Tunnel alpin : Ligne ferroviaire Lyon-Turin : Méga projet d’une époque révolue

Lors de manifestations contre la construction d’un nouveau tunnel alpin, des affrontements ont eu lieu ce week-end entre des manifestants et la police près de la ville frontalière française de Saint-Jean-de-Maurienne. La préfecture, qui avait auparavant interdit la manifestation, a indiqué que sept membres des forces de l’ordre et un manifestant avaient été légèrement blessés. Lorsque les forces de l’ordre ont arrêté les manifestants à 25 kilomètres du chantier près du village de Saint-Rémy-de-Maurienne, ils ont fait un écart sur le côté, franchi une petite rivière et occupé une voie ferrée parallèle et une autoroute. En conséquence, la circulation a été bloquée ou entravée pendant des heures. Selon les organisateurs, environ 5 000 militants écologistes venus de toute la France et des pays voisins que sont l’Italie et la Suisse ont participé aux actions malgré l’interdiction de rassemblement. Ils ont fait face à 2 000 policiers, qui ont également arrêté et refoulé plus de 100 Italiens qui s’étaient rendus à la frontière.

La protestation est dirigée contre la construction du tunnel de base du Mont Cenis de 57 kilomètres sur le projet de ligne à grande vitesse franco-italienne de Lyon à Turin. Le projet gigantesque vise à réduire le temps de trajet de quatre heures actuelles à deux heures à l’avenir. La longueur record du tunnel alpin est de 45 kilomètres en France et de 12 kilomètres en Italie. Les partisans affirment que le nouveau tunnel détournera également une partie du transport de marchandises de la route vers le rail. Sur les trois millions de camions qui traversent chaque année les Alpes entre la France et l’Italie, 700 000 prendront plus tard le train.

Pour les organisations environnementales et le Parti vert, il s’agit purement d’une revendication de protection. Depuis plus de 15 ans, un service de trains-navettes pour camions relie les terminaux d’Aiton dans l’arrondissement de Saint-Jean-de-Maurienne à Orbassano près de Turin par un tunnel alpin plus petit. Cependant, seuls 20 à 25 % de la capacité de cette route, spécialement développée pour le trafic de marchandises, sont utilisés à ce jour. S’ils étaient mieux utilisés et si le trafic de passagers à grande vitesse était également supprimé ici, le nouveau tunnel de base ne serait pas du tout nécessaire. Les associations environnementales soulignent qu’en incluant les tunnels parallèles et les interconnexions nécessaires au maintien de l’exploitation ferroviaire et aux urgences, un total de 260 kilomètres de tunnels devraient être creusés dans la roche. On craint des dommages permanents au paysage, à la biodiversité et aux ressources en eau. Les gigantesques travaux de forage affecteraient de nombreuses sources et aquifères naturels qu’il faudrait détourner ou canaliser.

Pour des détracteurs comme Philippe Delhomme de l’association locale contestataire Vivre et agir en Maurienne, le coût total du projet ferroviaire de 26 milliards d’euros, financé à 40 % par l’UE et sur lequel travaillent jusqu’à 1 000 personnes, est complètement surdimensionné. Selon lui, cela a été le résultat de plusieurs études scientifiques sur le rapport coût-bénéfice. “C’est un projet ambitieux qui date d’une époque révolue et qui ne correspond plus à notre époque car il est écologiquement dévastateur et économiquement insensé”, estime Delhomme. En fait, les plans du tunnel ont été établis il y a 40 ans, la construction est en cours depuis 1992 et son achèvement est prévu en 2032. Mais il ne devrait pas être rentable avant 2057, voire pas du tout.

La protestation des écologistes a été accueillie par une petite contre-manifestation des politiciens locaux. “Nous sommes favorables au tunnel qui, nous l’espérons, soulagera une partie du trafic des camions”, a déclaré Philippe Rollet, maire sans parti de Saint-Jean-de-Maurienne. “Ils engorgent notre réseau routier toute l’année.” Les gaz d’échappement, qui polluent l’air que nous respirons, surtout pendant les mois d’hiver sans vent, sont “gravement nocifs pour la santé des gens ici, en particulier des enfants”.