou partenaire de vie, le mythe du sac

2024-10-04 11:10:14

Préface suggestive d’Ines de la Fressange. Beau, blanc et doré, imposant dans ses 480 pages, «Borse» (en français «Sacs») de Sophie Gachet sort en Italie chez Ippocampo. C’est un livre à lire et à feuilleter, du genre qu’on mâche avec délice, en choisissant de temps en temps sur quoi se concentrer. Comme lorsque vous kidnappez tel ou tel délicieux macaron aux couleurs pastel dans un emballage très raffiné et savamment assorti. Les sacs sont un sujet séduisant. Ce sont d’étranges objets qui servent à poursuivre, toujours sans succès, un mirage idéal de perfection. Élégance et capacité. Style et praticité. Des nécessités absolues. Lors du choix d’un sac, une recherche effrénée de la coïncidence des contraires se déroule souvent. Alors seulement, comme cela arrive habituellement, succomber à une impulsion drastique et soudaine. Que! Comme il est beau celui-là ! Mais tu ne le voulais pas bleu ? Vous n’avez pas dit bleu ? Ça ne fait rien. Que. Que! Celui-là est tellement mignon ! Ensuite, généralement, l’acheteur commence son travail pour convaincre la personne innocente et de bonne foi qui l’a accompagnée au magasin. Tu vois? C’est confortable. Et puis c’est inhabituel. Insolite sans être excentrique. Est-ce que ça ne me convient pas ? C’est proportionné à ma silhouette. Et puis c’est sportif mais aussi élégant… Le discours d’une aspirante vendeuse. Parce qu’avec les sacs, c’est une question d’instantané. Il n’y a pas de demi-mesures. Ce sont des rappels. Des affinités électives qui se manifestent soudainement, impérieusement. C’est décidé, je prends ça.

Force est donc de constater que le livre de Sophie Gachet est un catalogue raisonné de totems et de visions, de pièces faciles et de chefs-d’œuvre. Des objets et sujets de désir. Des pages d’Histoire de la Mode sont entrées directement dans le mythe, dans le répertoire de l’imaginaire, dans le garde-manger des rêves. Le volume contient de splendides photographies qui vous permettent d’observer chaque sac en détail. A considérer dans ses déclinaisons de matières et de couleurs. Évaluer leur impact sur des looks complets à travers des instantanés qui les montrent portés. Les descriptions des modèles sont précises et retracent souvent l’évolution historique d’un seul sac. Raconter la manière dont il est né et renaît, grâce à l’ingéniosité et à l’étude de nouveaux créatifs qui ont développé un modèle de référence transmis au fil des années. Une force supplémentaire de cet ouvrage est que, loin d’être réservé à l’usage des professionnels, il se présente comme une splendide pièce de collection, décorative en soi. Parlez à toute personne curieuse, même de loin. Et cela alimente de nouvelles questions et de nouvelles curiosités. Cela relie les sacs au climat qui les a vu entrer sur la scène de la mode. Références croisées. Enquêter sur les citations. Une belle fête, en somme. Tout autour d’elle, le sac alpha et oméga du quotidien féminin.

Devant l’extrême centralité de cet accessoire, son caractère indispensable, son omniprésence, bon nombre d’hommes s’interrogent avec un véritable étonnement. « Mais que devras-tu apporter… ? Pourquoi en avez-vous besoin ? Ensuite, vous cherchez et cherchez et vous ne trouvez jamais rien ! » Les femmes les regardent de côté, entre dédain et pitié et pensent : « Il ne comprend vraiment pas. Pauvre gars. On n’y arrive pas.” Car pour les hommes, âmes simples, un sac est un contenant et c’est tout. Profane! Le sac est tel quel. Même s’il est si micro qu’il ne contient rien. Le sac subsume. Le sac est un bouclier. C’est une arme contondante. Malle de voyage et cartable d’écolière. Couverture Linus. Et le petit paquet du gamin qui s’enfuit de chez lui. La Bourse le proclame. Et ça se cache. C’est un coffre-fort pour l’inconscient. Certains hommes, les plus perspicaces, en ont l’intuition, bien qu’obscurément. Au moins, ils s’en doutent et si on leur demande de chercher quelque chose dans ce coffre au trésor ambulant, ils se retirent immédiatement. Face à une simple invitation du type : « S’il vous plaît, prenez le stylo, il est là quelque part dans mon sac… » il est fort possible qu’une réponse instinctive pleine de terreur explose : « Non ! Je ne regarde pas là-dedans. Pour l’amour de Dieu… » Dans des cas comme celui-ci, les femmes sourient avec indulgence. Et ils pensent : « Lâche ! »




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