Un entrepreneur spécialisé embauché par Saint-Augustin-de-Desmaures pour réhabiliter un bassin de rétention des eaux pluviales refuse d’effectuer les travaux après avoir découvert des contaminants qui, selon lui, pourraient se répandre dans un lac voisin s’il perturbait l’écosystème avec ses machines.
La municipalité, n’ayant pas obtenu l’autorisation du ministère de l’Environnement pour entreprendre les travaux, réplique que le mandat est conforme aux normes et menace l’entrepreneur d’amendes de 2500 $ par jour de retard sur le calendrier prévu.
«Je me retrouve dans un conflit éthique», déclare Serge Lavergne, ingénieur spécialisé en environnement et propriétaire des Services hydriques Qwatro, qui a décroché le contrat de réhabilitation du site.
Soit je termine les travaux qui, selon moi en tant qu’ingénieur, sont illégaux, soit je continue de résister et je fais faillite car la Ville retient mes paiements en otage sans raison.
Serge Lavergne, ingénieur spécialisé en environnement et propriétaire des Services hydriques Qwatro
À l’été 2023, son entreprise a remporté un appel d’offres lancé par la municipalité pour réhabiliter deux bassins de captage des eaux pluviales, mal entretenus depuis leur construction dans les années 1990. La proposition de Qwatro, totalisant 1,07 million, était inférieure de 15 % au prix de son concurrent le plus proche.
Dans le cadre de l’appel d’offres, M. Lavergne avait expressément demandé s’il y avait des raisons de croire que le site pouvait contenir des terres contaminées. «La Ville n’a connaissance d’aucun fait ou circonstance donnant à penser que les déblais au fond du marais ou la matière organique présente sur le marais pourraient être contaminés», lui a-t-on officiellement répondu.
Cependant, après le début des travaux, son équipe a découvert des contaminants – des huiles et des graisses – dans des sédiments accumulés dans un marais utilisé pour filtrer l’eau avant qu’elle ne se déverse dans le lac Saint-Augustin. Selon M. Lavergne, le mélange des sédiments par les machines pour enlever ces terres contaminées risque de « perturber de manière significative l’écosystème » et de provoquer des fuites d’eau polluée dans le lac Saint-Augustin.
Selon lui, un certificat d’autorisation du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques est nécessaire pour entreprendre de tels travaux.
Un “devis blindé”, rétorque le maire
«Bien sûr que cela se réglera devant les tribunaux», réagit le maire de Saint-Augustin-de-Desmaures, Sylvain Juneau. La société de génie qui a conçu l’appel d’offres et supervise les opérations, Eurêka Environnement, assure à la municipalité qu’aucun permis n’est requis car il s’agit de simples travaux d’entretien.
Nous ne demandons pas l’avis d’ingénieur de M. Lavergne. Nous lui demandons d’exécuter les travaux.
Sylvain Juneau, maire de Saint-Augustin-de-Desmaures
Même si la majeure partie des travaux a déjà été réalisée par Qwatro sur le site problématique, la municipalité refuse de verser le moindre montant, arguant que la découverte de contaminants incombe entièrement à l’entrepreneur. «Notre devis est solide», affirme le maire.
«Nous parlons de contaminants, mais ce ne sont pas de l’uranium ou autre chose horrible», ajoute le maire. «Il s’agit principalement de sel de déneigement et de métaux lourds provenant de véhicules», précise-t-il.
Selon lui, Qwatro s’est mise dans une mauvaise posture en soumissionnant à un prix trop bas sans tenir compte de la complexité des travaux.
Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, informé du litige, déclare analyser la situation auprès des parties impliquées. «En cas de non-respect de la législation ou de la réglementation environnementale du Québec, le Ministère prendra les mesures appropriées, disposant de plusieurs moyens pour le faire, conformément à la directive sur le traitement des manquements», indique le porte-parole Frédéric Fournier.
M. Lavergne « implore » la Ville de reconsidérer sa position. «Si je porte l’affaire devant les tribunaux, cela prendra cinq ou six ans à régler, estime-t-il. Si cela n’est pas réglé d’ici là, je ferai faillite dans cinq ou six mois », affirme-t-il.
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