Un coup de projecteur sur l’initiative des chefs cuisiniers pour sauver l’anguille du marais poitevin

Un coup de projecteur sur l’initiative des chefs cuisiniers pour sauver l’anguille du marais poitevin

Il s’agit d’un coup de projecteur national sur une espèce typique du marais poitevin. Début novembre, plus de 3 000 chefs cuisiniers ont répondu à l’appel de l’organisation environnementale Océan Éthique en refusant de servir dans leurs restaurants des anguilles ou leurs juvéniles, les civelles. Un mouvement rejoint par de grands noms de la cuisine, comme Thierry Marx, Mauro Colagreco ou Grégory Countanceau, et initié notamment par un chef des Deux-Sèvres : David Séguin, gérant du restaurant l’Adress à Bessines, près de Niort.

« C’est une démarche logique pour moi. Je suis né dans le marais poitevin, j’ai pêché l’anguille, c’est un produit fabuleux. Mais quand on voit l’espèce disparaitre, on se doit d’agir. On ne peut pas défaire les stocks d’une énième espèce qui va finir par disparaitre. Ce n’est pas possible, on ne peut plus », a déclaré David Seguin. Depuis une dizaine d’années, David Seguin a rayé l’anguille de sa carte. « La nature est forte, elle se reconstruit quand on la laisse tranquille. Laissons l’anguille tranquille pour le moment. Si on veut que nos enfants puissent en manger un jour, il faut faire un effort. »

L’initiative ne fait pas l’unanimité dans le marais poitevin selon David Seguin. « Beaucoup de restaurateurs ne sont pas tellement contents de ce mouvement parce qu’ils en servent dans leurs assiettes, ça a longtemps été le plat phare ici. Aujourd’hui, il va falloir se tourner vers autre chose mais quand on est un chef un peu inventif, coller à son terroir, on y arrive il n’y a pas de souci. »

L’anguille, victime du braconnage et du réchauffement climatique

L’initiative a beau être « une goutte d’eau dans un océan », reconnait David Seguin, elle est saluée par la fédération de pêche des Deux-Sèvres, tout comme par celle de la Vienne. Son président, Francis Bailly, y voit l’occasion de sensibiliser le public sur l’état de l’espèce. « Mais le vrai problème dont il faut parler, c’est le braconnage des civelles, les bébés anguilles. Aujourd’hui l’espèce est en danger parce que des gens comme vous et moi se servent la nuit dans les estuaires français, notamment chez nous dans le Poitou parce qu’ils savent que les civelles valent très cher sur les marchés asiatiques ou espagnols par exemple. C’est une catastrophe. »

Un kilo de civelles se vend en moyenne 250 euros, mais les prix grimpent rapidement en fonction des marchés. Selon une étude réalisée par Europol, l’agence européenne de police criminelle, le braconnage en France représente plus de 100 tonnes de civelles par an, soit plus de 3 milliards d’euros. En comparaison, le quota de pêche autorisé en France cette année est de 65 tonnes. Francis Bailly ajoute : « L’anguille est aussi victime du réchauffement climatique, parce que les cours d’eaux s’assèchent et quand il n’y a plus d’eau, l’anguille meurt comme tous les poissons. Et en plus, on la pêche illégalement… C’est pour ce faire qu’il faudrait des mesures radicales prises au niveau du gouvernement, de l’Europe. Il faut un moratoire sur la question, il faut que l’Etat prenne ses responsabilités pour essayer de protéger ce qu’on peut encore protéger. »

Une population de jeunes anguilles divisées par 5 en 20 ans dans la Sèvre niortaise

Selon les chiffres du Parc interrégional du Marais poitevin, au niveau du premier barrage de la Sèvre niortaise, on comptait 500 000 jeunes anguilles (de moins d’un an) en 2001. Vingt ans plus tard, en 2021, on en comptait 90 000 soit cinq fois moins.

Aurélien Ruault, chargé de mission environnement et milieux aquatiques au Parc interrégional du Marais poitevin, salue donc la décision des chefs cuisiniers : « C’est une super initiative parce que ça permet d’expliquer aux gens que l’anguille est en danger. Aujourd’hui, si on a du mal à mener des actions pour préserver l’espèce c’est justement parce qu’il y a une méconnaissance de la situation, les gens sont étonnés quand je leur dis que l’espèce va mal. Cela va permettre de le faire savoir et de faire bouger les choses ».
#Niort #chef #cuisinier #sert #danguilles #dans #son #restaurant #pour #protéger #lespèce
publish_date]

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.